« La mission transforme les cœurs : c’est ma joie ! »

Jean-Marie Parrat, 38 ans, fête ses six ans de sacerdoce le 24 juin prochain. Diplômé de l’école des Beaux-Arts d’Angers, il est actuellement vicaire de la paroisse Saint-Paul à La Roche-sur-Yon (diocèse de Luçon), aumônier diocésain des étudiants et responsable du service diocésain des vocations. Par Florence de Maistre.

 Qu’est-ce qui caractérise votre ministère ?

parrat-1Prêtre, j’exerce trois ministères. Je suis vicaire de la paroisse Saint-Paul à La Roche-sur-Yon (85) depuis mon ordination sacerdotale, il y a six ans. C’est mon ministère le plus stable. C’est le lieu où je vis la fraternité. J’habite en communauté avec six frères prêtres de 36 à 60 ans, c’est une grâce ! C’est là aussi que je rencontre le peuple de Dieu, comme tout prêtre dans la célébration des sacrements. J’accompagne particulièrement les catéchumènes et les adultes qui redécouvrent la foi.

Après avoir été aumônier diocésain de l’enseignement catholique, je suis depuis trois ans, aumônier diocésain des étudiants avec le double rôle de coordination et d’animation auprès des 5500 étudiants du département. Je rencontre tous les milieux, tous les publics, les midis et en soirée. L’idée est de toucher largement les jeunes au-delà des cercles des cathos conquis ou en recherche. Les propositions sont riches et nombreuses : soirées à thème, missions d’évangélisation, formation, approfondissement spirituel. Enfin, depuis deux ans, je suis responsable des vocations, en particulier de deux parcours de discernement vocationnel. L’un pour les hommes, l’autre pour les femmes, jeunes professionnels ou étudiants. Ils comptent cinquante-sept participants. Chacun des cycles mobilise un week-end par mois d’octobre à mai. C’est exigeant, mais il faut du temps pour accepter d’être vraiment disponible à Dieu.

Vous vivez vos missions avec passion, ne risquez-vous pas l’épuisement ?

J’essaie de conserver le lundi comme jour de repos. En réalité, je prends une fois par mois un temps de désert et je m’autorise une heure de détente par jour : piscine, peinture, ou autre. Je suis prêtre diocésain et membre depuis peu de la compagnie sacerdotale saint Jean-Paul II, une association de droit diocésain fondée par Mgr Alain Castet (évêque émérite de Luçon), qui s’inspire de la spiritualité de saint Louis-Marie Grignion de Montfort et des saints du Carmel. Aussi, je me suis engagé à vivre quotidiennement l’oraison silence, ce qui m’aide à tenir dans l’hyperactivité. J’écoute aussi mes frères prêtres qui peuvent me tempérer ou m’alerter à un moment donné. La vie communautaire est un véritable garde-fou ! Il y a aussi d’autres dangers. J’essaie d’agir avec générosité, le sacerdoce est don de soi. Mais le risque de la séduction, d’être un prêtre à la mode est un enjeu, pour moi, de conversion personnelle. C’est d’abord Dieu qui est à l’œuvre, pas moi ! Autre difficulté : la mission, tout comme la prière, doit être un choix permanent. On peut facilement être dans une bonne organisation, dans un fonctionnalisme et oublier d’aller plus loin. Dans notre paroisse, le curé organise un festival missionnaire : cela demande beaucoup d’énergie, sans garantie de résultat. C’est très inconfortable. Chez le baptisé, prêtre, prophète et roi, le prophète est celui que l’on perd le plus vite ! On peut tout à fait être gestionnaire et prêtre, mais aller vers l’imprévu et l’inconnu est nécessaire et capital !

parrat2Quelles sont vos grandes joies ?

J’accueille mes ministère dans la foi, je n’avais rien prévu. Ils me remplissent de joie, en particulier le discernement des vocations et les conversions dont je suis témoin. J’ai eu la grâce de baptiser plusieurs musulmans depuis mon ordination et j’ai vu de nombreux adultes redécouvrir la foi. Voir Dieu agir bien au-delà de nous-même, voir Dieu œuvrer au niveau des conversions, des demande de sacrement, des découvertes personnelles : voilà les éléments de ma plus grande joie ! J’assiste aussi à ce que qu’on pourrait appeler des conversions missionnaires de laïcs déjà engagés, de religieux et religieuses, de prêtres. Lorsque j’invite l’un ou l’autre à participer à une séance du cycle vocationnel ou du catéchuménat, que l’on accueille et rencontre un immigré, un sans papier, une personne d’une toute autre culture, je vois chez mes frères une souplesse. J’ai la joie de voir en peu de temps l’évolution et le goût pour la dimension missionnaire, en famille et en Église. La mission transforme les cœurs : c’est ma joie ! Le père d’un jeune du cycle vocationnel, venu par crainte de manipulation, m’a confié que le parcours bon pour les jeunes le serait également pour lui aussi, comme il l’est pour moi. Cela m’a beaucoup marqué. La vocation, c’est le concept unificateur d’une personne, de sa propre compréhension d’homme et de femme libre. Le parcours touche le cœur de l’homme qui cherche, de l’être. Cela fait évidement du bien !

Qu’attendez-vous du futur évêque de Luçon ?

J’accueillerai notre prochain pasteur dans la foi, quel qu’il soit. Je ne souhaite pas projeter mes propres désirs, mais être disponible au don de Dieu. J’ai à cœur d’être obéissant, fidèle et collaborateur. J’attends qu’il soit un père pour les prêtres, le peuple de Dieu, les pauvres. Qu’il donne un cap clair et l’assume. Nous traversons une crise de l’autorité institutionnelle. Mais Vatican II confère les prêtres à Jésus Christ, chef de l’Église. Je pense que l’autorité de l’évêque est nécessaire, sans père pas de repère.

Pour vous, être prêtre aujourd’hui, c’est…

C’est être un homme de Dieu dans ce monde. C’est une vie consacrée dans le célibat, la prière, la liturgie. C’est un homme qui choisit le primat de Dieu dans la société, un prophète dans le sens où il montre Dieu. « L’homme est le berger de l’être », la formule est de Heidegger. Pour moi, le prêtre est le bon pasteur, le sauveur de tous les hommes, de tout l’homme. Il est dans l’action du Christ rédempteur : c’est le berger de l’être. Frère de tous les baptisés, le prêtre exerce aussi une forme de paternité spirituelle, en particulier auprès des pauvres et des gens de la rue. Parfois même étonnamment, il aide à restaurer la figure du père auprès des jeunes.

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