P. Fernand Portal (1855-1926)
Faire tomber les préjugés
À la fois fils spirituel de saint Vincent de Paul et pionnier de l’œcuménisme, ce prêtre lazariste a consacré sa vie à l’unité des chrétiens tout en ancrant ses convictions dans l’action sociale auprès des plus pauvres.
Les diocèses de Savoie célèbrent en 2005 le l50e anniversaire de la naissance de Fernand Portal et en 2006 le 80e anniversaire de sa mort. Le père Fernand Portal est inhumé dans un village proche d’Aix-les-Bains, à Pugny-Chatenod, dans la chapelle de l’Unité, confiée actuellement aux petites sœurs de Bethléem. Il a beaucoup fréquenté la Maison des Corbières, à quelques mètres de là. Il a fondé aussi, plus bas dans le même village, la Maison Saint-Vincent où vivent actuellement les sœurs du Christ Rédempteur.
Monsieur Portal, lazariste, a consacré sa vie à l’unité des chrétiens. Il en a découvert l’impérieuse nécessité, d’abord à travers les relations amicales qu’il a nouées avec des anglicans (en particulier Lord Halifax), mettant alors beaucoup d’espoir dans le courant « unioniste ».
Son rôle de formateur dans différents séminaires l’a mis au contact de jeunes intellectuels, prêtres ou laïcs, avec lesquels il a développé des cercles d’études religieuses. Il a dirigé des revues dont le but était la connaissance approfondie des Églises, n’hésitant pas à prendre également hors de l’Église catholique des correspondants de haut niveau (anglicans, orthodoxes et protestants). Son premier but était de faire tomber les préjugés. Ce besoin de réflexion lui paraissait indispensable à un moment (début du XXe siècle) où le langage religieux n’était plus compris par tout le monde. Il a notamment été le guide des « talas » à l’École normale supérieure de Paris (ceux qui vont-à-la-messe !…) parmi lesquels on peut citer Marcel Legaut, Jean Guitton…
Fortement inspiré par la spiritualité de saint Vincent de Paul, ce lazariste a également ancré ses convictions dans l’action sociale auprès des plus pauvres, s’entourant pour cela de quelques femmes laïques. Dans le quartier de Javel, ces femmes vivaient au milieu des plus déshérités, comme eux, dans un esprit d’ouverture, de générosité, de respect, qui ont fait l’admiration de leurs plus farouches ennemis de la première heure. L’orphelinat de la Maison des Corbières a été leur œuvre.
Tantôt largement soutenu, tantôt combattu, parfois relégué, Fernand Portal sut, dans l’obéissance, persévérer dans sa tâche, arrivant à la fin de sa vie à lancer les conversations de Malines avec le cardinal Mercier. Il sut également évoluer dans ses idées et passer d’une conception « unioniste » à une véritable approche œcuménique.
Il est donc normal que le diocèse de Chambéry célèbre en 2005-2006 une Année Portal, et que la commission diocésaine, aidée des différents groupes œcuméniques de la région, mobilise toute son énergie pour rendre hommage à ce très humble, mais très grand pionnier.
Mgr Laurent Ulrich
Atchevêque de Lille