Mgr Wintzer : « La renonciation de Benoît XVI, un acte magistériel »

Nommé évêque auxiliaire de Poitiers puis archevêque de ce diocèse par le pape Benoît XVI, Mgr Pascal Wintzer s’est rendu, fin 2012, en Visite Ad Limina à Rome. Il nous livre sa réaction à l’annonce de la renonciation du Pape.

 

Il existe des événements qui impriment dans notre mémoire le lieu et le moment où nous en avons pris connaissance. Ainsi, je pense que chacun de nous, excepté pour les plus jeunes, se souvient du lieu où il se trouvait lorsque fut annoncé qu’un avion, puis deux, s’étaient écrasés sur les tours du World Trade Center de New York. De tels souvenirs concernent aussi des événements de notre vie personnelle.

Pour ma part, je pense que je garderai en mémoire les circonstances dans lesquelles j’ai appris que le Pape Benoît XVI renonçait à l’exercice de sa charge. Invité par France 3 Poitou-Charentes pour parler du denier de l’Eglise et des ressources du diocèse, je me trouvais entre les mains de la maquilleuse, quelques minutes avant midi, le lundi 11 février, lorsque le rédacteur en chef de l’édition me fit part de la dépêche de l’AFP exprimant en quelques mots la décision du Pape. Surpris, je lui répondis que je commenterai la chose le 29 février !

Cependant, force fut de constater que la nouvelle était juste, et dans le journal télévisé, après le sujet concernant les finances, la journaliste m’interrogea sur la décision du Pape ; prudent, je formulais mes réponses au conditionnel.

En effet, c’est la surprise qui saisit à cette annonce. Certes, on savait bien que ceci s’était produit dans l’histoire, que rien ne l’empêchait, mais, passer de la théorie à la pratique…

Par cette décision, Benoît XVI fait acte théologique, il engage le magistère. Il signifie qu’il est demeuré cet homme, Joseph Ratzinger, qui, certes, exerce le ministère de Pierre, mais qui, cependant, ne disparaît pas derrière cette mission. On savait cela de lui : n’a-t-il pas publié son travail sur Jésus-Christ en le signant de son nom et non de celui de Benoît XVI ? Cette attitude est un signe évident de modernité. Il exprime que chaque personne se sait diverse, qu’elle ne peut être limitée à tel ou tel de ses aspects : métier, engagement, vie privée, etc. Même pour le Pape il en est ainsi.

Une telle attitude ne manque pas d’interroger. D’abord les catholiques qui sont conduits à comprendre autrement le ministère pétrinien. Il ne s’agit pas de le réduire, de le borner, mais bien de le saisir dans toute sa portée : le service porté par un homme, qui « ne se prend pas pour le Bon Dieu », selon les mots du cardinal Vingt-Trois. Certes, ceci ne diminue en rien le prestige intellectuel de cet homme, ni sa sagesse, ni même sa sainteté, mais exprime que c’est bien par des chemins d’humanité que se vit la fidélité à l’Evangile.

Ensuite, c’est chacun qui comprend que sa vie ne s’identifie à aucune des dimensions qui la constitue mais plutôt à leur somme. Tout l’enjeu d’une vie consistant à établir une belle harmonie entre ces aspects de l’unique personne.

D’autre part, Benoît XVI, par son geste, souligne l’importance de la réflexion, du colloque intérieur, et de la prière bien sûr. Quel que soit le temps que prend l’exercice d’une charge, rien ne saurait dispenser du silence qui permet, face à Dieu, à sa conscience, à tel ou tel conseil, de mesurer la pertinence de la manière dont on l’exerce. La décision prise par le Saint-Père le 11 février trouve sa source en ce lieu : le cœur.

(…) Quoiqu’on le dise peu doué pour la communication, à la différence de son prédécesseur, Benoît XVI, et par bien d’autres manières que celle qui s’exprima le 11 février 2013, a su, de l’intérieur, parler haut et parler clair.

Mgr Pascal Wintzer
Archevêque de Poitiers

 

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