Stéphanie, aumônier d’hôpital à Tourcoing

Accompagner les personnes malades au sein des établissements de santé, entre présence silencieuse, prière, liens avec les équipes soignantes et les familles : la mission des aumôniers d’hôpitaux est empreinte d’humanité et répond aux appels de l’Évangile. À l’occasion du dimanche de la santé, ce 9 février, rencontre avec Stéphanie, qui intervient dans deux cliniques à Tourcoing (59). Par Florence de Maistre.
“Pour moi, l’hôpital est le lieu de la fragilité humaine par excellence. Il s’agit de rejoindre l’autre dans son humanité, au moment où il traverse la maladie, la faiblesse : c’est essentiel, au nom de ma foi et au nom de ma propre humanité ! L’aumônerie, c’est une présence de manière inconditionnelle, gratuite, désintéressée. C’est être là pour manifester à l’autre sa dignité d’être humain. Ce ne sont pas des grands mots ou des grands concepts ! Au quotidien, face aux corps qui lâchent, aux familles qui lâchent parfois aussi, c’est être au chevet des personnes et leur dire qu’elles ont encore du prix aux yeux des hommes et aux yeux de Dieu”, partage Stéphanie Lipka, 48 ans, engagée dans la pastorale de la santé du diocèse de Lille depuis neuf ans. Mariée et mère de cinq enfants âgés de 8 à 20 ans, elle habite à Tourcoing, dans la métropole lilloise. Aumônier d’hôpital depuis sept ans, elle vit sa mission comme une reconversion. À la suite de son congé parental, l’ancienne responsable d’un service de contrôle de gestion s’investit dans sa paroisse et ressent le besoin de se former dans l’animation pastorale. Elle découvre différents lieux de service et expérimente le milieu hospitalier. “Je m’y suis tout de suite sentie bien. L’hôpital m’a tout de suite parlé. J’ai été en stage plusieurs mois sur différents sites avant d’accepter la mission sur un hôpital. Aujourd’hui, je suis au service de deux cliniques à Tourcoing à la suite d’un déménagement”, indique-t-elle.
Écouter
Sur les deux établissements de santé, Stéphanie encadre une équipe de bénévoles. Elle les accompagne, les forme, passe du temps avec chacun avant de les envoyer auprès des malades. Certains volontaires zélés voudraient-ils annoncer l’Évangile haut et fort ? L’aumônier leur rappelle que la rencontre se vit au sein de l’hôpital, un lieu laïc. Là, les croix et les chapelets ne se portent pas en bannières : c’est l’écoute qui est première. “Dans nos visites, nous sommes d’abord présents pour écouter la personne malade. Nous la rejoignons là où elle en est dans sa vie, son état de santé, sa situation familiale, sa foi”, précise Stéphanie. Il s’agit d’être attentif, délicat avec tous, patients et soignants.
Les soignants s’occupent des corps, mais disposent de peu de temps avec les personnes. Nous, si.
L’entente avec le corps médical est importante, c’est lui qui reçoit en ses murs l’équipe de l’aumônerie, déléguée de l’Église. Stéphanie s’efforce de nouer de bonnes relations avec le personnel soignant et d’œuvrer dans une confiance partagée. Elle s’assure toujours de l’accord du chef de service avant d’intervenir. Dans l’autre sens, ce dernier indique les personnes qui pourraient bénéficier d’une visite. Celles qui souffrent d’une solitude extrême, celles qui ont installé un objet religieux dans leur chambre. L’aumônier explique : “nous collaborons bien ensemble. Les soignants s’occupent des corps, mais disposent de peu de temps avec les personnes. Nous, si. Même s’ils ne comprennent pas tous bien le côté spirituel, les soignants se rendent compte des bienfaits des visites, voient les patients apaisés et savent nous conseiller et nous orienter vers les personnes”.
Sourire
Entrer dans la chambre, dans l’intimité de la personne malade, se laisser accueillir par elle : la première étape de la rencontre est sensible. Stéphanie se présente toujours de façon claire comme catholique, puis elle attend la réaction de son interlocuteur. Ce peut être de la surprise, de la peur, de l’indifférence. La personne attend-elle quelque chose ? Parfois, elle partage d’emblée un moment de vie, son état actuel. D’autres fois, c’est plus difficile. Il faut parler de choses et d’autres avant que petit à petit le malade se livre plus profondément. Les visites sont aussi différentes que les personnes. “Nous sommes dans l’écoute active, nous reformulons beaucoup. Il m’arrive de ne rien dire, d’être simplement présente. En général, la personne confie qu’elle est catholique non pratiquante, ou qu’elle regarde la messe à la télé. Alors, je lui demande si elle souhaite que nous prions ensemble ou que je lui porte la communion”, relate l’aumônier.
En vivant sa mission, Stéphanie est heureuse de répondre à l’invitation de Jésus dans l’Évangile de saint Matthieu : “J’étais nu, et vous m’avez habillé ; j’étais malade, et vous m’avez visité ; j’étais en prison, et vous êtes venus jusqu’à moi !” (25, 36). Pour elle, la démarche manifeste pleinement la sollicitude de l’Église au chevet de l’homme quel que soit son état. “Nous sommes la pastorale du sourire”, souligne-t-elle en évoquant la prière que les visiteurs peuvent dire pour se disposer à entrer dans la chambre d’un patient. “(…) Habite-moi, Seigneur Jésus, efface-moi en Toi : rends-moi transparent à Ta présence, et apprends-moi à être le sourire de Ta bonté (…)” Stéphanie d’ajouter : “Nous ne sommes pas là entre notre nom, mais à travers nous le patient peut se laisser regarder par le Christ. Je visite de nombreuses personnes âgées. Avec le sourire, ça change toute la rencontre !”
Cheminer
L’aumônier et son équipe accompagnent aussi des personnes lourdement atteintes et cheminent avec elles jusqu’à la fin de vie. Quand le moment est favorable, quand la demande est ajustée, il y a toujours la possibilité d’être mis en relation avec un prêtre. “J’essaie de le faire passer en amont et non au dernier moment. Ce peut être pour recevoir le sacrement de réconciliation ou celui de l’onction des malades. J’ai la chance d’être ancrée dans un territoire et rattachée à la paroisse : les prêtres sont disponibles. Nous discutons ensemble des demandes de façon très simple, très fluide”, assure Stéphanie. Au moment du grand passage, alors que la personne n’est parfois plus en capacité de communiquer, l’aumônier propose aux proches une prière pour la confier au Seigneur, pour rendre grâce de sa vie. Dans ces épreuves, comme lors de certaines visites décapantes, Stéphanie veille aussi à ses bénévoles. Il s’agit de s’écouter, de relire, de faire circuler la parole à la suite d’un fait ou d’un mot perturbant au cours d’une visite, d’une souffrance. “Souvent les bénévoles sont pleins d’empathie et s’attachent aux personnes. C’est difficile de gérer le départ d’un malade ou son décès. Il faut accepter de le laisser partir. Je rappelle que notre mission est d’être là à un moment donné”, partage l’aumônier.
Stéphanie bénéficie, elle aussi, d’un accompagnement. Les aumôniers se retrouvent régulièrement en petite équipe supervisée par un ou une psychologue. Ces rencontres permettent de s’épancher et d’écouter les expériences des collègues. Des temps de formation et de recollection sont également proposés. Des journées diocésaines, très riches, permettent de se retrouver deux fois par an avec l’ensemble des bénévoles de la pastorale de la santé, de la pastorale des personnes handicapées et du service évangélique des malades (Sem). Ce qui ressource encore Stéphanie ? “Je participe depuis longtemps à un groupe de Prière des mères. Il m’aide à me recentrer sur ma famille, qui est mon premier lieu de mission et ma vraie ressource. Je confie mes enfants. J’ai l’impression de bien savoir différencier vie personnelle et vie professionnelle”.
Relire
En paroisse, le prochain dimanche de la santé n’a pas encore été organisé. L’an dernier, les enfants de la pastorale des personnes handicapées avaient gestué l’Évangile et le sacrement des malades avait été proposé pendant la messe. Une autre fois, des soignants sont venus partager leurs témoignages. Dans les cliniques où elle intervient, Stéphanie distribue les cartes de prière éditées à l’occasion. Pour l’instant, le véritable temps fort de l’année, partagé entre malades, soignants et bénévoles de l’aumônerie reste la messe de Noël, célébrée dans une salle décorée pour la fête. “La célébration de Noël rejoint vraiment les personnes qui ne peuvent pas rentrer chez elles et retrouver leur famille. Les soignants de toutes les confessions aident à transporter les malades. C’est très beau. On installe des guirlandes lumineuses, une crèche. À l’issue de la messe, nous sommes autorisés à partager une brioche et un chocolat chaud dans un esprit de convivialité”, confirme Stéphanie.
Pour renforcer ses équipes, l’aumônier n’hésite pas à lancer des “viens voir” aux mamans de l’école, à ses groupes de copines, etc. Certaines essayent et reviennent trouvant du goût dans ce service d’Église. D’autres ont arrêté, revivant des expériences personnelles plus ou moins douloureuses. Stéphanie ponctue : “L’important est de savoir relire nos visites. C’est un peu comme la rencontre des disciples d’Emmaüs avec Jésus. Il était là et je ne le savais pas. Parfois, on ressort de la chambre et on a l’impression qu’il ne s’est rien passé. On n’a pas forcément parlé ouvertement de Jésus et l’on reste un peu frustré. En relisant la rencontre, on peut se rendre compte que la personne s’est redressée dans son lit. Elle a souri, ou encore, elle a ressenti moins de douleurs. Autant de petites choses qui disent qu’Il était là”.
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