Bienheureux Père Marie-Eugène de l’Enfant-Jésus
Le Père Marie-Eugène de l’Enfant-Jésus (1894-1967), carme déchaux, fondateur de l’Institut séculier Notre-Dame de Vie sera béatifié le 19 novembre 2016, à Avignon. Témoignages de Mgr Jean-Pierre Cattenoz, Mgr Renauld de Dinechin, Mgr Pierre d’Ornellas et Mgr Jacques Blaquart. Par Florence de Maistre.
« Une véritable révolution copernicienne ! »
Mgr Jean-Pierre Cattenoz, archevêque d’Avignon
« Quand le Bon Dieu décide de faire des bienheureux et des saints, il les met tout simplement sur le balcon du paradis pour les donner en modèle », disait le P. Marie-Eugène de l’Enfant-Jésus. On sent bien que c’est le moment maintenant de le donner en modèle à l’Église d’aujourd’hui. En conduisant à son terme la réforme thérésienne, en permettant aux gens de vivre la grâce du Carmel en dehors des monastères, en proposant cette vie d’oraison dans l’ordinaire du monde, il a réalisé une véritable révolution copernicienne. Tout à coup, la priorité n’est plus le travail ni la famille, mais la vie d’union à Dieu ! Il veut nous aider à vivre cette même révolution : trouver du temps pour Dieu dans nos activités quotidiennes. Son enseignement ? Contemplation et action bien unies. Sa grâce a été de se laisser conduire toute sa vie par l’Esprit Saint, qui est pour lui le maître d’œuvre de la construction spirituelle de chacun et de l’Église. Sa béatification rappelle que la foi chrétienne n’est pas une loi ou des commandements, mais d’abord une vie unie au Christ, habitée par l’Esprit Saint. Une réalité fondamentale pour la vie des prêtres et des communautés chrétiennes aujourd’hui !
« Un guide pour entrer dans l’aventure intérieure »
Mgr Renauld de Dinechin, évêque de Soissons
J’ai découvert les enseignements du P. Marie-Eugène avant de découvrir sa personnalité humaine. Il est doué d’un grand nombre de qualités humaines : venu d’une famille pauvre de l’Aveyron, il est un intellectuel, un religieux carme passionné, un organisateur et même un leader, un prédicateur mais par-dessous tout, un père. Quand j’ai découvert l’homme, le prêtre surtout, j’ai été frappé que cet homme d’action ait misé toute sa vie sur la contemplation. C’était son appel premier. Son action n’est que le débordement de sa contemplation. De son enseignement, je retiens d’abord une extraordinaire capacité à vulgariser la doctrine des maîtres du Carmel, spécialement Thérèse d’Avila, Jean de la Croix et Thérèse de Lisieux. Soixante ans après sa parution, son livre majeur « Je veux voir Dieu » est encore utilisé dans de nombreux noviciats. Il rejoint aussi des lecteurs d’âge varié vivant dans le monde. Mais d’autres livres plus modestes permettent une première approche. Sur le fond, son enseignement permet au chercheur de Dieu de frayer le chemin de son cœur. C’est un guide assuré pour entrer dans l’aventure intérieure. Le P. Marie-Eugène donne les clés pour oser accueillir la présence du Dieu vivant en soi.
« Témoin de Dieu, épris de son absolu et de sa vie infinie »
Mgr Pierre d’Ornellas, archevêque de Rennes
Je n’ai jamais connu le P. Marie-Eugène. En 1972, la première fois que j’ai entendu sa voix grâce à un enregistrement, j’ai perçu une forte personnalité toute imprégnée de Dieu et de son mystère. Plus tard, j’ai compris que j’avais rencontré un prophète. Vigoureux dans ses affirmations, il parlait en témoin de Dieu, épris de son absolu et de sa vie infinie. Sa joie m’a surpris. Comme le prophète Élie, il m’est apparu brûlant de zèle pour Lui, désireux de le révéler à tous en un monde qu’il percevait de plus en plus marqué par l’athéisme ambiant. Il sut d’expérience que Dieu est amour, que sa miséricorde est inépuisable. Il ne cessa pas de le proclamer pour appeler à la confiance et à l’espérance à cause de Dieu. Il eut la hantise de la catéchèse pour que Dieu soit connu et aimé. Il m’a permis de découvrir le génie de sainte Thérèse de Lisieux. Il m’a appris à prier avec Jésus et à persévérer dans la prière pour Dieu et pour croître dans l’amour. Son regard sur Jésus me donne l’impression d’une immense amitié avec lui. J’ai toujours été émerveillé de son amour de l’Église. Il la voyait dans toute son ampleur, selon le dessein de Dieu. Il exulta en lisant les textes du concile Vatican II. Grâce à lui, je comprends que mon ministère d’évêque est de conduire à Dieu, d’ouvrir les chemins de la sainteté à tous. Seuls les saints ont un amour engagé, lucide et véritable pour le monde, un amour qui les fait souffrir à cause du monde et pour lui. Grâce à lui, je reçois avec enthousiasme le testament public de Jean-Paul II pour le troisième millénaire : « Je n’hésite pas à dire que la perspective dans laquelle doit se placer tout le cheminement pastoral est celle de la sainteté. » (Lettre du 6 janvier 2001)
« Un géant de sainteté ! »
Mgr Jacques Blaquart, évêque d’Orléans
Le P. Marie-Eugène de l’Enfant-Jésus est d’abord une belle figure humaine : c’est un roc ! Il a cette solidité humaine qui lui vient de son Aveyron natal. Il s’est nourri de tout ce qui était en train de naître dans le monde et je reste frappé par son ouverture, son attention aux besoins de ses contemporains. Il a surtout cette grande richesse d’être travaillé par l’Esprit Saint, qu’il appelle son ami et qu’il nous engage à accueillir. En relisant sa somme théologique, « Je veux voir Dieu », mais aussi ses conférences et ses prêches, on se rend compte qu’après sainte Thérèse d’Avila, saint Jean de la Croix et sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, il confie un trésor : la quintessence de la doctrine du Carmel. C’est un géant de sainteté, nous n’avons pas fini de découvrir tout ce qu’il apporte à l’Église ! Il nous tient en éveil ! Le danger, même pour les chrétiens catholiques, est de mettre Dieu à l’extérieur et de plonger dans un activisme mortifère. C’est comme s’il nous disait : « Osez la foi tout le temps ! » Il nous ramène à l’essentiel : redécouvrir la présence de Dieu en nous, poser des actes de foi, vivre la miséricorde. Car la joie de Dieu, Trinité, est d’habiter le cœur de l’homme !
Festivités autour de la béatification du P. Marie-Eugène
Une veillée de prière et de louange est proposée dès le vendredi 18 novembre, spécialement pour les jeunes. Rendez-vous à l’église Saint-Ruf, Avignon, à partir de 20 h 30. La messe internationale de béatification sera célébrée lesamedi 19 novembre à 11 h, au parc des expositions d’Avignon et présidée par le Cardinal Angelo Amato, S.D.B, Préfet de la Congrégation pour la Cause des saints, représentant le pape François. Jusqu’à 16 h, les fidèles pourront vénérer les reliques du nouveau bienheureux. À 15 h, cent jeunes interprèteront la comédie musicale « T’es où ? My friend ». Le reliquaire du P. Marie-Eugène sera installé dans le sanctuaire de Notre-Dame de Vie, à Venasque, le 20 novembre à 14 h.