Mission de la Mer : la voix des invisibles
Dimanche 3 juillet 2016, dans la baie d’Audierne (Finistère), une célébration était organisée en mémoire aux « Péris en Mer ». Un lieu de présence incontournable pour Robert Bouguéon, président de la Mission de la Mer depuis mai 2015.
« Qui est-il donc pour que même le vent et la mer lui obéissent ? » Ce dimanche, les mots et les épisodes de la Bible (Jésus et ses disciples en barque sur le lac de Tibériade) prennent pour les auditeurs une réalité et une densité plus intenses que dans tout autre lieu de célébration.
Dans l’immense criée de Poulgoazec (lieu-dit de la commune d’Audierne) transformée en chapelle des gens de mer, près de 1000 personnes sont en effet venus se recueillir, en présence des autorités civiles et militaires. Une grande famille rassemblée de façon symbolique forte, sur son lieu de travail, pour honorer ceux qui ont été victimes d’accidents ou de naufrages.
La mer bien commun de l’humanité
Dans son homélie, Mgr Laurent Dognin, évêque de Quimper et Léon, a bien sûr une lecture spirituelle du texte de l’Évangile (Matthieu 14, 22-33). Évoquant Jésus maître des éléments liquides, il déclare : « En marchant sur les eaux, Jésus montre que ce royaume des ténèbres n’a pas de pouvoir sur Lui. Cet événement a trouvé son accomplissement définitif dans le passage de Jésus de la mort à la vie. ».
L’évêque ancre ses propos dans notre humanité contemporaine en citant et commentant l’encyclique du Pape François Laudate Si’ sur la sauvegarde de la Création : « Dans le monde, il y a des gens qui ne voient dans la mer qu’un écosystème ou qu’une source de profit. Mais on ne peut pas privatiser la mer, elle est un bien commun de toute l’humanité ! […] Les pêcheurs vivent pleinement ce lien avec la création, notamment dans la pêche artisanale, c’est pourquoi ils sont en mesure de préserver la mer et de nous alerter sur ce qui l’abîme car ils la connaissent mieux que quiconque. Ils le font concrètement en prenant les moyens de protéger la réserve halieutique d’une part, mais également en étant témoins directs de la pollution des océans voir même des changements climatiques avec les déplacements des espèces ».
Les intentions de prière élargissent encore davantage la célébration à ce qui est vécu dans l’actualité. Une prière est en effet consacrée aux sauveteurs en mer « ceux qui se mettent au service de leur prochain sur cette côte où ils sont les garants de notre sécurité », une prière d’action de grâce remercie le Seigneur pour « cette mer magnifique pour nos vacances, nos loisirs et comme cadre de vie ». Quant aux migrants noyés parce qu’ils sont « à la recherche d’un monde plus humain », ils ne sont pas oubliés.
À la fin de la messe, à la tête d’une procession avec 4 enfants en tenue de mousse portant un mini-bateau, l’évêque se dirige avec les familles des victimes vers la stèle des Péris en Mer derrière laquelle, sur un mur de plaques en marbre noir, sont gravés en lettres dorées les noms des personnes qui ont péri, ont disparu ou sont décédées. Tandis que retentit le chant poignant « Astre béni du marin, conduis ma barque au rivage garde-moi de tout naufrage Blanche étoile du Matin ».
C’est après avoir béni les flots et les travailleurs de la mer que l’évêque embarque alors à bord du bateau de la SNSM (Société Nationale Sauvetage en Mer) de la baie d’Audierne pour jeter au large une gerbe.
Une vision mondialisée
Pendant ce temps, Robert Bouguéon salue nombre d’amis et de connaissances. Dans la mesure de ses possibilités il s’efforce d’être présent à ce type d’événements autant qu’aux réunions des équipes régionales de la Mission de la Mer disséminées sur tout le littoral. Pour cet ancien marin-pêcheur sur un chalutier ; élu communal qui plus est, la priorité est d’« aller sur le terrain et qu’on soit dans l’action ». L’action signifie pour lui tout un ensemble qui tourne autour de la notion de « mer nourricière plutôt que d’espace de jeux ». Un ensemble qui comprend autant la défense de la pêche artisanale, que la préservation des ressources halieutiques et le soutien des droits des marins étrangers (qui « reçoivent des salaires de misère et restent parfois 9 mois en mer sans rentrer»). Ayant eu la chance de se rendre au Chili avec les élèves d’un lycée maritime et de vivre plusieurs missions humanitaires au Sri Lanka, Robert Bouguéon a du rôle de l’Église dans ce monde une vue mondialisée. Il estime particulièrement « important d’avoir toujours un regard tourné vers l’extérieur » et travaille sur le projet d’ un voyage au Sénégal et en Indonésie avec le CCFD-Terre Solidaire. C’est la raison pour laquelle la Mission de la Mer a aidé au financement participatif du film Océans, la voix des invisibles de la réalisatrice Mathilde Jounot. Elle tiendra également un stand au départ du 8ème Vendée Globe le 6 novembre aux Sables d’Olonne.
La présence de l’Église au monde maritime
La Mission de la mer est un mouvement chrétien qui a pour but le bien spirituel, moral et social et le service fraternel des gens de mer de toutes nationalités et de leurs familles. L´appellation « Mission de la Mer » fut utilisée à partir de 1945 : c´était une aumônerie générale des gens de mer, pêche et commerce. Son organisation actuelle, en association loi 1901, date de 1951. La Mission de la mer est rattachée
– au niveau mondial : à l´Apostolat de la Mer (Apostolatus Maris), Conseil pontifical de la pastorale des migrants et itinérants, à Rome,
– au niveau national : à la Conférence des évêques de France, Service national de la pastorale des migrants et itinérants, présidé par Mgr Laurent Dognin, évêque de Quimper et Léon.