Troisième congrégation de la seconde Assemblée spéciale pour l’Afrique

La troisième Congrégation générale de la seconde Assemblée spéciale pour l’Afrique s’est déroulée ce mardi 6 octobre sous la présidence du Cardinal Wilfrid Fox Napier et en présence du Pape (226 Pères synodaux présents). En ouverture, remerciant Benoît XVI de l’avoir invité, est intervenu SS Abuna Paulus, Patriarche orthodoxe d’Ethiopie: « Nous avons le devoir d’exercer la responsabilité de chefs religieux dans la recherche et le soutien de ce qui est nécessaire aux Eglises, de recevoir les suggestions de nos peuples et de les rejeter si elles sont contraires au respect et à l’amour de la personne ».
Le Pape a brièvement répondu à l’intervention du patriarche orthodoxe: « Votre présence -a-t-il dit- est un témoignage éloquent des antiques et riches traditions de l’Eglise d’Afrique… La fidélité de votre peuple à l’Evangile continue d’être montrée, non seulement pour son obéissance à cette loi d’amour, mais aussi, comme vous nous l’avez rappelé, par sa persévérance jusqu’à la persécution et le sacrifice suprême du martyre au nom du Christ ». Il rappelé que le Patriarche éthiopien avait souligné « que la proclamation de l’Evangile ne peut être séparée de l’engagement à construire une société conforme à la volonté de Dieu, respectueuse des dons de la création et protectrice de la dignité et de l’innocence de tous ses enfants. Nous savons que, dans le Christ, la réconciliation est possible, la justice peut prévaloir, la paix peut perdurer! Voilà le message d’espérance que nous sommes appelés à proclamer. Voilà la promesse que le peuple africain souhaite voir s’accomplir aujourd’hui ». Après l’intervention du Pape les travaux ont repris.

Voici quelques extraits d’interventions de Pères synodaux:
 

Le cardinal Angelo Sodano, doyen du college cardinalice:
« Nous voyons aujourd’hui plus clairement l’importance des désastres provoqués par le nationalisme et par l’exaltation du concept de race… Comment oublier également qu’en Afrique la furie homicide entre différents groupes ethniques a bouleversé des pays entiers?… Je crois que nous devrions répéter à tous, avec une plus grande insistance, que l’amour de sa propre nation (de manière concrète, envers son peuple) est certainement un devoir pour le chrétien, mais nous devrions également ajouter que la déviance du nationalisme est totalement antichrétienne… Le christianisme a favorisé le regroupement des personnes d’une région déterminée, en créant le concept de peuple ou de nation ayant une identité culturelle propre. Le christianisme a cependant toujours condamné toute déformation de ce concept de nation, une déformation qui se transformait souvent en nationalisme voire en racisme, véritable négation de l’universalisme chrétien. En réalité, les deux principes fondamentaux de la coexistence humaine chrétienne ont toujours été les suivants: la dignité de toute personne humaine d’une part et l’unité du genre humain de l’autre. Il s’agit des deux frontières insurmontables à l’intérieur desquelles peuvent évoluer les différents concepts de nation, en fonction des temps et des lieux… Les 53 nations existant actuellement en Afrique auront un grand avenir dans le concert des 192 nations qui composent aujourd’hui l’ensemble de la famille humaine, dès lors qu’elles sauront dépasser leurs divisions et coopérer conjointement au progrès matériel et spirituel de leurs peuples ».

Le cardinal Polycarp Pengo, archevêque de Dar-es-salaam (Tanzanie), président du Symposium des Conférences épiscopales d’Afrique et Madagascar:

« Le thème de ce synode est une priorité aujourd’hui pour l’Eglise en Afrique. Pour développer et approfondir ce thème, il faut aborder ouvertement certaines questions et les accompagner des directives pastorales correspondantes: les problèmes comme l’égoïsme, l’avidité et la richesse matérielle, les questions ethniques qui s’achèvent en conflits et les autres causes qui empêchent la paix dans de nombreuses sociétés africaines. La guerre et les conflits qui affligent notre continent divisent nos peuples, propagent une culture de violence et de destruction du tissu spirituel, social et moral de nos sociétés. Il est triste d’admettre que certains de nos pasteurs ont été accusés d’être impliqués par omission ou par une participation directe dans ces conflits. Dans ce synode, nous devons avoir le courage de dénoncer, même à notre encontre, les abus du rôle et de la pratique du pouvoir, du tribalisme, de l’ethnocentrisme, la prise à partie politique de chefs religieux, etc. L’Eglise en Afrique ne pourra pas s’exprimer à l’unisson sur la réconciliation, la justice et la paix, tant que feront défaut l’unité et la communion correspondante, ainsi que le respect dû au SECAM par les évêques ou Conférences épiscopales nationales ou régionales ».

Mgr.Fidele Agbatchi, évêque de Parakou (Benin):
« Les Pères synodaux voient donc… comment fonder exégétiquement et théologiquement la réconciliation, la justice et la paix sur l’unique Dieu Trinité et sur son œuvre au cours de la Révélation…jusqu’au jour du Fils de l’Homme. Une telle entreprise des Pères synodaux aiderait l’Afrique à prendre sa responsabilité historique devant l’Evangile qu’elle a reçu et qu’elle a le devoir de se donner en se situant résolument dans la dynamique de la Metanoia. Cette responsabilité la conduirait à se libérer de la peur. De fait, l’Afrique a peur et vit de peur. Gardant jalousement pour elle les conclusions de ses découvertes sur le monde et la nature, elle se laisse naturellement aller à la méfiance, au soupçon, à l’attitude d’auto-défense, à l’agression, au charlatanisme…et au syncrétisme, autant de choses qui contribuent à obnubiler la recherche du vrai Dieu pendant des millénaires. Combien est attendu alors sur ce continent, mère de tous, l’éclat plus radieux encore de la lumière du Christ mort et ressuscité! Ce que je souhaite à ce Synode, c’est un avenir pascal et, après ses souffrances, la résurrection de l’Afrique ».

Mgr.Maroun Elias Lahham, évêque de Tunis (Tunisie):
« La spécificité des relations islamo-chrétiennes dans les Eglises de l’Afrique du Nord peut enrichir les expériences de dialogue vécues ailleurs (en Europe ou en Afrique subsaharienne) et désamorcer les réactions de peur et de refus de l’Islam qu’on commence à ressentir dans certains pays. Nous savons tous que la peur est une mauvaise conseillère… Deux propositions: Que le synode pour le Moyen Orient prévu pour octobre 2010 comprenne aussi les diocèses de l’Afrique du Nord, surtout en ce qui concerne les minorités chrétiennes et les rapports et le dialogue avec l’Islam. Un colloque sur l’Islam en Afrique et qui tienne compte de la variété des expériences africaines, allant de Tunis jusqu’à Johannesburg ».