Ouverture de la session d’évaluation et de perspectives dans la lutte contre les violences sexuelles dans l’Église, par Mgr Eric de Moulins-Beaufort, le 31 mars 2025

Mgr de Moulins-Beaufort, archevêque de Reims et Président de la CEF, ouvre la session d’évaluation des mesures prises contre les violences sexuelles

Mesdames et Messieurs, Frères et Sœurs,

Mes Sœurs, Pères, vous toutes et tous ici présents,

Avant tout, je voudrais au nom des évêques de France réunis par cette session d’évaluation et de perspectives dans la lutte contre les violences dans l’Église, vous remercier.

Vous avez pris sur bien d’autres activités pour répondre à notre invitation. Votre présence est pour nous un encouragement et une exigence.

Lors de l’assemblée plénière de novembre 2021 qui a suivi la remise par la CIASE de son rapport, nous, évêques avions décidé, à côté de premières mesures importantes, la constitution de groupes de travail chargés de nous aider à intégrer dans le fonctionnement concret de notre Église en France, dans nos diocèses et nos paroisses, dans les mouvements les recommandations de la Commission. Ces groupes de travail nous ont remis leurs rapports lors de l’assemblée de mars 2023, après des mois d’intenses travaux, réflexions et échanges. Nous autres évêques avons accueilli ce que nous pouvions de leurs préconisations qui nous étaient faites, et nous nous étions engagés par un vote à faire le point deux ans après.

Nous y sommes.

Notre intention, pendant ce jour et demi, est de mesurer le chemin parcouru, et de tracer des perspectives pour la suite.

Des pas ont été franchis, des décisions ont été prises et sont mises en œuvre ; d’autres sont encore en attente d’un début sérieux de réalisation. Toutes doivent être poursuivies, approfondies, affinées. Depuis l’an 2000 et le premier livret « Lutter contre la pédophilie » s’implante une culture de la vigilance et de la bientraitance dont nous voulons qu’elle soit celle de toutes nos instances ecclésiales, – pas seulement de la bienveillance, de la bientraitance, mais aussi d’une vigilance éclairée, lucide, tant nous avons collectivement découvert des continents de violence possible – pas non plus de la seule vigilance qui pourrait tourner à la paranoïa et à la paralysie. Nous travaillons pour que cette culture nouvelle habite les esprits et les cœurs des catholiques de France.  Que tous se considèrent comme co-responsables de cette culture. Sur ce plan encore, le chemin est ouvert, il est entamé mais il est loin d’être achevé.

Parmi vous, parmi nous ce matin, sont aussi des personnes victimes. Plusieurs appartiennent à des collectifs qui travaillent avec la Conférence des évêques depuis longtemps, depuis 2016 au moins. Je voudrais les remercier très spécialement. Leur décision de nous parler, de travailler avec nous leur a parfois valu du mépris. Ils et elles nous ont puissamment aidés. Pour nous, ces personnes sont passées de victimes à témoins. D’autres ont été invités en raison de leur action plus récente ou de l’urgence des causes qu’ils ou elles portent. Je les remercie d’accepter de travailler avec nous pendant ces jours.

Nous avons souhaité que chaque évêque puisse venir avec un invité de son diocèse et que chaque province envoie un prêtre et un diacre. Tous les membres du peuple de Dieu, nous en avons pris conscience de plus en plus, sont des acteurs nécessaires des transformations de structure ou de fonctionnement et, plus encore, de mentalité, qui sont nécessaires. Tous doivent réaliser que la relation éducative ou la relation d’autorité peuvent se transformer en relation de prédation sexuelle ou d’emprise. Vous arrivez, les uns et les autres, avec une connaissance différente du sujet qui nous occupe. Certaines ou certains, d’entre vous, ont été choisis parce qu’ils ou elles agissaient dans leur diocèse pour l’écoute des personnes victimes et leur accompagnement ou bien pour la formation des acteurs pastoraux, par exemple. Il n’est pas exclu que tel ou tel se demande pourquoi il ou elle a été ainsi appelé. Puissent ces quelques heures passées ensemble vous aider à entrer plus avant dans la gravité et les enjeux de cette lutte contre les violences. Puissent-elles aussi vous aider à comprendre le chemin entamé par les évêques pour mieux nous encourager et nous stimuler.

Parmi nous sont aussi les responsables de l’INIRR, Mme Marie Derain de Vaucresson et de la CRR, M. Antoine Garapon, et quelques personnes qui travaillent pour ces instances. Avec nous aussi le président du Fonds Selam, M. Gilles Vermot-Desroches et M. Alain Christnacht qui conduit depuis des années maintenant pour aider les évêques la Commission nationale d’expertise. Avec nous aussi, les membres du TPCN. Notre gratitude à leur égard est grande. Je les remercie de participer à ce moment d’évaluation et de perspectives.

Enfin, il y a aussi parmi vous quelques personnes qui furent membres des différents groupes de travail par lesquels notre engagement après la réception du rapport de la CIASE a pris une forme concrète. Il y a aussi des experts du traitement des violences dans différentes sphères de la société, ou selon des points de vue divers. Vous découvrirez la diversité des compétences et des qualifications réunies.

Nous procèderons pendant ces trois demi-journées par une série de tables-rondes. Chacune sera animée par un journaliste de la presse catholique. Les uns et les autres ont accepté de nous aider. Dans leur métier, ces journalistes ont dû découvrir le fait terrible de la présence de violences sexuelles dans l’Église. Ils ont dû en rendre compte. Leur présence pour nous aider à faire le point et à ouvrir des perspectives est précieuse. Notre session comportera aussi un temps d’ateliers pendant lesquels il s’agira de travailler ensemble pour améliorer ou fortifier quelques actions. Ce soir, nous bénéficierons du spectacle d’Olivier Savignac ; ce moment de ciné-concert mixant musique et vidéo qui sera une belle manière d’entrer plus avant dans la réalité de la violence sexuelle. Ces trois demi-journées seront conduites par un journaliste bien connu sans doute de la plupart d’entre vous, Éric Pailler, qui est rédacteur en chef du Jour du Seigneur. Il a accepté de tenir le fil rouge de ces trente-six heures. Ce n’est pas un petit service qu’il nous rend. Je vais le laisser vous présenter le programme et l’expliquer.

Permettez-moi une invitation et deux précisions.

Invitation à parler en vérité. Une vingtaine de personnes au total parleront dans les tables rondes. Nous ne leur demandons rien d’autre que de dire simplement ce qu’il leur paraît important de dire pour le bien de tous, des personnes victimes, de notre société, de l’Église en France et ailleurs. Il sera possible, si nous tenons bien les horaires, de vous donner la parole. Que chacune et chacun se sente libre de dire ce qu’il porte, ce qu’elle porte. Il convient de le dire de manière à ce que cela soit reçu, mais de tout cœur, je veux insister sur le fait que nous, évêques, sommes désireux d’entendre ce que vous, qui représentez à bien des égards le peuple de Dieu au service de qui nous sommes envoyés, avez à nous dire.

Et deux précisions.

Tout d’abord, pour rendre compte vraiment de tout ce qui se fait dans l’Église, sont associés ici la Conférence des évêques et la CORREF. Je remercie sœur Véronique Margron, présidente de la CORREF, et les membres du bureau qui sont ici. Je remercie les religieuses et les religieux ici présents. La CORREF a aussi ses échéances que nous suivrons de près. Nous avons été fortifiés, en France, de marcher ensemble et quasiment d’un même pas. En revanche, l’actualité fait apparaître un manque certain : l’enseignement catholique est ici insuffisamment représenté, même si je salue son secrétaire général, M. Philippe Delorme. Dans la conscience du travail qui reste à faire, Mgr Vincent Jordy, le P. Hugues de Woillemont et moi-même avons rencontré hier dimanche ici à Lourdes M. Alain Esquerre et M. Pascal Gely, du collectif des personnes victimes à Bétharram, dont le combat en vue de la prévention, de l’accompagnement des personnes victimes et de la vigilance, est désormais bien connu.

Enfin, une séquence avait été prévue à propos du Saint-Siège. Il n’a pas été possible de l’organiser. Il aurait fallu y consacrer plus de temps que nous ne pouvions en offrir. Il aurait fallu aussi associer d’autres Conférences épiscopales. Nous, évêques de France, ne pouvons répondre au nom des Dicastères romains. Comme président de la Conférence, avec les vice-présidents, le secrétaire général, avec aussi Mgr Thibault Verny, président du Conseil de Lutte contre la Pédophilie de notre Conférence et membre de la Commission pontificale pour la protection des mineurs, je peux attester que nous avons toujours été reçus avec attention et soutenus dans nos efforts. Je salue ici la présence du Nonce apostolique, Mgr Celestino Migliore, qui est ici en France une expression encourageante de la proximité de l’évêque de Rome. Permettez-moi de saluer ici aussi Mme Florence Mangin, Ambassadrice de France près le Saint-Siège. Sa présence parmi nous avec celle de beaucoup de vous atteste que nous ne menons pas cette session entre nous, mais devant et avec aussi les institutions de notre pays et toutes les institutions qui peuvent être engagées dans la lutte contre les violences.

Chers amis, si vous me permettez de vous qualifier ainsi, encore une fois, au nom des évêques, merci de votre présence, merci d’avoir accepté de participer au travail de ces jours. Puissiez-vous en repartir avec le sentiment que votre participation à chacune et chacun et à tous était importante et pourra porter du fruit. Je laisse M. Éric Pailler vous présenter le fil de ces journées.

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