Paroles d’évêques au sujet du Motu Proprio « Summorum Pontificum »
Mgr Robert Le Gall Archevêque de Toulouse, Président de la commission épiscopale pour la liturgie et la pastorale sacramentelle
Le Pape appelle de ses voeux « un enrichissement réciproque des deux formes d’usage du Rite romain », pour éviter toute rupture, mais continuer l’histoire de la liturgie « faite de croissance et de progrès ». Cette perspective d’avancer ensemble est source d’espérance pour tous.
Il importe aussi de rappeler que le Motu proprio se situe dans le contexte de documents du Magistère de grande importance, comme les Lettres encyclique ou apostolique de Jean-Paul II sur l’Eucharistie et l’Exhortation apostolique de Benoît XVI sur le même mystère. Le juste souci des formes «ordinaire et extraordinaire» doit nous conduire à une meilleure intelligence du fond auquel achemine la mystagogie du « Mystère de la foi ».
La célébration de l’Eucharistie, nous ont dit récemment les papes de façon nouvelle, demande un équilibre entre la table de la Parole (largement ouverte depuis la rénovation liturgique) et celle du Corps et du Sang du Christ, de même qu’un lien étroit entre l’adoration et l’engagement de solidarité envers les démunis de toute sorte. Voilà jusqu’où il nous faut aller pour « rendre visible la richesse spirituelle et la profondeur théologique » de nos Missels.
S’imprégner du sens profond de la réforme de Vatican II » Cardinal Philippe Barbarin, archevêque de Lyon
« J’aimerais profiter de cet appel à l’unité de notre pasteur commun, pour suggérer à tous d’approfondir le mystère de la liturgie et de refaire quelques lectures à ce sujet. Nous n’avons pas encore mesuré la richesse profonde de la réforme liturgique de Vatican II. Je propose, par exemple, que l’on relise, seul, en groupe ou dans les communautés paroissiales, le décret du Concile sur la liturgie pour s’imprégner du sens profond de cette réforme. Mais on aura aussi grand profit à lire la Constitution Apostolique Missale Romanum du Pape Paul VI (1969) présentant le nouveau Missel ; c’est un texte court et essentiel. Le Missel lui-même, avec sa Présentation Générale, mérite une attention renouvelée (les prières, les prescriptions de mise en oeuvre, une perception affinée de ses équilibres). La première section de la seconde partie du Catéchisme de l’Eglise catholique, intitulée « L’économie sacramentelle », présente le mystère de la liturgie avec une hauteur de vue qui enrichira tous les lecteurs.
Il me semble que nous pouvons aussi reprendre le dialogue avec ceux qui sont attachés au Missel de 1962. Ils savent bien que la liturgie est vivante, qu’il serait bon d’avoir un même calendrier liturgique (où de nouveaux saints sont inscrits à chaque canonisation). Nous devons aussi parler du nouveau lectionnaire qui offre un choix beaucoup plus riche de textes de l’Ecriture Sainte, et il est clair que ce serait pour nous tous un progrès de lire, méditer et commenter les mêmes textes bibliques le dimanche ou en semaine. C’est avec tous ces signes que nous progresserons dans l’art de vivre comme des frères et soeurs dans l’ « Eglise une, sainte & ».
L’essentiel est de nous souvenir que l’unité de ses disciples est une intention majeure du Seigneur Jésus dans la prière qu’il adresse à son Père, la veille de sa Passion : « Que tous, ils soient un, comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi & pour que le monde croie que tu m’as envoyé » (Jean 17, 21).
« Pourquoi j’obéis au Pape » Mgr Simon, archevêque de Clermont
« Quand je lis, un peu partout, que le Pape accorde tout aux intégristes et qu’il n’exige rien en contrepartie, je ne suis pas d’accord : il leur accorde tout sur la forme des rites, mais il ruine totalement leur argumentaire sur le fond. Tout l’argumentaire de Mgr Lefebvre reposait sur une prétendue différence substantielle entre le rite dit de Saint Pie V et le rite dit de Paul VI. Or, réaffirme Benoît XVI, il n’y a pas de sens à parler de deux rites. On pouvait, à la rigueur, légitimer une résistance au Concile si l’on pensait, en conscience, qu’il existait une différence substantielle entre deux rites. Peut-on légitimer cette résistance, et a fortiori un schisme, à partir d’une différence de formes ?
Il faut aussi remarquer que Benoît XVI a publié, – hasard du calendrier ?- , une semaine auparavant, sa « lettre aux catholiques de Chine » qui est une très belle apologie de la liberté religieuse. Ensuite, lundi dernier, le Cardinal Levada nous a envoyé une note pour justifier l’expression conciliaire si décisive du verbe ‘subsistit in’ en lieu et place du verbe ‘est’ dans Lumen Gentium. Or, sans entrer dans une analyse trop technique, j’ai souvenir d’avoir lu sous des plumes intégristes que ce choix du verbe ‘subsistit in’ à la place du verbe ‘est’ était le début de la catastrophe conciliaire car il constitue précisément le fondement théologique de l’œcuménisme. Le choix de cette troisième publication, à cette date, ne me semble pas destiné à marquer une fois de plus les limites du dialogue avec les autres Eglises et Communautés chrétiennes. Dans cette perspective, ce ne serait qu’une énième redite. Je le comprends bien plutôt comme l’invitation à ne pas refuser une articulation clef de la pensée de l’Eglise catholique sur elle-même et sur les autres chrétiens. Je crois vraiment que nous aurions tort, ici, de nous tromper de lecture.
« Une chance pour la communion » Mgr Dominique Rey, Evêque de Fréjus Toulon
Le Motu Proprio évoque la possibilité « d’ériger une paroisse personnelle au titre du canon 518, pour les célébrations selon la forme ancienne du rite romain » (art. 10). Notre diocèse a, en quelque sorte, anticipé en procédant à l’érection de la paroisse personnelle Saint-François de Paule. Les prêtres et séminaristes qui sont attachés à cette paroisse sont pleinement insérés à la vie de notre Eglise diocésaine, ils pourront se mettre au service de l’application du Motu Proprio.
Ce Motu Proprio peut-être une chance pour la communion. Son application nécessitera des conversions, de sortir des préjugés et des anathèmes, dans la fidélité aux acquis de Vatican II.
« Accueillir les nouvelles mesures avec sérénité » Mgr Roland Minnerath, Archevêque de Dijon
Dans notre diocèse, la lettre papale ne devrait pas entraîner de bouleversement. Les fidèles qui sont attachés à la liturgie d’avant Vatican II bénéficient déjà des services d’un prêtre qui célèbre selon l’ancien rituel à la Maison natale de S. Bernard à Fontaine-lès-Dijon.
Je souhaite de tout coeur que les frères prêtres, qui se dépensent généreusement pour mettre en oeuvre la réforme liturgique et les enseignements du Concile, n’aient pas le sentiment d’être désavoués et ne se découragent pas. Ensemble, nous ferons tout pour que les nouvelles mesures soient accueillies avec sérénité et ne conduisent pas à de nouvelles incompréhensions ou divisions.
« Donnons aux jeunes le désir de s’engager » Mgr Michel Di Falco, Evêque de Gap
Ne perdons pas nos forces en vaines polémiques autour de ce Motu Proprio, mais forts de l’élan donné par le rassemblement diocésain de Pentecôte , faisons en sorte que l’Eglise, tout en restant fidèle à ce qu’elle est, puisse faire face à l’évolution de la société et être attentive à ce qui se vit autour d’elle. Un des problèmes majeurs pour notre temps est le manque de prêtre. Donnons aux jeunes le désir de s’engager en leur offrant une parole forte et des communautés accueillantes qui aiment se rassembler pour célébrer leur Seigneur et aller vers leurs frères.
« Que les liturgies soient belles, priantes, recueillies » Mgr Michel Santier, Evêque de Luçon
Je redis toute ma gratitude et ma reconnaissance à tous les acteurs qui, chaque dimanche, préparent et animent dans les paroisses les eucharisties dominicales : chorales, organistes, animateurs de chants, lecteurs, religieuses, diacres, prêtres.
Que les liturgies soient belles, priantes, recueillies, et qu’elles donnent le goût de Dieu.
Je redis toute ma confiance à tous les catéchistes et enseignants, animateurs d’aumônerie et de mouvements d’enfants, de jeunes et d’adultes, pour qu’ils continuent avec audace et courage à proposer l’Evangile comme inspirant la vie en famille et les engagements pour une société plus juste et plus humaine.
Demeurez unis autour de vos prêtres et de votre évêque car la motivation principale du pape est celle-ci : « Il s’agit de parvenir à une réconciliation interne au sein de l’Eglise ».
Le Motu Proprio publié ce 7 juillet sera mis en application à partir du 14 septembre; ce qui permettra de voir comment prendre en compte les demandes des fidèles qui désireraient participer à la messe selon le Missel de 1962, comme cela se fait déjà à Luçon.
Cela doit se vivre dans le calme, dans le respect des uns et de autres, sans cris de victoire ; sinon on risquerait de s’éloigner de ce que désire le pape : l’unité de l’Eglise.
Ce qui m’anime comme évêque, c’est d’annoncer l’Evangile ; je ne peux pas le faire seul, j’ai besoin de vous, je compte sur vous.
Un geste fraternel Mgr Lucien Fruchaud, Evêque de Saint-Brieuc et Tréguier
Avant même que paraisse ce Motu Proprio, avec le Conseil Presbytéral, le Conseil épiscopal, le Service diocésain de la pastorale liturgique et sacramentelle, conscients de notre responsabilité de la communion ecclésiale, nous avions été sensibles et accueillants à la requête de certains de nos frères qui souhaitaient demeurer en pleine communion ecclésiale tout en célébrant avec le Missel promulgué par Jean XXIII en 1962. Il nous avait semblé que l’heure était venue d’un geste fraternel à l’égard de certains de ces frères. Mais nous tenions en même temps, comme le souhaite Benoît XVI dans son Motu Proprio, que notre proposition se présente comme un appel à une réciprocité, dans un dialogue vrai avec les groupes demandeurs et que l’initiative prise dans le diocèse soit définie dans la plus grande clarté.