Le diocèse de Bayeux-Lisieux s’apprête à commémorer le 75e anniversaire du Débarquement des Alliés en Normandie
A l’approche des commémorations du 75e anniversaire du Débarquement des Alliés en Normandie, le 6 juin 1944, rencontre avec le Père Laurent Berthout, délégué épiscopal à l’information du diocèse et curé de la paroisse de la Sainte-Trinité de Caen.
Le diocèse participera à de nombreuses cérémonies œcuméniques à Colleville-Montgomery, Ouistreham ou à l’Abbaye-aux-Hommes (Caen)… Comment s’organisent les derniers préparatifs à quelques jours des grandes cérémonies ?
Les préparatifs vont bon train, plus ou moins stressants selon les lieux et les enjeux de la cérémonie. A la cathédrale de Bayeux, il ne faut pas perdre le fil des réunions de sécurité et du protocole qui engagent le bien des vétérans et des personnalités VIP nationales et internationales invitées. Le protocole, ce n’est pas superficiel, c’est organiser la fluidité des relations humaines dans le respect de la fonction de chacun. Au cœur de ces réunions techniques et politiques, il ne faut pas oublier les enjeux essentiels qui sont d’une part d’accueillir et d’honorer les vétérans, et d’autre part prier ensemble dans la beauté d’une liturgie œcuménique avec les différents intervenants que sont le chœur de la cathédrale de Hereford ou le band militaire.Là aussi, il faut tenir compte des cultures et des sensibilités différentes avec la présidence d’une prière anglicane par un cardinal catholique. Tout se joue parfois dans les détails. C’est plus simple à l’église Saint-Etienne de Caen.
Les enjeux sont importants sur le plan spirituel : un beau Te Deum solennel se répète, l’accueil du Cardinal Ouellet et d’autres évêques catholiques ou anglicans ne s’improvise pas de l’église au presbytère, de la prière au déjeuner qui suit. A Colleville-Montgomery, le contact humain avec les vétérans, les militaires et la population civile est plus proche, car c’est à la fois protocolaire et décontracté. Dans tous les cas se sont des équipes, des rencontres, des exigences, des surprises, de la rigueur et de l’improvisation. Le D-Day, c’est une mémoire et des célébrations qui transmettent un flambeau de paix et de fraternité. Les jeunes sont invités à prendre le flambeau de la paix et de la liberté en mains avec toute leur énergie, leur enthousiasme et leur créativité.
Quel impact aura cet évènement sur le diocèse ?
Le diocèse de Bayeux et Lisieux vit un autre rythme humain pendant les 100 jours des commémorations du Débarquement et de la Bataille de Normandie. Nous avons une responsabilité humaine et spirituelle. En Normandie, il s’agit d’une mémoire vivante, incarnée qui cherche tant à comprendre les événements qu’à en faire mémoire. Il s’agit de célébrer et de transmettre, d’où la place qui est de plus en plus donnée aux jeunes pour qu’ils s’engagent dans le développement d’une paix durable. Comme prêtres, nous sommes invités à présider des offices importants ou à être tout simplement présents dans les cimetières ou devant les stèles. C’est important, nous témoignons que toute paix vient de Dieu dans la justice et le pardon.
Vous participerez à la 2e édition du Forum mondial pour la paix : « Les Faiseurs de paix » le 4 et 5 juin puis aux vêpres œcuméniques pour la paix avec le chœur. Pourquoi est-il encore important de prier pour la paix et la liberté ? Quelles messages souhaitez-vous transmettre aux générations futures ?
Il est important de prier pour la paix, parce que c’est un trésor fragile qui va au-delà de l’absence de conflits. Être des bâtisseurs de paix suppose une soif de justice sociale, politique, économique et écologique, et la liberté de penser et de croire. Être bâtisseur de paix dans la justice suppose un pardon mutuel. Il y a des blessures qui sont tellement longues à guérir qu’elles sont encore une colère des cœurs. Cela suppose un travail de mémoire historique, un travail de compréhension des enjeux d’aujourd’hui pour répondre aux défis actuels, un travail de fraternité ainsi qu’un approfondissement spirituel, théologique et moral.
Il faut sans cesse prier pour les victimes des conflits d’hier et d’aujourd’hui, prier pour les décideurs, pour les militaires, les journalistes, les soignants. A la veille de Pentecôte, c’est véritablement important de demander les différents dons de l’Esprit, qui console, défend, guérit, mobilise les savoir-être et les savoir-faire.
Extrait de l’interview de Monseigneur Jean-Claude Boulanger, évêque de Bayeux-Lisieux retransmises sur RCF Calvados-Manche et réalisée par Alexandre Barbé du diocèse de Bayeux-Lisieux.
La paix
» Nous avons connu presque 75 ans de guerre (1870-1945) et que nous venons de vivre 75 ans de paix. Il y a un enjeu pour les 75 ans futurs. Seront-ils de guerre ou seront-ils de paix ? La paix, on la construit parce que c’est une victoire sur la violence. Aujourd’hui on voit bien une montée de violence. Nous sommes loin […] de la Seconde Guerre mondiale. Quelque part, pour les chrétiens, il y a un enjeu énorme. La paix n’est pas naturelle. C’est la violence qui est au cœur de l’humanité. Depuis toujours la genèse nous le montre avec Caïn qui tue Abel. Nous espérons qu’il y aura beaucoup de monde à la conférence du Cardinal Ouellet et qu’il nous sensibilisera à cet enjeu pour la paix. »
La cérémonie commémorative à la cathédrale de Bayeux
« C’est une cérémonie où nous rendons hommage à tous les vétérans et surtout à tous les disparus. Nous nous associons à une célébration œcuménique avec nos amis britanniques. C’est même une cérémonie organisée par les Britanniques. Il est important que toutes les nations soient représentées au sein de la cathédrale de Bayeux à travers les drapeaux. Cette cérémonie au caractère civil et religieux est un temps de prières pour les chrétiens pour la paix ».
Les grandes dernières cérémonies commémoratives et les vétérans
« Ces évènements m’ont impressionné et marqué. Je sens en particulier de part des Américains et des Britanniques combien la présence des vétérans [constituent] leurs mémoires. Ils ont accepté de donner leurs vies pour nous libérer des forces obscures du nazisme. Nombre d’entre eux n’avaient pas 20 ans. Les jeunes sont venus des Etats-Unis ou Grande-Bretagne pour nous libérer et ça mérite notre reconnaissance. Les Américains sont attachés à la mémoire de leurs ancêtres décédés. »