« Lumen Fidei » : la première encyclique du pape François
La confession de la fiabilité de Dieu
Dans la première partie, de la foi d’Abraham, l’homme qui, dans la voix de Dieu, reconnaît un appel profond, inscrit depuis toujours au cœur de son être, on passe à la foi du peuple d’Israël qui est un passage constant de la tentation à l’incrédulité et de l’adoration des idoles, œuvre des mains de l’homme, à la confession des bienfaits de Dieu et à l’accomplissement progressif de ses promesses. Et ce jusqu’à l’histoire de Jésus, compendium du salut, dans lequel toutes les lignes de l’histoire d’Israël se rassemblent et se concentrent. Avec Jésus, nous pouvons dire définitivement que nous avons reconnu l’amour que Dieu a pour nous, et nous y avons cru, parce qu’il est la pleine manifestation de la fiabilité de Dieu.
La vérité au cœur de la foi
Dans sa seconde partie, « l’encyclique pose avec force la question de la vérité comme se situant au cœur de la foi. La foi concerne donc également la connaissance de la réalité, elle est un événement cognitif. La foi, sans la vérité, ne sauve pas, elle reste un beau conte, ou bien elle se réduit à un beau sentiment. La foi, en nous ouvrant à l’amour qui vient de Dieu, transforme notre manière de voir les choses, dans la mesure où l’amour même porte une lumière. L’amour est authentique quand il nous relie à la vérité et la vérité elle-même nous attire à elle avec la force de l’amour. Cette découverte de l’amour comme source de connaissance, qui appartient à l’expérience originelle de tout homme, nous est témoignée précisément dans la conception biblique de la foi, et est un des points d’insistance les plus beaux et les plus importants de cette encyclique. La foi nous aide donc à pénétrer en profondeur aux fondements du réel.
En ce sens, on peut comprendre à quel niveau la lumière de la raison est en mesure d’éclairer les questions de notre temps sur la vérité, c’est à dire les grandes questions qui montent du cœur humain en face de la réalité entière, aussi bien devant ses beautés que devant ses drames.
N’entendant pas résumer la troisième et la quatrième partie de l’encyclique, je voudrais seulement attirer l’attention sur certains points qui, à mon avis, sont particulièrement importants. Avant tout en ce qui concerne le lieu génétique de la foi, laquelle, si elle est un événement touchant intimement la personne, n’enferme pas le « je » dans un face à face isolé et isolant avec Dieu. En effet, elle naît d’une rencontre qui se produit dans l’histoire et se transmet par contact, de personne à personne, comme une flamme s’allume à une autre flamme. Il me tient également à cœur de rappeler une citation tirée des Sermons de saint Léon le Grand : Si la foi n’est pas une, elle n’est pas la foi. Nous vivons en effet dans un monde qui, nonobstant toutes ses connexions et globalisations, est fragmenté et sectionné en beaucoup de mondes qui, bien qu’étant en communication, sont souvent et volontiers autonomes, en conflit l’un par rapport à l’autre.
L’unité de la foi est pour cette raison le bien précieux que le Saint-Père et ses confrères évêques sont invités à témoigner, à alimenter et à garantir, comme les prémices d’une unité qui veut s’offrir comme don au monde entier.
Enfin une dernière suggestion, reprise littéralement du texte, en sa quatrième partie. S’il est vrai que la foi authentique remplit de joie et est un épanouissement de la vie, voilà un rappel qui rapproche concrètement le pape François et Benoît XVI. La lumière de la foi ne nous fait pas oublier les souffrances du monde, mais nous ouvre à une présence qui accompagne, à une histoire de bien qui s’unit à chaque histoire de souffrance pour ouvrir en elle une trouée de lumière.
Bref, Lumen Fidei veut réaffirmer de manière nouvelle que la foi en Jésus-Christ est un bien pour l’homme, elle est un bien pour tous, elle est un bien commun. Sa lumière n’éclaire pas seulement l’intérieur de l’Église et ne sert pas seulement à construire une cité éternelle dans l’au-delà. Elle nous aide aussi à édifier nos sociétés, afin que nous marchions vers un avenir rempli d’espérance ».
La foi comme communion et service du bien commun
Puis le Cardinal Ouellet a d’abord souligné que Lumen Fidei « raconte la foi comme une expérience de communion, de dilatation du moi et de solidarité dans la marche de l’Eglise avec le Christ pour le salut de l’humanité. Objectivement, la lumière de la foi oriente le sens de la vie, elle réconforte et console les cœurs inquiets et meurtris, mais elle engage aussi les croyants à servir le bien commun de l’humanité par l’annonce et le partage authentique de la grâce reçue de Dieu. Subjectivement, la foi est une ouverture à l’amour du Christ, un accueil, l’entrée dans une relation qui élargit le « je » aux dimensions d’un « nous » qui n’est pas seulement humain, dans l’Eglise, mais qui est proprement divin, c’est à dire une participation authentique au « nous » du Père et du Fils dans l’Esprit. De ce « nous » trinitaire qui se prolonge dans le « nous » ecclésial, l’encyclique enchaîne tout naturellement avec le « nous » de la famille qui est le lieu par excellence de la transmission de la foi.
D’autre part, il existe de profondes affinités entre la foi et l’amour définitif que se promettent l’homme et la femme qui se marient. L’encyclique ajoute un développement remarquable sur la pertinence de la foi pour la vie en société, pour l’édification de la cité dans la justice et la paix, grâce au respect de chaque personne et de sa liberté, grâce aux ressources de compassion et de réconciliation qu’elle offre pour le soulagement des souffrances et la résolution des conflits. La tendance à confiner la foi au domaine de la vie privée se trouve ici réfutée pacifiquement, mais d’une façon décisive.
Beaucoup d’aspects développés dans les encycliques de Benoît XVI sur la charité et l’espérance trouvent leur complément dans cette mise en lumière de la foi comme communion et service du bien commun. En conclusion, cette encyclique contemple Marie, la figure par excellence de la foi, celle qui a écouté la Parole et l’a gardée dans son cœur, celle qui a suivi Jésus et qui s’est laissée transformer ».
« Qui voit croit »
Qui croit est appelé à vivre avec responsabilité face au monde
Quant à Mgr Fisichella, il a insisté sur l’expression « Qui croit voit », pouvant « résumer tout l’enseignement du Pape François contenu dans une encyclique qui repose sur le binôme lumière amour. Il s’agit d’un cheminement que le Pape propose à l’Eglise afin de retrouver sa fonction missionnaire. En exposant la foi, le texte se concentre sur l’essentiel de l’Eglise et du croyant, c’est à dire sur l’Incarnation, la mort et la résurrection du Fils de Dieu, et sur sa révélation de l’amour absolu. La foi naît de l’amour, ce qui établit un rapport indivisible entre la connaissance de foi et la connaissance d’amour même si l’amour détient un primat indiscutable. La lumière de la foi est contenue dans celle de l’amour.
L’encyclique porte symboliquement la date du 29 juin, fête des apôtres premiers témoins de la foi à Rome, dans cette ville où le Successeur de Pierre a le devoir de confirmer ses frères dans l’unité de la foi. Il avait plusieurs fois été demandé à Benoît XVI de rédiger une encyclique sur la foi pour compléter un triptyque avec Deus Caritas Est et Spe Salvi. Surmontant sa réticence dans la perspective de la clôture de l’Année de la foi, il entreprit une rédaction inachevée et aujourd’hui proposée par le pape François sous la forme d’un programme. Lumen Fidei reprend donc plusieurs thèmes du magistère de Benoît XVI tout en étant pleinement un texte du pape François, dont on retrouve le style fait d’image et de formules directes.
En résumé on y retrouve trois verbes employés par le Saint-Père dans son discours aux Cardinaux ayant suivi son élection : Cheminer, bâtir, confesser. Ils en sont les clefs de lecture d’une encyclique qui se place parfaitement dans le contexte de l’Année de la foi, du cinquantenaire de Vatican II et du vingtième anniversaire du Catéchisme de l’Eglise catholique. Vatican II, écrit le Pape, fut un concile sur la foi destiné à replacer de manière compréhensible et croyable le primat de Dieu au centre de la vie ecclésiale dans une société et une culture changées. Quant au Catéchisme, il constitue un outil efficace pour que l’Eglise accomplisse sa mission.. Et à son propos le pape François souligne la valeur fondamentale du Credo qui permet de voir la foi comme une réalité majeure de la vie des croyants, trop souvent analphabètes des contenus de la foi chrétienne.
En somme, qui croit est appelé à vivre avec responsabilité face au monde, à la nature et à la société. L’encyclique revêt aussi une forte connotation pastorale car le Saint-Père sait traduire les délicats points théologiques au moyen de formules qui aident la réflexion des fidèles et la catéchèse. Personne ne devrait donc craindre d’envisager de grands idéaux et de tendre à leur réalisation. La foi et l’amour, qui sont leurs premiers devoirs en un temps de faiblesse culturelle, sonnent comme un défi et une provocation qui nous interpellent ».
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