« La crise nous fait vivre de manière intense que la famille, c’est essentiel ! »
- Quelle est la mission de la pastorale des familles ? Quelles réalités couvre-t-elle ?
La mission de fond de fond de la pastorale des familles est double : renforcer l’amour et accompagner toutes les situations familiales avec miséricorde. Cette pastorale s’appuie sur une conviction : nous sommes créés pour aimer, et aimer c’est parfois bien compliqué… La Bible elle-même abonde en histoires d’amour et en crises familiales. Elle s’adresse à toutes les familles, quels que soient leurs parcours, simples ou bousculés. Elle veut notamment les soutenir dans la vie de couple, vers et dans le mariage, dans les étapes marquantes de la vie familiale, dans les crises, dans la charge de parents et les défis de l’éducation des enfants, dans les engagements en société et en Église, dans les ruptures et les recompositions… La liste ne s’arrête pas là parce que la vie de famille ne s’arrête pas.
Pour préciser une peu, je la qualifie de pastorale de l’oreille, il s’agit avant tout d’écouter : Écouter la réalité : que vivent les familles, quels sont leurs désirs, leurs difficultés, leurs possibilités, leurs espérances ? Écouter les ressources théologiques : la pastorale des familles a une feuille de route, l’exhortation apostolique Amoris laetitia dont nous fêtons le 4ème anniversaire ces jours-ci. Écouter les expériences pastorales : certains organisent par exemple un café des grands-parents ; des paroisses proposent un petit déjeuner B’ABBA pour oser parler de la foi pendant la préparation au mariage ; des diocèses ont structuré l’accompagnement au discernement des personnes divorcées ; des équipes existent pour se soutenir dans la vie de couple et de famille, ou encore des familles soutenues dans la transition écologique. Et tant d’autres idées au service des liens …
- Partout dans le pays, les personnes fragiles et vulnérables sont touchées par la crise sanitaire que nous traversons ? Comment l’Église, à travers cette pastorale, peut-elle les accompagner ?
Nous faisons l’expérience que les familles ne sont pas des petits enclos séparés de la société. Elles ont besoin du soutien des services publics, des enseignants, des médecins, des Églises et de tant d’autres, chacun selon ses compétences. Nous faisons aussi l’expérience que le petit noyau familial s’appauvrit et souffre quand il s’isole de la famille élargie : les grands-mères, les oncles, les amis chers nous manquent et nous leur manquons.
La crise nous fait vivre de manière intense que la famille c’est essentiel ! Essentiel pour un monde où personne ne se sente seul. Prendre soin les uns des autres, se soutenir, s’encourager mutuellement c’est le cœur de la famille. Nous redécouvrons qu’il est essentiel de soutenir ces liens, car ils sont à la fois forts et fragiles. Vivre en famille, même sans confinement, cela ne se fait pas sans travail, c’est parfois très difficile voire invivable. Les violences conjugales et familiales semblent exploser, quels drames découvrirons-nous à la sortie du confinement ?
Être ensemble en permanence, cela use, on se frotte aux autres tout le temps et cela peut piquer. Loin de tout discours idéalisant à l’excès amour, mariage et famille, les pastorales des familles sont particulièrement attentives en ces jours difficiles à le redire : la réalité conjugale c’est du concret. L’idéalisme est vite un piège pour l’espérance
- Le confinement mis en place pour limiter la propagation du virus chamboule la vie de famille. Il n’est pas évident de concilier l’école à la maison, le télétravail -quand il est encore possible- et la vie de famille. Quels conseils pouvez-vous donner aux familles pour tenir le coup ?
Ce n’est pas évident de tout concilier : acceptons de ne pas y arriver, acceptons nos limites, nos fragilités. En ce moment on apprend dans les maisons à (re)faire famille, c’est un travail qui demande de la créativité.
Les conseils pour les adultes et les jeunes fleurissent dans les réseaux : garder un rythme et faire baisser la pression, établir ensemble une charte, associer enfants et adultes aux services quotidiens, adopter une communication non-violente, se réserver des temps persos et des temps en couple, parler de choses positives, se dire merci-bravo-s ’il te plait-pardon, partager la Parole de Dieu …
Au fond, si ces conseils de bon sens pouvaient être ceux d’après le confinement, ce serait magnifique. Mais peut-être croulons-nous sous les conseils ? Peut-être faut-il d’abord un discours humble : chacun fait du mieux qu’il peut, il fait le petit pas dont il est capable et c’est magnifique.
- Avez-vous des exemples d’initiatives dans les diocèses qui vous semblent particulièrement intéressantes ?
Passé le premier moment de sidération, les diocèses et mouvements ont été inventifs.
Ils ont pensé aux couples qui se préparent au mariage et qui doivent le reporter à plus tard, sans savoir quand. Les CPM (centres de préparation au mariage) ont réalisé un livret bien utile pour aider à passer le cap. Des diocèses proposent de (re)lire le chapitre 4 d’Amoris laetitia et s’interroger à deux sur la patience, le service, l’envie.
Ils ont pensé aux ainés isolés. Ils ont lancé l’idée d’écrire de leur écrire des cartes, le diocèse du Puy l’a formalisé.
Ils ont pensé aux couples qui craignent de ne plus bien s’aimer. Le blog l’espace du couples a été mis en valeur, il propose des conseils pour prendre soin de l’ambiance à la maison et s’oxygéner. Le diocèse de Fréjus Toulon propose un parcours vidéo animé par un couple avec une expérience antérieure du confinement.
Ils ont pensé aux enfants, reprenant des idées glanées ici et là : trouver les mots pour leur parler du Coronavirus, accueillir leurs peurs, réaliser un journal familial, aider en français ou maths quelqu’un de sa classe. On peut Découvrir la proposition du diocèse d’Annecy.
Ils ont pensé aux situations dangereuses ou simplement à ceux qui n’en peuvent plus. Le Cler Amour et famille propose une écoute gratuite par des conseillers conjugaux et familiaux. Les AFC relayent Le 119 : pour agir face aux violences intrafamiliales.
Ils ont pensé à prier. La pastorale des familles de Créteil invite à prier pour : toutes les familles, les célibataires, séparés ou divorcés, couples actifs ou retraités, veufs ou veuves, jeunes couples avec ou sans enfant, famille en espérance d’enfant, familles nombreuses, familles monoparentales, familles recomposées, familles dispersées, familles en deuil … Vous lirez la suite en ligne. Je vous confie cette prière.
- Comment, ceux-qui le souhaitent, peuvent-ils vous aider dans votre mission ?
Aujourd’hui nous sommes tous dans le même bateau, nous sommes fragiles et inquiets. Mais il faut aussi penser à l’avenir, voici quelques idées.
En tout premier lieu essayer d’aimer ses proches, avoir de la compassion les uns pour les autres.
Si l’on a du temps, pourquoi ne pas commencer par découvrir Amoris laetitia du pape François ? L’exhortation se télécharge s’écoute en version audio , on peut aussi télécharger la présentation des 9 chapitres de l’exhortation.
La question d’une formation peut se poser, ce temps imprévu peut-il nous permettre d’y réfléchir ? Cela peut être de se former à l’intelligence de la foi pour agir en chrétien dans un monde complexe, de suivre le certificat Amoris laetitia de la catho de Lyon. Ou de manière plus spécifique se former à l’écoute, au Conseil conjugal, à la médiation familiale, à la communication non-violente, à l’accompagnement spirituel…
S’interroger aussi sur des actions de proximité ou de plaidoyer avec les familles pauvres, sur un respect plus grand envers celles et ceux qui sont différents, sur l’accompagnement des ainés isolés ? La créativité de l’amour est sollicitée !
La plupart des diocèses ont des équipes de pastorales des familles et c’est en priorité vers elles qu’il faut se tourner. Merci à tous et toutes, elles tiennent bon. Merci aussi aux familles, elles inventent au jour le jour.
Propos recueillis par CP
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Prière pour la famille
Confinement : une prière de la pastorale des familles
Dans ce temps de confinement, Seigneur, nous te prions pour : toutes les familles, les célibataires, séparés ou divorcés, couples actifs ou retraités, veufs ou veuves, jeunes couples avec ou sans enfant, famille en espérance d’enfant, familles nombreuses, familles monoparentales, familles[...]
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Mgr Olivier Leborgne, évêque du diocèse d'Amiens a adressé un message aux familles au débuts du confinement.