Mgr Delannoy, évêque de Saint-Denis en France : « Vivre comme le Christ ! »
En ce mercredi des Cendres débute le temps du carême : 40 jours pour nous préparer à la fête de Pâques ! Durant ces 40 jours, nous ne pourrons oublier que la campagne électorale en vue des élections présidentielles se poursuivra. Durant ces 40 jours, nous ne pourrons oublier la violence verbale ou physique qui s’empare de nos quartiers et cités et parfois, de nous-mêmes. Durant ces 40 jours, nous ne pourrons ignorer la détresse de ceux qui habitent les pays les plus pauvres ou, qui connaissant le fléau de la dictature ou de la guerre, se précipitent sur les routes de l’exode.
Le carême ne nous met pas en dehors du monde. Il nous plonge au cœur du monde afin que nous y soyons présents à la manière du Christ. Pour cela, nous voulons prendre résolument le chemin de la conversion en répondant à la triple invitation que le Christ nous adresse le mercredi des Cendres : prier, jeûner, faire l’aumône.
Prier
Durant ce temps de carême, la campagne électorale se poursuivra. Au-delà des « petites phrases », prenons le temps de la réflexion à la lumière de l’Évangile et de la tradition de l’Église. Deux documents, proposés par le Conseil permanent des évêques de France peuvent nous y aider : « 2017, année électorale : quelques éléments de réflexion[1] » ; « Dans un monde qui change, retrouver le sens du politique[2] ». Prenons également le temps de la prière afin que l’Esprit Saint nous guide dans la recherche toujours exigeante du bien commun. Recherche qui est aussi pour nous, disciples du Christ, chemin de conversion afin de nous laisser toucher par « les cris du monde pour les transformer en espérance partagée [3] ».
Durant ce temps de carême, je vous invite également à prier pour notre pays en empruntant ces quelques mots à la liturgie : « Dieu qui veilles sur notre monde, regarde le pays où tu nous as donné de vivre ; Accorde à tous ses habitants de rechercher le bien commun, à ceux qui nous gouvernent de le faire avec sagesse, afin qu’il y ait parmi nous plus de justice, et dans le monde entier plus de bonheur et de paix[4]».
Durant ce temps de carême, que la prière devienne aussi prière familiale car « la famille qui prie unie demeure unie[5] ».
Jeûner
Dans son message du 1er janvier dernier, journée mondiale de la paix, le pape François nous invitait à la « non-violence active ». Citant l’évangile, il rappelait que la violence vient du cœur de l’homme : « C’est du dedans, du cœur de l’homme que sortent les pensées perverses » (Marc 7, 21). Durant ce carême, que tout désir de violence physique ou verbal (il y a des mots qui « tuent ») quitte nos cœurs !
Avec le Christ, apprenons que la non-violence active est une force qui peut transformer la société quand elle dénonce à temps et à contretemps les situations d’injustice et d’exclusion dont la violence se nourrit. Que nos familles soient des lieux où l’on apprenne à résoudre les conflits de manière non-violente : « La famille est le creuset indispensable dans lequel époux, parents et enfants, frères et sœurs apprennent à communiquer et à prendre soin les uns des autres de manière désintéressée, et où les frictions, voire les conflits doivent être surmontés, non par la force mais par le dialogue, le respect, la recherche du bien de l’autre, la miséricorde et le pardon[6] ».
Chaque vendredi de carême, je vous invite à jeûner afin que Dieu chasse de nos cœurs et du cœur des hommes tout désir de violence et les rende accueillants à son pardon.
Faire l’aumône
Faire l’aumône, c’est offrir de l’argent aux nécessiteux sans attendre de contrepartie. Elle est inspirée par l’amour du prochain. Aujourd’hui, pour manifester que chacun peut donner et recevoir, nous entendons plus souvent retentir l’appel à la solidarité. Le carême est toujours une invitation au partage : partage de ce que nous sommes, partage de ce que nous possédons…
Partage de ce que nous sommes… Dans son message pour le carême, le pape François écrit que « l’autre est un don » et que « la relation juste avec les personnes consiste à reconnaître leur valeur ». Durant ce temps de carême pourrions-nous oser la rencontre avec celui que nous connaissons peu ou pas ?
Partage de ce que nous possédons… Parmi toutes les sollicitations qui vous parviendront, je vous invite à manifester votre solidarité avec les étudiants d’Irak réfugiés à Erbil. À Erbil l’enseignement n’est donné qu’en Kurde, langue que ne parle pas les réfugiés chrétiens (chaldéens ou syriaques catholiques) qui doivent donc une nouvelle fois quitter leurs repères pour aller étudier à Kirkouk. Pour la deuxième année consécutive, l’Église de France a décidé de soutenir le projet porté par Mgr Youssif Thomas Mirkis, archevêque chaldéen de Kirkouk, d’accueillir ces étudiants en s’engageant à financer le logement, la nourriture, l’accès aux soins et les fournitures scolaires.
Durant ce carême, ayons à cœur de revenir vers le Seigneur par la prière, le jeûne et l’aumône. Ainsi, nous pourrons vivre dans le monde, non pas à la manière des hommes, mais à la manière du Christ en y témoignant de la joie Pascale !
+ Pascal Delannoy
Évêque de Saint-Denis-en-France.
[1] 2017, année électorale : quelques éléments de réflexion
[2] Dans un monde qui change, retrouver le sens du politique
[3] Démarche de carême proposée par le CCFD (Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement).
[4] Missel Romain, oraison de la messe « Pour le pays ou la cité ».
[5] Pape François, Exhortation apostolique : « La joie de l’amour » § 227.
[6] Pape François, 1er janvier 2017, message pour la 50ème journée mondiale de la Paix, § 5.