Homélie du dimanche 3 juillet

Dimanche 3 juillet 2022

QUATORZIEME DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE

Références bibliques :

Lecture du livre du prophète Isaïe : 66. 10 à 14 : » Le Seigneur fera connaître sa puissance à ses serviteurs. »
Psaume 65 : » Je vous dirai ce qu’il a fait pour mon âme. »
Lecture de la lettre de saint Paul aux Galates : 6. 14 à 18 : » Ce qui compte, c’est la création nouvelle. »
Evangile de Jésus-Christ selon saint Luc : 10. 1 à 20 : » Le règne de Dieu est tout proche. »

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Ce dimanche nous donne les dernières lignes de la lettre de saint Paul aux Galates. Centrée sur le conflit que connaissait cette communauté à propos de la Loi reçue par le peuple de Dieu et la foi en Jésus-Christ, cette lettre se termine par un texte écrit de la main même de l’Apôtre authentifiant ainsi ce qu’elle contient et qui  exprime ce qui est au coeur de sa pensée et de sa vie.

UNE PEDAGOGIE PROVISOIRE

Les observances judaïques ont joué le rôle d’un pédagogue provisoire qui nous conduit à ce qui est l’essentiel : le Christ : »La Loi a été notre surveillant jusqu’au Christ.  Le temps de la foi est venue, nous ne dépendons plus de ce surveillant. » (Galates 3. 24 et 25)

Cette affirmation reprend, en quelques mots très brefs, les thèmes qui lui sont particulièrement chers. C’est pourquoi ils doivent être mis en relation avec ce qui est exprimé dans ses autres lettres. La croix du Christ est à l’oeuvre dans toute vie, comme elle l’est dans la vie du Christ. Elle n’est pas destructrice, mais génératrice de la création nouvelle qui nous apporte paix et miséricorde parce qu’elle nous conduit à la Résurrection. « Il fallait que le Christ souffrit pour entrer dans sa gloire. »

La lettre aux Corinthiens (1 Corinthiens 1. 18) donne aussi le sens de la croix pour saint Paul et établit la même liaison entre la résurrection du Christ et la création nouvelle que nous sommes. « Le Christ est mort pour tous, afin que les vivants ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour celui qui est mort et ressuscité. »

Nous devons avoir ce même regard sur le Christ, au-delà de ce que nous connaissons des événements de sa vie en Palestine : « Aussi nous ne connaissons plus personne selon la chair. Mais si nous avons connu le Christ selon la chair, nous ne le connaissons plus ainsi à présent. Si donc quelqu’un est dans le Christ, c’est une création nouvelle. L’être ancien a disparu, un être nouveau est là. » (2ème aux Corinthiens. 5. 15 à 17)

LA CROIX DU CHRIST, MOTIF D’ORGUEIL.

Toujours aux Corinthiens, saint Paul avait écrit qu’il n’avait voulu connaître parmi eux que Jésus-Christ et Jésus-Christ crucifié. Ce qui est scandale pour les Juifs et folie pour les païens, est, pour le croyant, sagesse et puissance de Dieu. (1 Corinthiens 1.2)

Car la croix du Christ n’est pas un événement sur lequel on peut disserter. Il faut aller au cœur de ce qu’elle est, à son essentiel : elle est le signe de l’amour absolu, non seulement pour tous les hommes considérés globalement, mais pour chacun d’eux  personnellement et au plus profond de lui-même, pour chacun de nous, pour moi, et au plus profond de moi-même. « Je vis dans la foi au Fils de Dieu qui m’a aimé et s’est livré pour moi » (Galates 2. 20)

Vivre dans la foi, vivre dans le Christ…
Il nous faut ne jamais oublier ce que signifie pour saint Paul la vigueur de cette expression « vivre dans ». Ce n’est pas vivre, dans une ambiance ou selon un mode de vie qui répondent à la pensée de Jésus, c’est « être inséré dans » l’être même du Christ, dans la vie divine qui est la sienne. « Pour moi, vivre, c’est le Christ. » (Philippiens 1. 21) Sa vie est cachée avec le Christ en Dieu. (Colossiens 3. 3)

Il met son orgueil dans la croix de celui qu’il désigne par son nom liturgique plénier : »Notre Seigneur Jésus-Christ ».  Et il reprend ce nom au terme de ces paroles qui sont l’essentiel de lui-même :  « Que la grâce de notre Seigneur Jésus-Christ soit avec votre esprit. » (Galates 6. 18)

Il déboute ainsi l’homme de toute prétention à acquérir la justice et l’adéquation à Dieu, par ses propres forces humaines. Il met son orgueil dans la croix, or l’orgueil, c’est le sentiment élevé que l’on porte sur soi-même et que l’on manifeste aux autres. Le motif d’orgueil, pour Paul, n’est pas ce qu’il est ou ce qu’il a fait, mais ce qu’un autre a fait pour lui et, au départ, sans lui.

A vues humaines, cette croix est plus qu’un échec, c’est une malédiction. (Galates 3. 13) Et pourtant elle est devenue aux yeux de Dieu la bénédiction : »C’est ainsi que la bénédiction d’Abraham parvient aux païens dans le Christ Jésus pour que nous recevions la promesse (faite à Abraham) par le foi. » (Galates 3. 14) Ceux qui ont revêtu le Christ par le baptême en son sang, sont véritablement le Peuple de Dieu au même titre que le peuple des fils d’Abraham.

UNE CREATION NOUVELLE.

La croix est en effet étonnante. Seul Dieu peut aimer ainsi. L’homme ne peut ni mériter ni même imaginer un tel amour : c’est en cela que réside le mystère du salut. Le baptême a fait de nous un être uni et assimilé au Christ dans sa mort, pour l’être dans sa résurrection. La croix du Christ doit être considérée non comme une œuvre de destruction mais comme une oeuvre de dépouillement qui agit en chacun de nous comme elle agit en saint Paul, dépouillement qui nous insère en sa richesse divine.

C’est ainsi qu’elle est oeuvre de vie : »Nous sommes sans cesse livrés à la mort à cause de Jésus, afin que la vie de Jésus soit, elle aussi, manifestée dans notre chair mortelle. Ainsi la mort fait son oeuvre en nous et la vie en vous. » (2 Corinthiens 4. 10 à 12)

De nos points de vue et pour nos contemporains, parler de la croix et de la mort peut souvent paraître un langage bien négatif. Il n’en est rien dans l’esprit de saint Paul. La mort est une mort au péché en vue d’une vie nouvelle : la vie éternelle déjà commencée, actuellement commencée, en nous-mêmes.

Ce n’est pas seulement une vie renouvelée, c’est une nouvelle création, une « re-création », aussi novatrice que la première : »Vous tous que le baptême a unis au Christ, vous avez revêtu le Christ ». (Galates 3. 27) La circoncision, qui marque le corps en rite d’identification du peuple juif, est dépassée. La liturgie baptismale de l’Eglise catholique latine le dit au nouveau baptisé, et c’est pourquoi, dans le même temps, elle le «signe» de la croix. La « marque du Christ », qui est la croix en nous, constitue « le véritable Israël de Dieu ».

C’est alors que prend tout son sens ces mots de saint Paul : »Le monde est à jamais crucifié pour moi, et moi, pour le monde. » Trop souvent nous les entendons comme devant être le détachement des choses de ce monde. Autre est le regard de Paul. En tout homme, il voit la marque indélébile de la croix par laquelle Dieu fait de tout homme son Peuple.

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« Nous ne connaissons plus personne selon la chair. » (2 Corinthiens 5. 16) « Vous ne faîtes plus qu’un dans le Christ Jésus. » (Galates 3. 28)

« Ecoutez, vous tous qui craignez Dieu… Il a changé la mer en terre ferme…  »
Son amour fait plus que cela en Jésus-Christ :
« Ecoutez, je vous dirai ce qu’il a fait pour mon âme. » (psaume de ce dimanche)

Il a fait de nous une création nouvelle

« Comblés d’un si grand bien… fais que jamais nous ne cessions de chanter ta louange. » (Prière de communion)

« Réjouissez-vous, nous clame Isaïe. Vos membres, comme l’herbe nouvelle, seront rajeunis. » (Isaïe 66. 14)

année liturgique B