Allocution de Mgr Éric de Moulins-Beaufort, Président de la CEF, à l’occasion de la clôture des États généraux du patrimoine religieux (EGPR)

Mgr Éric de Moulins-Beaufort, Président de la CEF, lors de la clôture des États généraux du patrimoine religieux (EGPR), le 18 novembre 2024

Allocution de Mgr Eric de Moulins-Beaufort, Président de la CEF, à l’occasion de la clôture des États généraux du patrimoine religieux (EGPR), le lundi 18 novembre 2024 à la Conférence des évêques de France (CEF).

Madame la Ministre, Madame la Sénatrice, Monsieur le Sénateur, et vous toutes, Mesdames, vous tous, Messieurs, qui nous faites l’honneur et le plaisir de votre présence aujourd’hui, en ce moment de conclusion des États généraux du patrimoine religieux qu’a organisés et menés notre Conférence des évêques au long de l’année passée,

Vous aurez senti dans la présentation qui vient de nous être faite des conclusions possibles de cette saison d’États généraux que pointait une sorte de fierté. Cette fierté, nous la devons au grand travail accompli par le P. Gautier Mornas qui ne peut malheureusement être avec nous ce soir mais qui se réjouit avec nous de l’heureuse conclusion de cette aventure. Nous la devons encore à celles et ceux, collaboratrices et collaborateurs de la maison et stagiaires, qui ont travaillé avec lui à Mme Bernadette Mélois, responsable de la pastorale liturgique dans notre Conférence et à Mgr Alain Planet, évêque émérite de Carcassonne, qui a accompagné ce travail. Je les remercie, au nom des évêques de France, d’avoir soutenu ce projet au long des mois et de nous en avoir présenté ce soir les conclusions.

Pourquoi cette fierté donc ?

Le rapport des sénateurs Pierre Ouzoulias et Anne Ventalon, que je remercie d’être présents ce soir, remis le 6 juillet 2022 avait demandé un inventaire du patrimoine religieux. Nous l’avons fait. Cela a été un immense travail qui a mobilisé des centaines de personnes à travers la France et par lequel aussi est mis en lumière l’engagement de milliers de personnes pour veiller au patrimoine religieux de leur paroisse, de leur diocèse, de leur département, de leur région. Les résultats de cet inventaire ne se limitent pas à une liste; ils dessinent, comme cela n’avait jamais été fait jusqu’ici, un paysage vivant, mouvant, varié, qui englobe des lieux et des objets assez banals comme des lieux et des objets extraordinaires, des lieux et des objets très connus, repérés, étudiés, admirés, et des lieux et des objets vaguement identifiés, mais qui tous racontent une histoire, non pas tant celle de l’Église catholique en France que celle de la foi chrétienne, de l’investissement personnel qu’elle est et qui ne se laisse pas facilement décrire dans le seul « sentiment religieux » ou dans l’« histoire religieuse ». L’outil existe désormais, et il faut s’en féliciter.

Ce même rapport avait recommandé d’aider les maires dans leur recherche de conseils pour l’entretien, la sauvegarde, la restauration, la sécurité des édifices religieux. Nous l’avons fait aussi. Le guide du mécénat pour le patrimoine religieux qui vous a été remis à l’instant, Madame la Ministre, est une manière adaptée de répondre à cette recommandation et aux besoins des maires. Il a été préparé lors d’une journée consacrée au financement des projets de sauvegarde du patrimoine religieux organisée ici et développée ensuite. Nous espérons que les services de l’État pourront contribuer à la diffusion de guide. Nous espérons aussi qu’une circulaire du Ministère de l’Intérieur pourra préciser, avec la solidité juridique nécessaire, les types de dépenses pouvant être engagées au titre de la conservation et de l’entretien des édifices du culte propriété des communes.

Le rapport, enfin, – je ne retiens que trois préconisations parmi celles qu’il a énoncées -, encourageait à ouvrir le champ des usages compatibles des églises et des autres édifices religieux. Une recension, sans doute non exhaustive mais déjà bien fournie, des réalisations existant déjà, des initiatives prises, des solutions mises en place partout en France pour que les édifices religieux soient utiles aux communes qui les possèdent et qui en assurent le clos et le couvert non seulement par le culte qui y est célébré mais aussi par d’autres usages, notamment culturels. Nous tenons, vous le savez, à la notion d’« activités compatibles avec l’affectation cultuelle »  de préférence à toute autre formulation». Elle a été consacrée par la révision en juillet 2006 du code général de la propriété des personnes publiques, à l’article L2124-31 ; elle assure une base de travail prometteuse. Les conventions-types qui ont été mises à jour et qui pourront être perfectionnées encore devraient permettre un dialogue intéressant entre les paroisses et les communes.

Je voudrais remercier encore toutes les personnes qui ont apporté une contribution aux États généraux du patrimoine religieux. Beaucoup sont parmi nous ce soir ; quelques-unes n’ont pu se libérer pour cet événement. Les très nombreuses auditions réalisées représentent des heures de réflexion tout à fait passionnantes. Tous leurs fruits ne peuvent être recueillis dans des documents ni récoltés à un moment déterminé. Vous nous avez aidés, Mesdames et Messieurs, à mieux comprendre les enjeux de la réflexion en cours, son urgence, ses chances, les perspectives qui pouvaient être données.

La perception par un pays de son patrimoine religieux varie à travers le temps, nous devons en être conscients, nous le sommes mieux que jamais. Les attentes en matière de conservation et d’entretien se précisent et se transforment ; les besoins de sécurité se modifient (en ce moment, ils s’accentuent plutôt) ; les manières de visiter une église ou, tout simplement, d’y entrer, diffèrent entre la ville et la campagne, entre les grandes métropoles et les petites villes, entre quartiers d’une même ville, selon la qualité et l’histoire du bâtiment, selon la vitalité démographique de la commune, selon son inscription sur des routes touristiques ou non, selon l’environnement plus ou moins agréable, plus ou moins accessible, de l’édifice, selon l’activité de la paroisse ou l’audace et la créativité des chrétiens locaux…

Ensemble, Mesdames et Messieurs, vous avez aidé à préciser beaucoup d’aspects de la grande question qui nous occupe ce soir, mais qui surtout occupe beaucoup d’esprits à l’échelle de la France entière : l’avenir du patrimoine religieux en France et les moyens de cet avenir.

La loi de séparation des Églises et de l’État a fixé un cadre clair qui est celui de l’affectation. L’État est propriétaire des cathédrales et les communes des églises construites avant la loi. Les lieux de culte sont affectés au culte exclusivement et intégralement et leur accès est gratuit. Ces deux points établissent que la loi du 9 décembre 1905 a voulu être, nonobstant la confiscation des biens qu’elle a opérée, une loi de liberté, garantissant la liberté de culte et ce que nous appelons désormais la liberté religieuse des citoyens. Tous, nous en sommes fiers au bout du compte. Ce cadre clair et simple permet de réfléchir paisiblement et intelligemment aux défis nouveaux du temps où nous sommes. Il est clair que la situation religieuse mais aussi la situation économique ou sociale de notre pays n’est plus celle de 1905.

D’une part, l’islam et d’autres religions se sont installées dans notre territoire national. Plus exactement, des personnes en France, des citoyens français, participent à d’autres religions que les différentes confessions chrétiennes. Ces confessions d’ailleurs se sont aussi multipliées et diversifiées du fait, notamment des migrations du XXème et du XXIème siècles. Par ailleurs, une grande partie de nos concitoyens se sont détachés de toute religion. Par ailleurs encore, notre pays est devenu une destination touristique majeure et le tourisme une de ses principales ressources.

Permettez-moi, Madame la Ministre, Mesdames et Messieurs, ceci étant posé, de vous proposer quatre récits qui illustrent quelques aspects du vaste sujet qui nous occupe. J’essaierai d’en tirer quelques leçons. Je les tire de mon expérience personnelle, vous m’en excuserez, mais tout évêque pourrait en raconter autant.

Nos églises doivent pouvoir être ouvertes et accessibles à toute personne souhaitant y entrer.

J’ai été à Paris curé de la paroisse Saint-Paul-Saint-Louis, dans le Marais, au métro « Saint-Paul ». Cette paroisse en fait occupe, depuis le concordat, l’église Saint-Louis des Jésuites, l’église Saint-Paul qui remontait au début du Moyen-Age, église paroissiale des rois lorsqu’ils logeaient en l’hôtel Saint-Pol, ayant disparu à la Révolution. Cette église, comme la plupart des églises de Paris, dispose d’un orgue de grande qualité, sur lequel des travaux nombreux ont été menés et de deux organistes titulaires. J’ai découvert, comme curé, le travail de ceux-ci et réalisé que, tous les dimanches, les paroissiens bénéficiaient d’une création musicale, non pas seulement de l’accompagnement de leurs chants, mais d’une création musicale, parfois, souvent extraordinaire, nos organistes étant de très haut niveau. Le patrimoine religieux, c’est aussi cela, il ne faut pas l’oublier : un immense patrimoine musical, un patrimoine vivant, porté par les organistes, les maîtrises, les chorales, les chantres, les musiciens professionnels ou amateurs, jouant de toutes sortes d’instruments, qui soutiennent la prière de l’assemblée. J’ai réalisé aussi, pendant les cinq années où j’ai été curé, que cette église était extrêmement visitée. En fait, ces visiteurs ou ceux et celles qui venaient dans l’église en dehors des messes, la connaissaient mieux que bien des paroissiens qui arrivent à la messe juste à l’heure et en partent dès qu’elle est finie. J’ai compris ainsi que les usagers d’une telle église, située en un tel lieu, n’étaient pas seulement les paroissiens habitants du quartier, mais aussi ceux et celles qui y entraient pour un moment, soit pour en admirer l’architecture, soit pour tenter d’en comprendre rapidement l’histoire, soit pour y prendre un moment de calme, de réflexion, pour y goûter un peu de repos, sortant de l’agitation des trottoirs de la rue Saint-Antoine et peut-être aussi de leurs vies trépidantes. Nos églises doivent pouvoir être ouvertes et accessibles à toute personne souhaitant y entrer.

Devenu archevêque de Reims, le diocèse dont j’ai la charge couvre une partie du département de la Marne et l’intégralité de celui des Ardennes.

Ce dimanche, hier donc, j’ai participé à la cérémonie de réouverture de la collégiale de Braux et j’y ai célébré la messe. Permettez-moi cette liberté : il y a eu là une anticipation modeste mais réelle de ce qui va se passer les 7 et 8 décembre à Notre-Dame de Paris. Peut-être ne connaissez-vous pas tous la collégiale de Braux. Elle a été fondée au IXème siècle par l’archevêque de Reims, Ebbon, connu pour un évangéliaire magnifique conçu dans l’abbaye Saint-Pierre d’Hautvillers, plus célèbre encore pour son cellérier du XVIIIème siècle, un certain Dom Pérignon. Depuis 1967, Braux, Château-Regnault et Levrezy ont été réunies dans l’unique commune de Bogny-sur-Meuse, commune marquée par la désindustrialisation qui fut si forte dans les Ardennes et qui se poursuit en ce moment, avec l’annonce d’une fermeture de plus. La commune a investi des sommes importantes dans la restauration de cette église. La fierté était grande hier de retrouver l’église dans son ancienneté et sa sobre beauté. Le diocèse ne peut plus affecter un prêtre à cette commune, mais un couple, qui a reçu une lettre de mission du diocèse, habite le presbytère et accueille ceux et celles qui s’y présentent ; il contribue à la vie sociale dans la commune par le soutien qu’il apporte à bien des personnes isolées ou douloureuses ou bien par les activités qu’il propose pour les différents âges de la vie. La réouverture de l’église, une des plus anciennes du diocèse, permet à la population de se réapproprier l’histoire de cette partie de la vallée de la Meuse et de s’y sentir davantage chez soi. Les exemples de belles relations entre la commune et la paroisse sont nombreux dans notre pays, heureusement.

Il y a quelques mois, j’ai rencontré, à sa demande, le Maire d’une commune de 140-150 habitants dans l’Argonne. Présentant sa commune, il précise qu’à son arrivée, il y a 40 ans, 90% des habitants avaient une tombe familiale dans le cimetière et qu’aujourd’hui cette proportion est tombée à 10%. Ce village est une relative exception dans les Ardennes : pour différentes raisons, il jouit d’un fort taux de renouvellement et de rajeunissement de sa population. Mais, de toute évidence, la relation des habitants d’aujourd’hui au village ne peut être la même que celle des générations précédentes. Le village étant doté de nombreuses associations et d’initiatives, comme un festival musical, le souhait du Maire est de pouvoir utiliser l’église à des fins culturelles ou pour des réunions d’associations. Il voudrait pouvoir bénéficier d’une convention annuelle, voire pluri-annuelle, pour ne pas avoir à demander à chaque initiative l’accord de l’affectataire, lequel réside aujourd’hui loin et ne répond pas toujours dans les délais espérés. La réflexion en cours montre que se posent très vite des questions de responsabilité et d’assurance, notamment quant au chauffage, assuré dans cette église-là par un système très spécial. Se pose aussi des questions de convenance, quant au respect de l’autel et des autres mobiliers liturgiques présents, et enfin des questions d’acceptabilité par les chrétiens locaux. Le Maire affirme lui-même qu’il ne souhaite pas la désaffectation de l’église, sachant que le nombre des pratiquants a varié et pourrait varier encore. Examiner la possibilité de conventions durables, former des personnes habitant dans les villages à exercer une charge de délégué à l’affectation, sont des pistes qu’il vaudrait la peine de poursuivre davantage. Un cadre général a été fixé, des expériences peuvent avoir lieu localement que nous serons attentifs à suivre et à évaluer, notamment quant à leur solidité au regard de la loi, des règlements et du droit canonique, et aussi quant à leur viabilité dans la durée.

Tout autre contexte. Il y a quelques années, j’ai été invité par un ami chinois connu à Paris à visiter Pékin, Shanghai et quelques autres lieux évidents pour découvrir un peu cet immense pays. A Pékin, on dit plutôt aujourd’hui Beijing, mon ami voulait absolument que je participe au baptême tout à fait clandestin de la fille de son avocat. Dans son bureau donc, un après-midi, nous nous sommes retrouvés avec un prêtre de l’Église dite clandestine, deux paroissiens de ce prêtre qui devaient servir de parrain et de marraine et un jeune ménage d’avocats, ces deux-là habillés à la dernière mode et tous deux membres du Parti communiste. J’ai demandé aux parents pourquoi ils tenaient tellement à ce que leur fille soit baptisée. « Parce que nous avons voyagé à Paris, nous avons visité la cathédrale Notre-Dame, il y avait là un tel silence. Nous voulons que notre fille puisse avoir part à cela. » Peu de Parisiens parleraient de Notre-Dame comme d’un lieu de silence. Récemment, dans un grand journal du soir, un chroniqueur a cru pouvoir écrire tout de go qu’on ne pouvait plus prier à Notre-Dame de Paris en raison des foules de visiteurs. J’ai rencontré moi des personnes qui avaient vécu une expérience forte, qu’ils appelaient une expérience de silence, si forte qu’ils voulaient le baptême pour leur fille, quoi qu’il en soit de leur propre chemin. C’est cela aussi, le patrimoine religieux : non pas seulement ce que nous sommes capables d’en décrire, d’en expliquer, mais ce qui peut s’y passer, ce qui peut advenir grâce à ce qu’il porte ou transporte à travers le temps et depuis le plus intime de chacun jusqu’à la réalisation la plus visible de ce que nous appelons souvent la beauté.

Madame la Ministre, Mesdames et Messieurs, nous ne voulons pas ici nous leurrer. Les défis sont nombreux et difficiles. En certains lieux, les bénévoles sont nombreux, prêts à ouvrir l’église, à la surveiller, à l’entretenir, aptes aussi à prendre soin des objets dans leur diversité. Dans beaucoup d’autres, ces bénévoles, s’ils ont jamais existé, se font rares. Un effort de mobilisation est nécessaire, que les diocèses sont prêts à lancer ou ont déjà lancé. Parfois, les bonnes volontés sont découragées par les exigences des communes en matière de gardiennage ou de protection des objets. Parfois, les maires sont découragés par les exigences des affectataires, ceux-ci étant quelquefois mobilisés par des paroissiens trop bien intentionnés. Le cadre de la loi est solide et clair, mais il n’est pas toujours connu ni compris. Néanmoins, un des défis principaux est celui du financement. L’immense mouvement de générosité qu’a suscité l’incendie de Notre-Dame de Paris a donné à penser et peut-être à rêver. Oui, il serait formidable de pouvoir remettre toutes nos églises et cathédrales, et au passage les temples protestants et bouddhistes, les synagogues et les mosquées dans le même état parfait que nous allons découvrir la cathédrale de Paris dans trois semaines. Mais je voudrais ajouter une réflexion.

Dans la préface du rapport annuel du Secours catholique sur la pauvreté en France, le Président du Secours, M. Didier Duriez, écrit ceci : « La protection sociale est un trésor pour notre société. Elle est le patrimoine de ceux qui n’en ont pas. » Sans aller plus loin sur la voie de notre protection sociale, l’idée du « patrimoine de ceux qui n’en ont pas » me retient. Nos églises de village ou de quartier, nos cathédrales, ont toujours été des lieux ouverts à tous, et en premier lieu aux pauvres, aux personnes blessées par la vie, à ceux et celles qui ont besoin de pleurer, de se reprendre, de trouver un refuge. Les tenir fermées pour éviter des dégradations, en limiter ou en compliquer l’entrée pour des raisons de sécurité, en faire payer l’entrée pour en assurer l’entretien, seraient autant de manières de trahir leur vocation originelle. Dans nos sociétés où tout se surveille et où beaucoup de choses sont accessibles du moment que l’on paie, les églises de France, les cathédrales de France sont une magnifique exception. Elles sont des lieux d’accès libre, intéressante expression, où chacune, chacun peut entrer, d’où chacune, chacun peut sortir, où personne n’a un droit acquis par un paiement à recevoir telle prestation. Elles sont, encore le plus souvent, des lieux où une communauté vivante accepte volontiers que des visiteurs viennent profiter de ce qu’elle a reçu. Non pas de lieux vides, non pas des lieux fait pour le délassement ou la culture des visiteurs, mais des lieux habités, où le même culte se célèbre pour lequel elles ont été construites, et dont les occupants premiers ne veulent pas se réserver l’exclusivité.

Le besoin de financement de l’entretien des églises et des cathédrales et de bien d’autres lieux ou objets relevant du patrimoine religieux est immense. Ici, nous en sommes très conscients, Madame la Ministre, Madame la Sénatrice, Monsieur le Sénateur, Mesdames et Messieurs, nous sommes prêts à réfléchir à des idées variées. Nous avons été heureusement surpris par l’initiative du Président de la République, le 15 septembre 2023, à Semur-en-Auxois, d’une collecte nationale en faveur du patrimoine religieux des communes de moins de 10 000 habitants. Elle n’a pas donné les résultats espérés et sans doute doit-elle être relancée sur d’autres bases. Elle ne résoudra sans doute pas tout. Le tourisme de masse a transformé considérablement, ces dernières années, les conditions même de conservation de tout patrimoine architectural ou objet patrimonial. Ainsi en va-t-il dans le cours économiquement libéral de notre monde. Permettez-moi de former le vœu cependant, que nos églises et nos cathédrales soient préservées de la marchandisation croissante que l’on constate des lieux de culture et de la pente fatale qui transforme la découverte de leur signification si riche, si pleine et l’effort que cette découverte exige en une animation qui diffuse les messages que le public est censé pouvoir recevoir. Le modèle économique qui nous gouverne, dans lequel nous vivons, possède des limites, il ne respecte pas tout de ce que l’humanité porte. Il est bon que ces limites soient manifestées. Le patrimoine religieux a vocation à rendre ce service-là. Sans doute, tenir que ce patrimoine échappe aux lois économiques est coûteux pour la collectivité, mais une telle attitude, celle de notre pays pour le moment, est prometteuse pour son avenir, si celui-ci doit être encore plus fraternel.

Madame la Ministre, en vous partageant ces réflexions, je voudrais vous remercier de votre présence. Elle récompense celles et ceux qui ont travaillé à ces États généraux ou qui y ont donné une part de leur énergie. Elle nous encourage ici, en cette Conférence des évêques, à poursuivre le travail et à appeler de nombreuses personnes à s’engager encore. Mesdames et Messieurs, en vous exprimant ma gratitude et celle des évêques de France, je vous remercie de votre attention. En votre nom, je remercie Madame Rachida Dati, Ministre de la Culture, pour ce qu’elle voudra bien nous dire maintenant.

Mgr Eric de Moulins-Beaufort, archevêque de Reims, Président de la CEF

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