Les funérailles pontificales : comme cela se passe-t-il ?

Les funérailles de Benoît XVI présidées par le Saint-Père seront célébrées place Saint-Pierre le jeudi 5 janvier à 9h30. « Conformément au souhait du Pape émérite, les funérailles se dérouleront dans la simplicité », a indiqué Matteo Bruni, Porte-parole du Saint-Siège. La célébration sera retransmise en direct sur KTO et sur la chaîne YouTube de Vatican News. À la fin de la célébration eucharistique, le cercueil du Souverain pontife émérite sera transporté à la Basilique Saint-Pierre puis dans les grottes du Vatican pour l’inhumation.

Comment se passent les funérailles pontificales en temps normal, c’est-à-dire lorsqu’elles concernent un Pape en fonction ? Nous avons réactualisé cet article daté des funérailles de Jean-Paul II en 2005.

Durée des cérémonies funèbres

Les services funèbres du Pape durent neuf jours consécutifs, ce qu’on appelle les novemdiales. Ce sont les cardinaux réunis en congrégation qui fixent le jour du transfert du corps dans la basilique Saint-Pierre et organisent les obsèques. L’inhumation doit avoir lieu entre le quatrième et le sixième jour qui suit la mort du pape.
La nouvelle constitution apostolique de 1996 sur la vacance du Siège apostolique et le rituel de 1998 sur les obsèques du pontife romain ont confirmé le souci de simplification des cérémonies liturgiques à Rome, exprimé au concile Vatican II. Il s’agit de mettre en lumière le lien entre la mort du Christ et celle de l’un de ses disciples, de favoriser la participation des fidèles, qu’ils soient romains ou venus d’ailleurs. Les prières sont marquées par la foi en la résurrection, par l’espérance de la vie éternelle auprès de Dieu, et par l’affection du peuple chrétien pour son pasteur.

Le déroulement des cérémonies funèbres

Selon le rituel, les funérailles se déroulent en trois stations : dans le palais apostolique, dans la basilique Saint-Pierre, et enfin au lieu de la sépulture. Le maître des Célébrations liturgiques (en 2022, Mgr Diego Giovanni Ravelli) veille à ce que le corps du pape soit revêtu des vêtements pontificaux, avec le bâton pastoral, la mitre et le pallium.
Pour l’hommage des fidèles, le corps du défunt est d’abord exposé dans le palais apostolique puis dans la basilique Saint-Pierre. Les premières visites débutent par un office de prière présidé par le Camerlingue, et la veillée du corps est assurée par les prêtres pénitenciers de la basilique vaticane. Puis le corps est transporté en procession, présidée par le Camerlingue, du palais jusqu’à la basilique. Le corps du pape y est déposé devant l’autel de La Confession de Pierre, face au peuple, comme lorsqu’il présidait les célébrations. Avant la messe des obsèques, le corps du pape est déposé dans un cercueil de cyprès. Selon la tradition, le Camerlingue doit alors recouvrir le visage du pape d’un voile de soie blanche, déposer dans le cercueil une bourse contenant les monnaies émises sous ce pontificat achevé, et sceller dans un étui le récit de ce qui vient d’être accompli.
C’est dans la basilique que le rituel officiel prévoit la messe des funérailles, mais pour Paul VI, Jean-Paul Ier, et Jean-Paul II, les obsèques furent célébrées sur la place Saint-Pierre. Pour leurs funérailles, le cercueil, porté par les sediarii, avait été déposé devant un autel, à même le dallage de l’esplanade, sans voile mortuaire. Sur le cercueil nu, on avait ouvert le livre des Évangiles, et à côté brillait la flamme du cierge pascal.

La messe est présidée par le Doyen du collège cardinalice (en 2022, le cardinal Giovanni Battista Re) et concélébrée par les cardinaux et les patriarches, avec la couleur liturgique rouge. À la fin de la messe, un triple adieu est prononcé, celui de l’Église de Rome, représentée par le cardinal vicaire (actuellement le cardinal De Donatis), celui des Églises orientales, représentées par le plus ancien des patriarches présents, et enfin celui de toute l’Église catholique, représentée par le Doyen. La cérémonie se termine par le chant In paradisum.

L’inhumation

À l’issue de la cérémonie, les sediarii reprennent le cercueil pour le transporter dans la crypte par la porte Sainte-Marthe. Après l’oraison dite par le Camerlingue, le cercueil de cyprès est placé dans un cercueil de zinc, puis les deux enfermés dans un cercueil de bois, après avoir été scellés. Sur le dessus du dernier cercueil sont placés la croix et le blason du Pape. Celui-ci est alors inhumé au chant du Salve Regina.
La sépulture des Papes dans les cryptes de la basilique vaticane est traditionnelle mais pas exclusive : Pie IX a voulu être inhumé à Saint-Laurent-hors-les-murs (1878) et Léon XIII dans la basilique du Latran, la cathédrale de Rome (1903). Depuis, tous les papes ont choisi d’être inhumés dans la crypte de la basilique vaticane. Le corps de Pie X a été transféré dans la basilique Saint-Pierre après sa béatification en 1951. Il en a été de même en juin 2001 pour la dépouille de Jean XXIII qui avait été béatifié l’année précédente.

 

Le sens chrétien des funérailles

La mort dans le christianisme

Quoi qu’il en soit de la douleur de la séparation, la mort, dans le christianisme, est comprise comme passage à la suite du Christ qui a connu la mort, dans la joyeuse espérance fondée sur la foi en sa résurrection.
Pâques, la principale fête chrétienne, célèbre le double événement de la mort et de la résurrection du Christ, que les chrétiens comprennent comme la révélation ultime sur Dieu : Dieu lui-même, en Jésus Christ, a traversé la mort de l’homme.
La mort et la résurrection de Jésus Christ manifestent donc la proximité de Dieu et son amour pour l’homme. Toute l’existence chrétienne trouve sa source dans l’événement pascal : la mort a pris un sens nouveau, celui d’une espérance en Dieu qui veut que l’homme vive pour toujours.
Le chrétien attend la résurrection de la chair et la vie du monde à venir.

La célébration chrétienne des funérailles

Au moment de la mort, l’Église témoigne de sa foi et de son espérance en la résurrection. Les prières qu’elle adresse à Dieu et les honneurs qu’elle rend au défunt (exposition du corps, rites d’encensement et d’aspersion d’eau bénite, etc.) expriment la foi chrétienne : la mort est passage vers Dieu, à la suite du Christ.
Le chrétien est appelé à affronter sa mort dans la confiance en Dieu : Dieu a ressuscité Jésus d’entre les morts, gage de la résurrection à laquelle le chrétien aspire. C’est pourquoi l’Église catholique insère volontiers les funérailles dans une célébration eucharistique. La messe en effet est, pour les catholiques, une manière de rendre présents la mort et la résurrection du Christ, double événement dans lequel le chrétien trouve la force de conduire sa vie dans la perspective confiante de Pâques.

  • La présence du cercueil dans l’assemblée chrétienne est un témoignage rendu à la foi en une vie mystérieusement poursuivie par le défunt au-delà de sa mort. Pour l’Eglise, la célébration de l’eucharistie à l’intention du défunt aide celui-ci à continuer son cheminement à la suite du Christ par delà la mort, et réconforte ceux qui le pleurent par la communion en la joyeuse espérance de la résurrection. La célébration chrétienne des funérailles comporte ainsi cette double note de supplication pour le défunt (l’Eglise demande à Dieu le pardon des péchés du défunt) et de ferme confiance en la volonté de Dieu de communiquer aux hommes une vie nouvelle.
    Dans le cas d’un prêtre ou d’un évêque et donc, a fortiori, du pape, la coutume est d’orienter le corps vers l’assemblée, car c’est tourné vers l’assemblée que, de son vivant, il célébrait l’eucharistie. Il est possible, si cela est jugé opportun, de déposer sur le cercueil, au début de la célébration eucharistique, les vêtements liturgiques que portait le défunt ou le livre de la Parole de Dieu qu’il avait mission d’annoncer.
  • Le cierge pascal brûle aux côtés du défunt, symbole de l’espérance qu’ouvre la foi en la résurrection du Christ. Le cierge, en effet, est communément symbole de présence et de vie. La particularité du cierge pascal est d’avoir été béni au cours de la veillée de la fête de Pâques, bénédiction qui en fait un symbole de la présence du Christ ressuscité. Il est possible aussi de développer le rite d’illumination : dans ce cas, un membre de l’assemblée vient prendre la lumière au cierge pascal et la communique aux autres cierges utilisés pendant la célébration.
  • La messe se déroule selon les trois parties habituelles : liturgie pénitentielle, liturgie de la Parole, liturgie eucharistique. La liturgie pénitentielle est une invocation du pardon de Dieu qui dispose les fidèles à accueillir sa présence bienveillante. Elle comprend une confession des péchés ou des invocations au Christ vainqueur de la mort et du péché, puis une formule d’absolution par laquelle le célébrant accorde le pardon de Dieu. La liturgie de la Parole comprend des lectures de la Bible (une ou deux selon les circonstances) et culminent avec une lecture tirée de l’Évangile. Le célébrant commente ensuite, dans l’homélie, les lectures et les circonstances qui réunissent les fidèles. Dans la liturgie eucharistique, le pain et le vin sont consacrés pour rendre présent le mystère pascal du Christ auquel les fidèles pourront ensuite communier.
  • A l’issue de la messe, soit à l’endroit même où elle a été célébrée, soit auprès de la sépulture, l’assemblée célèbre le « dernier adieu ». Ce rite comporte d’abord une prière qui demande à Dieu d’accueillir l’âme du défunt en attendant la résurrection de son corps. Ensuite, le célébrant encense solennellement le cercueil. C’est là un signe de respect que la foi en la résurrection pousse à témoigner à l’endroit de la dépouille. L’encens est le double symbole de la présence divine et de la prière qui s’élève vers Dieu ; les chrétiens orientaux en font aussi le symbole de la purification des fidèles. Enfin, le célébrant asperge le cercueil d’eau bénite. Il s’agit d’un rappel du baptême par lequel le chrétien est associé à la mort et à la résurrection du Christ, ainsi établi membre de la communauté de foi qu’est l’Eglise.
  • Au lieu de l’inhumation, le célébrant peut bénir la sépulture. En ce cas, il prononce une prière qui demande au Christ d’accorder au défunt de reposer en paix dans ce tombeau jusqu’au jour de la résurrection des morts, puis il asperge la tombe d’eau bénite.
    Si le rite du dernier adieu n’a pas eu lieu dans l’église à l’issue de la célébration eucharistique, il prend place ici.

Les fidèles peuvent faire mémoire d’un défunt au cours de célébrations eucharistiques ultérieures. La foi catholique croit que la victoire du Christ sur la mort a déjà pour effet un lien réel de solidarité entre les vivants et les défunts. Les vivants prient Dieu en faveur d’un disparu ; les morts n’oublient pas ceux qui leur sont chers et, s’ils sont saints, la beauté divine qu’ils contemplent profite mystérieusement aux autres qui attendent de voir Dieu.

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