Le Vendredi saint, l’Eglise nous fait suivre le Christ pas à pas dans le combat qu’il a accepté de vivre pour nous racheter de nos péchés. A Paris, depuis 1988, escortée par les chevaliers de Malte, la Croix de l’église Saint-Pierre de Chaillot emprunte la plus belle avenue du monde. Le 22 avril 2011, c’est Mgr Bernard Podvin, Porte-parole des évêques de France, qui assure la prédication du Chemin de Croix.
PREMIÈRE STATION – Jésus est condamné à mort
Jean 19 – 5 – Jésus vint alors à l’extérieur : il portait la couronne d’épines et le manteau de pourpre. Pilate leur dit : « Voici l’homme ! » Mais dès que les grands prêtres et leurs gens le virent, ils se mirent à crier : « Crucifie-le ! Crucifie-le ! ».
Commentaire
Nous avons quitté nos activités du jour. Nous formons un singulier attroupement. Ce n’est pas une star qui nous mobilise. Ce n’est pas un phénomène de rue sensationnel. Une croix nous réunit. Un condamné à mort, peut-être passé inaperçu pour beaucoup de ses contemporains ! « Voici l’homme ». Tel fut le cri de Pilate : « Voici l’homme ».
Tel fut le cri de Jean-Paul II à l’UNESCO, il y a une trentaine d’années.
Comment est-ce possible ? Toute l’humanité signifiée par le Nazaréen ? Quel était donc son secret pour rayonner sur la multitude. ? N’était-il pas le fils du charpentier, lâché par ses disciples ? Le voici entre les mains de Pilate. Le gouverneur ne sait que faire de cette « royauté » qui le dépasse. Elle n’est pas de ce monde. Le pourpre du manteau est couleur du don sans retour. Voici le sang versé. La couronne d’épines est royauté du serviteur. Voici le corps livré. Benoît XVI nous interroge : « Dans le récit de la Passion du Seigneur, il y a une alternative provocante au point culminant du procès. Le choix entre Jésus et Barabbas n’est pas fortuit. Deux formes du messianisme se posent. Le choix est entre quelqu’un qui prônait la liberté à la tête d’un combat, et ce mystérieux Jésus qui proclame de se perdre soi-même pour trouver le chemin vers la vie. Faut-il s’étonner que les foules aient préféré Barabbas ? Si nous devions choisir aujourd’hui, Jésus de Nazareth, le fils de Marie, le fils du Père, aurait-il une chance ? Mais connaissons-nous vraiment Jésus ? Le comprenons-nous ? Ne devons-nous pas chercher à le connaître de manière complètement nouvelle, hier comme aujourd’hui ? » Frères et Sœurs, vivons ce chemin de croix 2011 en faisant le choix de Jésus !
DEUXIÈME STATION – Jésus est chargé de sa croix
Jean 19 – 17 – Ils se saisirent donc de Jésus. Portant lui-même sa croix, Jésus sortit et gagna le lieu dit du Crâne, qu’en hébreu on nomme Golgotha.
Commentaire
Le Fils de l’homme est chargé de sa croix. Chaque année, l’Eglise fait mémoire de ce signe qui renverse tous nos schémas. Ne sommes-nous pas, ce midi, en train d’arpenter la plus prestigieuse avenue du monde ? Ne préférerions-nous pas être disciples d’un Dieu glorieux? Avons-nous entendu la précision de Saint Jean ? « Il porte lui-même sa croix ». Le Christ ne fera pas économie du
pèlerinage ultime. Notre Dieu ne nous aime pas par substitution. C’est Lui, le crucifié. Comme le dit l’
apôtre, nous devons fixer nos yeux sur Lui. La croix, nul ne la reçoit à sa place, mais chaque personne éprouvée ressentira à quel point Jésus porte sa croix en elle, avec elle et pour elle. Le Christ prend le chemin de sa passion. Ne soyons pas spectateurs distants. Ne soyons pas voyeurs de la souffrance. Prenons la route. Parcourons-la ensemble. Nous avons tant besoin les uns des autres.
Prière
Prions avec Newman, récemment béatifié par Benoît XVI :
« Seigneur Jésus, Inonde-moi de Ton Esprit et de Ta vie. Prends possession de tout mon être pour que ma vie ne soit qu’un reflet de la Tienne. Rayonne à travers moi, habite en moi, et tous ceux que je rencontrerai pourront sentir Ta présence auprès de moi. En me regardant, ils ne verront plus que Toi seul, Seigneur ! Demeure en moi et alors je pourrai, comme Toi, rayonner, au point d’être à mon tour une lumière pour les autres. Lumière, Seigneur, qui émanera complètement de Toi. C’est Toi qui, à travers moi, illumineras les autres. Ainsi, ma vie deviendra une louange à Ta gloire, la louange que tu préfères, en Te faisant rayonner sur ceux qui nous entourent. Par la plénitude éclatante de l’amour que Te porte mon cœur. Amen »
Prière
Seigneur Jésus, ils se sont saisis de toi comme d’une proie. Mais c’est Toi qui veux nous saisir d’une liberté sans égal. Tu es chargé du fardeau aussi injuste que dérisoire. Nous te regardons sans comprendre. Le
mystère de ton amour nous tire pourtant en avant. Nous marchons à tâtons. Mais, par ta croix, nous allons découvrir que nous sommes créés par un amour plus grand que nous. Bénis sois-tu, ô notre roi, pour les siècles des siècles.
TROISIÈME STATION – Jésus tombe pour la première fois
Luc 23 – 4 – Pilate dit aux grands prêtres et aux foules : « Je ne trouve rien qui mérite condamnation en cet homme. »
Commentaires
Dans la
Bible, les choses importantes se disent trois fois. Comme pour accentuer l’immensité de la grâce ou la démesure de la peine. Dieu trois fois Saint. La foule n’a-t-elle pas ovationné Jésus, il y a quelques jours, par un triple Hosanna ! Pourquoi ce retournement ? N’était-il pas béni celui qui vient au nom du Seigneur ? Le gouverneur romain devrait signer son acte de condamnation. Que Jésus nous prenne en pitié trois fois. Dieu
trinité. Au nom du Père, du Fils, du Saint Esprit. Le signe de la croix confié à notre Eglise. Comme le disait le
Cardinal Lustiger, « cette
Trinité, au nom de laquelle nous avons été baptisés, ce geste qui est le vêtement du chrétien, le signe de la croix, la manière la plus simple de prier ». Trois fois Jésus va tomber. Ecoutons en résonance trois fois Pilate nous dire qu’il est « incapable » de déclarer Jésus coupable.
Prière
Prions avec les pèlerins du
Rosaire 2010: «
Le poids de la croix est trop lourd, Seigneur, comme la violence des hommes. Ne permets pas que nos cœurs se troublent. Rassure nous dans notre nuit. En te voyant ployer sous ce fardeau, donne-nous de nous renouveler dans la béatitude des artisans de paix, et de trouver les voies pour soulager toute souffrance quelle qu’elle soit. »
QUATRIÈME STATION – Jésus rencontre sa mère
Jean 19 – 25 à 27 – Près de la croix de Jésus se tenaient debout sa mère, la soeur de sa mère, Marie, femme de Clopas et Marie de Magdala. Voyant ainsi sa mère et près d’elle le disciple qu’il aimait, Jésus dit à sa mère : « Femme, voici ton fils. » Il dit ensuite au disciple : « Voici ta mère. « Et depuis cette heure-là, le disciple la prit chez lui.
Commentaire
Ultime volonté de Jésus. Testament émouvant. Comme le dit Benoît XVI « presque un acte d’adoption. Il est le Fils unique de sa mère qui, après sa mort, resterait seul au monde. Voici qu’il place à ses côtés le
disciple bien aimé, faisant de lui pour ainsi dire un fils à sa place, et à partir de ce moment, celui-ci devient responsable d’elle. La traduction littérale est forte. Jean accueillit Marie dans son milieu de vie intime. Le rédempteur est pourtant sur le point de mourir. Il pourrait se replier sur sa douleur. Il ne laisse pas sa mère seule. Il la confie à la sollicitude du
disciple qui lui est très proche. De cette manière aussi, le
disciple reçoit un nouveau foyer : la mère qui prend soin de lui et dont lui-même prend soin ».
Prière
Salut, ô Reine, mère de
miséricorde, notre vie, notre douceur et notre
espérance, salut! Enfants d’Ève, exilés, nous crions vers vous; vers vous nous soupirons, gémissant et pleurant dans cette vallée de larmes. Ô vous, notre avocate, tournez vers nous votre regard miséricordieux. Et, après cet exil, montrez-nous Jésus, le fruit béni de vos entrailles. Ô clémente, ô miséricordieuse, ô douce Vierge Marie.
CINQUIÈME STATION – Simon de Cyrène aide Jésus à porter sa croix
Luc 23 – 26 – Comme ils l’emmenaient, ils prirent un certain Simon de Cyrène qui venait de la campagne, et ils le chargèrent de la croix pour la porter derrière Jésus.
commentaire
La porter derrière Jésus ! Nous avons bien entendu. Simon de Cyrène, dans sa bienveillance, soutient le Seigneur dans son épreuve, mais il ne le devance pas. C’est le Christ qui est Tête du corps. Nous marchons à sa suite. Il monte vers le Golgotha. Simon de Cyrène nous représente, si l’on peut parler ainsi. Dieu, dans son humanité, ne fait pas économie du poids de la Croix. L’homme la porte humblement avec Lui, mais Jésus de Nazareth est le crucifié livré pour la multitude. Serons-nous, aujourd’hui, pour nos frères, des Simon de Cyrène ? N’aurions-nous pas tendance à fuir l’appel à la fraternité qui se reflète douloureusement sur le visage de nos contemporains ? Ne restons pas égoïstement dans notre pré carré. Le Seigneur passe devant nous. L’avons-nous reconnu ?
Prière
Seigneur, accorde nous la force et l’humilité de nous unir à l’épuisement de ta souffrance. Préserve-nous de devenir comptable de l’aide que nous devrions apporter à ceux que nous croisons. Tu as consenti à porter les faiblesses qui ne sont pas les tiennes. Quand nos frères fléchissent, donne-nous d’être dans la foi, à leur côté. Fais se lever, Seigneur, les Simon de Cyrène attendus par notre humanité blessée.
SIXIÈME STATION – Véronique essuie le visage de Jésus
Matthieu 26 – 11 à 13 – Des pauvres, en effet, vous en avez toujours avec vous ; mais moi, vous ne m’avez pas pour toujours. En répandant ce parfum sur mon corps, elle a préparé mon ensevelissement. En vérité, je vous le déclare : partout où sera proclamé cet Evangile dans le monde entier, on racontera aussi, en souvenir d’elle, ce qu’elle a fait. »
Commentaire
Véronique a essuyé la Sainte Face du Seigneur sur le chemin de la Croix. Qui est-elle donc, cette femme courageuse, pleine de compassion envers notre Rédempteur ? Nous l’avons appelée Véronique ! Ieros Ikon, ce qui veut dire image sacrée. Ainsi donc se nomment, pour les siècles des siècles, toutes celles qui compatissent, qui essuient aujourd’hui encore le visage tuméfié des victimes du mal. Serons-nous des « Véronique » pour nos frères ? « Tu devins ce que tu regardais », écrivit Jean-Paul II dans sa poésie.
Prière
Seigneur Jésus, ton visage est meurtri et défiguré par notre lâcheté ! Comment se fait-il que toi, le plus beau des enfants des hommes, tu deviennes le juste souffrant ? Serait-ce, en ce moment crucial, que la beauté de ton amour devient éclatante ? Le
prophète Isaïe avait peint ton portrait, bien des siècles avant ta venue. Les témoins de ton amour donnent le baiser aux lépreux sans répugnance. Véronique a bravé la cohorte qui se moquait de toi. Elle a gardé, pour toujours, la trace de ton visage parmi nous. « Je cherche le visage, le visage du Seigneur. Je cherche son image, tout au fond de vos cœurs ».
SEPTIÈME STATION – Jésus tombe une deuxième fois
Luc 23 – 13 et 14 – Pilate alors convoqua les grands prêtres, les chefs et le peuple et il leur dit : « Vous m’avez amené cet homme-ci comme détournant le peuple du droit chemin ; or, moi qui ai procédé devant vous à l’interrogatoire, je n’ai rien trouvé en cet homme qui mérite condamnation parmi les faits dont vous l’accusez ».
Commentaire
Jésus de Nazareth parcourait les villes et les villages, faisant le bien. Il guérissait les malades, il délivrait les pécheurs de tout mal. Il prêchait la paix, les béatitudes. N’était-il pas tout à tous ? Littéralement mangé par la foule ? Voici qu’on lui reproche d’avoir détourné le peuple du droit chemin. Même Pilate est rempli de perplexité. Sa juridiction ne peut comprendre qui est Jésus en vérité. Pour la seconde fois, il n’a rien trouvé de condamnable, en cet homme. Il est le préfet du droit romain, le garant de la paix de l’Empire. Il a devant lui le Prince de la paix. Pour la seconde fois, Jésus chancelle. Elle est pesante cette injustice ! Ils sont devenus insupportables, les ricanements du prétoire et de la foule… Le Seigneur ploie sous le joug de la haine. On stigmatise le Bien aimé.
Prière
Seigneur Jésus, tandis que tu te trouves écrasé par le bois de ta croix, tu portes silencieusement la douleur des hommes. Tu le sais mieux que quiconque, on ne court pas après la croix. Mais quand la croix se profile en nous, on est terriblement seul à l’assumer. Viens en aide à tous ceux qui tombent aujourd’hui, dans le dur combat de l’existence. Donne-nous de communier à leur dignité qui aspire à se relever.
HUITIÈME STATION – Jésus console les femmes de Jérusalem
Luc 23 – 27 à 32 – Jésus était suivi d’une grande multitude du peuple, entre autres de femmes qui se frappaient la poitrine et se lamentaient sur lui. Jésus se tourna vers elles et leur dit : « Filles de Jérusalem, ne pleurez pas sur moi, mais pleurez sur vous-mêmes et sur vos enfants. Car voici venir des jours où l’on dira : « Heureuses les femmes stériles et celles qui n’ont pas enfanté ni allaité ». Alors on se mettra à dire aux montagnes : « Tombez sur nous » et aux collines : « Cachez-nous ». Car si l’on traite ainsi l’arbre vert, qu’en sera-t-il de l’arbre sec ? » On en conduisait aussi d’autres, deux malfaiteurs, pour les exécuter avec lui.
Commentaire
Il y a sur le chemin du Golgotha ceux qui ricanent. Mais il y a aussi, et surtout, celles qui pleurent. Leur cœur saigne devant la plus injuste des condamnations. Leurs larmes sont évidemment en faveur de la victime. Mais ne retombent-elles pas, aujourd’hui encore, sur chacun de nous ? Lamentations qui traduisent l’impuissance devant la dureté du procès infligé au Fils de l’homme. Savons-nous encore pleurer aujourd’hui ? Savons-nous encore nous frapper la poitrine ? Le Seigneur pourtant nous dit : « Ne pleurez pas sur moi, Filles de Jérusalem, pleurez plutôt sur vous-même et vos enfants ». Le
disciple du Christ pleure avec celui qui pleure, et se réjouit avec celui qui est dans la joie.
Prière
Seigneur Jésus, notre cœur connaît souvent le phénomène du balancier. Ou bien nous nous figeons dans l’insensible dureté, ou bien nous nous perdons dans une affection superficielle. Nous ne voyons pas avec justesse les raisons de pleurer. Tu es le Saint. On te bafoue. Notre cœur est saisi d’effroi. L’émotion nous gagne. Nous n’avons plus que nos yeux pour pleurer tandis que tu fais l’offrande de ta vie. Le matin de Pâques, nous pleurerons de joie. Toi le vivant, convertis en profondeur nos émotions et nos sentiments envers nos frères.
NEUVIÈME STATION – Jésus tombe pour la troisième fois
Luc 23 – 22 à 23 – Pour la troisième fois, Pilate leur dit : « Quel mal a donc fait cet homme ? Je n’ai rien trouvé en lui qui mérite la mort. Je vais donc lui infliger un châtiment et le relâcher ». Mais eux insistaient à grands cris, demandant qu’il fût crucifié, et leurs clameurs allaient croissant.
Commentaire
Pour la troisième fois Pilate est désemparé. En vérité, il n’y a rien de répréhensible en ce Galiléen. Il est prédicateur et artisan de l’amour. Pourquoi cet acharnement contre lui ? Le gouverneur est un homme pragmatique. En conscience, il ne saurait condamner Jésus, mais il ne peut perdre la face. Il marchande, de façon dérisoire. Il infligerait un châtiment à Jésus pour juguler la haine ? Rien n’y fait. Cette demi mesure est celle de la lâcheté. La foule crie davantage encore. Ils ne savent ce qu’ils font, mais Pilate va céder pour une tranquillité politique. Pour la troisième fois, Jésus est à terre. La terre… lieu de l’humilité. Qu’il nous est difficile de plier le genou pour reconnaître le terrible poids de notre orgueil. Charles Péguy ne parlait-il pas « du bel agenouillement de l’homme libre » ? Ici, Jésus est de tout son long sur le sol. Sa divinité est plus retentissante encore. Il consent à être celui que l’incompréhension écrase.
Prière
Seigneur Jésus, tu tombes à nouveau sous le poids du pêché de l’homme. Comment as-tu supporté cette humiliation ? Jusqu’où iront les fils des hommes dans l’insulte à ta gloire ? Est-il possible que ton dépouillement soit la voie royale ? Honneur et gloire à toi. De notre cœur monte la triple invocation : « Seigneur prends pitié, Ô Christ prends pitié, Seigneur prends pitié ».
DIXIÈME STATION – Jésus est dépouillé de ses vêtements
Matthieu 27 – 27 à 31 – Alors les soldats du gouverneur, emmenant Jésus dans le prétoire, rassemblèrent autour de lui toute la cohorte. Ils le dévêtirent et lui mirent un manteau écarlate ; avec des épines, ils tressèrent une couronne qu’ils lui mirent sur la tête, ainsi qu’un roseau dans la main droite ; s’agenouillant devant lui, ils se moquèrent de lui en disant : « Salut, roi des Juifs ! » Ils crachèrent sur lui, et prenant le roseau, ils le frappaient à la tête. Après s’être moqués de lui, ils lui enlevèrent le manteau et lui remirent ses vêtements. Puis ils l’emmenèrent pour le crucifier.
Commentaire
Notre Seigneur est porté en dérision. Comment ne pas penser, ce soir, à nos frères d’Orient persécutés parce qu’ils vivent de l’
Evangile. Comment ne pas penser à tous ceux qu’on intimide, chez nous, par des moqueries au simple motif de leur éthique et de leur foi ? Aujourd’hui, encore, il en coûte de croire, d’espérer et d’aimer. Le
disciple n’est pas au dessus du maître. Heureux sont-ils, les persécutés, car le Royaume des Cieux est à eux. Heureux sont-ils, les miséricordieux, ils obtiendront le pardon du Seigneur. Celui qui ne renonce pas à lui-même ne peut être ami du Christ.
Prière
Soyons en union avec le psalmiste qui dit au psaume 68 : « C’est pour toi que j’endure l’insulte. Que la honte me couvre le visage. Je suis un étranger pour mes frères, un inconnu pour les fils de ma mère. Si je revêts un habit de pénitence, je deviens la fable des gens. Moi je te prie, Seigneur, c’est l’heure de ta grâce. Dans ton grand amour, réponds moi. Par ta vérité, sauve moi. Réponds moi, Seigneur, car il est bon ton amour. Dans ta grande tendresse regarde moi. Quand j’avais soif, ils m’ont donné du vinaigre. »
ONZIÈME STATION – Jésus est cloué sur la croix
Luc 23 – Verset 33 à 35 – Arrivé au lieu dit « le Crâne », ils y crucifièrent Jésus ainsi que les deux malfaiteurs, l’un à droite, et l’autre à gauche. Jésus disait : « Père, pardonne leur car ils ne savent pas ce qu’ils font ». Et pour partager ses vêtements, ils tirèrent au sort. Le peuple restait là à regarder ; les chefs, eux, ricanaient ; ils disaient : « Il en a sauvé d’autres. Qu’il se sauve lui-même s’il est le Messie de Dieu, l’Elu ! »
Commentaire
Savez-vous que les artistes chrétiens n’ont pas osé représenter Jésus crucifié avant le cinquième siècle, car la croix était un gibet d’infamie ? Mais le signe de la croix, lui, est attesté dès le deuxième siècle. Il est un acte de foi. Il affirme que notre salut vient de la passion du Seigneur sur ce bois, arbre de vie. Notre Seigneur achève son
pèlerinage sur la terre entre deux malfaiteurs. Nous serions-nous trompés ? Comment un crucifié peut-il être, en sa personne, le salut du genre humain ? Ecoutons Romano Guardini : « Vous faites le signe de la Croix ? Faites le bien. Pas de manière hâtive qui n’ait aucun sens. Un signe de croix, un vrai, lent, large, du front à la poitrine, d’une épaule à l’autre. Sentez-vous comme ce geste vous enveloppe ? Recueillez-vous. Rassemblez dans ce signe toutes vos pensées, tout votre cœur. Vous sentirez combien il vous saisit, et vous sanctifie. »
Prière
Seigneur Jésus, te voici sur le gibet de l’indignité. Toi l’innocent, l’agneau sans tache. Ta puissance se manifeste dans la détresse. Tu es le fils bien aimé. Tout l’amour du Père est en toi. Toi qui te conduis parfaitement, ta croix transfigure nos croix. Elle est le signe de l’amour. Sur elle, tu sauves l’humanité. Par elle, tu sanctifies tous les hommes jusqu’au plus profond de leur être. Notre foi chrétienne trouve, dans ta croix, le signe du ralliement. Voici le bois qui a porté le salut du monde !
DOUZIÈME STATION – Jésus meurt sur la croix
Luc 23 – 44 à 49 – C’était déjà presque midi et il y eut des ténèbres sur toute la terre jusqu’à trois heures, le soleil ayant disparu. Alors le voile du sanctuaire se déchira par le milieu ; Jésus poussa un grand cri ; il dit : « Père, entre tes mains je remets mon esprit ». Et, sur ces mots, il expira. Voyant ce qui s’était passé, le centurion rendait gloire à Dieu en disant : « Sûrement, cet homme était juste. » Et tous les gens qui s’étaient rassemblés pour ce spectacle, à la vue de ce qui s’était passé, s’en retournaient en se frappant la poitrine. Tous ses familiers se tenaient à distance, ainsi que les femmes qui le suivaient depuis la Galilée, et qui regardaient.
Commentaire
Le voile se déchire. Tout est accompli. Jésus s’abandonne au Père. Tout en lui pourrait refuser ce calice. Il s’en remet à Celui qui l’a envoyé. Sa mort est un échec, à vue humaine. Elle est pourtant d’un éclat qui bouleverse le centurion. Le cosmos lui-même est en deuil. C’est la ténèbre. Il est digne, le Christ et Seigneur, de prendre le Livre et d’en ouvrir les sceaux. Car il fût immolé, rachetant pour Dieu, au prix de son sang, toute l’humanité. Il a fait de nous, pour notre Dieu, un Royaume et des prêtres, et nous règnerons sur la terre. Il est digne, l’agneau immolé, de recevoir puissance et richesse, sagesse et force, honneur, gloire et louange. On a assassiné l’amour. L’amour n’est pas aimé. Comme le dit Benoît XVI : « L’accomplissement extrême de l’amour est maintenant atteint ».
Prière
Le Seigneur Jésus vient de remettre son esprit. Nous nous recueillons EN SILENCE. Nous intégrons, en nos cœurs et nos esprits, la rumeur de la ville. Nous habitons ce temps dans la communion. Nous pouvons, si nous le voulons, nous agenouiller là où nous nous trouvons.
TREIZIÈME STATION – Jésus est descendu de la croix
Luc 23 – 50 à 53 – Alors survint un homme du nom de Joseph, membre du conseil, homme bon et juste : il n’avait donné son accord ni à leur dessein, ni à leurs actes. Originaire d’Arimathie, ville juive, il attendait le Règne de Dieu. Cet homme alla trouver Pilate et demanda le corps de Jésus. Il le descendit de la croix, l’enveloppa d’un linceul et le déposa dans une tombe taillée dans le roc où personne encore n’avait été mis
Commentaires
Combien sont-ils les Joseph d’Arimathie qui, au fond d’eux-mêmes, ne désiraient pas cette violence envers Jésus ? Combien sont-ils les Joseph d’Arimathie qui recueillent le Saint corps du Seigneur ? Les romains laissaient leurs condamnés être la proie des vautours. Le judéo christianisme a le souci de l’ensevelissement. Il faut que la sépulture de Jésus soit digne. Prendre soin du corps de Jésus, aujourd’hui comme hier ? Dans nos hôpitaux, dans les régions en guerre, en tous lieux de la planète frappée de séismes. Vénérer le corps souffrant ! Aimer Jésus dans les plus pauvres. Prendre soin de l’Eglise, petit troupeau. Croire que l’Eglise est belle quand elle montre Jésus. Vouloir que le Corps du Christ soit notre unique
sacrement.
Prière
Ô vous tous que brise la souffrance
Et qu’abandonne l’espérance,
Regardez cet homme en croix.
C’est à vous qu’il tend les bras.
Ô vous tous que nargue l’insolence
Vous les petits sans importance,
Regardez cet homme en croix.
En sa mort renaît le droit.
Ô vous tous qu’habite l’impatience
D’un libre cours pour vos vengeances,
Regardez cet homme en croix.
Sous l’injure, il est sans voix.
Ô vous tous que frappe la sentence
Qui persécute vos croyances,
Regardez cet homme en croix.
Son exemple dit la foi.
Ô croix de Jésus, toi qui as levé au centre de l’histoire la révélation de l’amour, sublime croix dont le fruit fait revivre, tu es notre unique espérance ! Tes bras nous donnent le Corps qui nous tient en sa grâce.
QUATORZIÈME STATION – Le corps de Jésus est mis au tombeau
Jean 19 – 40 à 42 – Ils prirent donc le corps de Jésus et l’entourèrent de bandelettes, avec des aromates, suivant la manière d’ensevelir des Juifs. A l’endroit où Jésus avait été crucifié il y avait un jardin, et dans ce jardin un tombeau tout neuf où jamais personne n’avait été déposé. En raison de la Préparation des Juifs, et comme ce tombeau était proche, c’est là qu’ils déposèrent Jésus.
Commentaire
Un tombeau où personne encore n’a été mis ! Comme pour nous dire que la mort de Jésus n’aura pas le dernier mot. Déjà, le dimanche des
Rameaux, Jésus s’était servi d’un âne sur lequel personne encore n’était monté. Quelque chose d’inédit va survenir. Le sépulcre est neuf.
Le tombeau est habité par la puissance d’aimer. La longue nuit du samedi Saint ne sera pas sans aurore. Le cimetière est lieu de dormition. Lieu de l’attente. Jésus va se lever. Son Père n’abandonnera pas Celui qui a aimé les siens jusqu’au bout. La
résurrection des corps nous est promise.
Prière
Prions avec les mots de Thérèse d’Avila :
« Que voulez-vous de moi, Seigneur ?
Je suis vôtre, puisque vous m’avez créée ;
vôtre, puisque vous m’avez rachetée ;
vôtre, puisque vous me supportez ;
vôtre, puisque vous m’avez appelée ;
vôtre, puisque je ne me suis pas perdue (…)
Que voulez-vous faire de moi ?
Que je sois comme Job dans la douleur,
ou que je repose comme Jean sur votre cœur ;
que je sois une vigne abondante,
ou stérile, qu’importe ?
Si j’accomplis votre volonté,
que voulez-vous faire de moi ?
Que je sois comme Joseph jeté dans les fers,
ou comme lui l’intendant de l’Egypte ;
que je sois comme David dans les épreuves,
ou comme lui au comble de la gloire ;
que je sois comme Jonas
englouti dans les flots,
ou comme lui rejeté sur le rivage,
que demandez-vous de moi ? (…)
Je suis vôtre ; pour vous je suis née ;
que voulez-vous faire de moi ? »
Rentrons en nous-mêmes dans la grande attente de la Lumière pascale.