Homélie du dimanche 20 février

Dimanche 20 février 2022

7e dimanche du Temps ordinaire

Références bibliques :

Lecture du premier livre de Samuel : 26. 7 à 23 : “Je n’ai pas voulu porter la main sur le roi qui a reçu l’onction du Seigneur.”
Psaume 102 : “Le Seigneur te couronne d’amour et de tendresse.”
Saint Paul. 1ère lettre aux Corinthiens : 15. 45 à 49: “Le Christ est devenu l’être spirituel qui donne la vie.”
Evangile selon saint Luc : 6. 27 à 38 :”Vous serez les fils du Très-Haut, car il est bon pour les ingrats et les méchants.”

***

C’est un appel à la sainteté qu’il nous est donné d’entendre aujourd’hui; d’une sainteté qui n’est pas fondée sur le rigorisme de notre vie personnelle, mais sur l’adéquation de notre réponse à l’amour que Dieu nous porte. C’est à la manière divine que nous devons aimer, tous nos frères, tous nos ennemis, tous les ingrats et tous les méchants. “Soyez miséricordieux comme votre Père est miséricordieux.”

Si nous voulons devenir, selon l’expression de l’offertoire, « participants de la divinité de celui qui a pris notre humanité », c’est ainsi que nous devons participer pleinement à l’amour de Dieu. Pleinement… “une mesure bien tassée.” “Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait.” (Saint Matthieu 5. 48). “Soyez saints car je suis saint, moi, le Seigneur votre Dieu.” (Lévitique 19. 2), « miséricordieux comme votre Père est miséricordieux ».

RESPECTER L’AUTRE QUI EST MARQUE PAR DIEU

L’épisode biblique de David et de Saül se termine par cette parole: “Celui qui a reçu l’onction de Dieu.” (1 Sam. 2. 23) Pour nous, il y va de tous les hommes et non d’un seul. Tous sont aimés de la même intensité infinie par Dieu. C’est cela la dignité, l’onction, que Dieu confère à tout homme. Nous avons à la reconnaître en vivant de l’amour de Dieu.

Ce n’est pas à notre jugement de conférer cette dignité et de dire qu’un autre être humain est moins humain que moi et moins digne de l’amour que Dieu me demande de lui porter. Ni les origines, ni la race, ni la classe sociale, ni sa faiblesse, si son infirmité, ni ses fautes ne sont la mesure de l’amour que chacun a reçu de Dieu et que nous devons partager avec “l’autre” qui est mon prochain et mon frère.

David est en conflit avec Saül qui veut l’assassiner. Il s’est enfui pour y  échapper, mais ce ne sera pas la force brutale et colérique de Saül qui l’emporte. C’est la crainte de Dieu car David ne craint pas les armes de Saül.

En raison de l’onction reçue par Saül, David n’entre pas dans l’engrenage de la haine et de la vengeance : tu me hais, je te hais; tu me tues, je te tue. Il compte sur le Seigneur qui rendra à chacun selon sa fidélité. L’orgueil et la miséricorde ne peuvent cohabiter. A nous de le transposer dans notre quotidien.

Nous n’avons à entrer ni dans l’engrenage du mépris ni dans celui de la haine ou de la vengeance. « Soyez saints, car que je suis saint. » (Lévitique 19.2)

UNE TENDRESSE UNIVERSELLE.

Sur le même registre, le psaume de David est un chant de louange pour les bienfaits du Seigneur, des bienfaits qui sont essentiellement spirituels. Il y a une insistance sur le pardon des péchés. La grandeur de Dieu et son amour pour les hommes s’y révèlent là tout particulièrement, au travers de plusieurs phrases, le psalmiste répète ces mots de tendresse et pitié, de tendresse et de miséricorde.

La réponse de l’homme doit être à l’image de l’attitude divine et donc aussi être celle de tout son être. Il faut relire ce psaume en son entier :”Il fait droit à tous les opprimés… il sait de quoi nous sommes pétris … son amour est de toujours à toujours … bénissez le Seigneur, vous, les ouvriers de sa parole, les ouvriers de son désir.”

Il est à noter également que le psaume commence par “je” et continue avec “nous”. Le psalmiste sait qu’il appartient au peuple de l’Alliance :”Il révéla ses bienfaits à Moïse, aux enfants d’Israël”.  (verset 7) Mais la tendresse n’est pas que pour Israël, elle est pour tous les hommes et les “armées du ciel” sont invitées à se joindre à toute l’humanité :”Bénissez toutes ses oeuvres en tous lieux de son empire.” (verset 22)

IDENTIFIE AU CHRIST.

“Il te couronne d’amour” chantait le psaume. Saint Paul nous dit en quoi cela consiste. Cette lecture de la lettre aux Corinthiens ne peut être détachée d’autres passages où il nous est rappelé qu’elle est la nature même de l’homme nouveau en Jésus-Christ. Nous sommes, tout à la fois, un être charnel et un être spirituel qui avons reçu la vie en plénitude :”Les hommes appartiennent à la terre, les hommes appartiennent au ciel.” ou, si nous suivons au mot à mot le texte grec écrit par l’apôtre lui-même :”Tirés de la terre, ensuite régis par l’Esprit, nous sommes l’icône de l’argileux et aussi l’icône du céleste.” (1 Cor. 15. 48 et 49)

Au début, saint Paul semblait opposer corps et esprit, dans le mystère de la résurrection. En fait, il n’y a pas d’opposition. Désormais c’est l’humanité qui sera à l’image du Christ glorifié. Les citations de ce dimanche sont à replacer dans le contexte : nous sommes désormais dans “l’ère chrétienne”, “l’ère de la résurrection” car le nouvel Adam est un “esprit vivifiant”, “faiseur de vie”(pneuma zoôopoïoun” en grec).

UN AMOUR SANS LIMITE.

Une fois de plus, il faut nous rappeler que saint Luc est disciple de saint Paul et que, des années durant, il l’a entendu exprimer ce qu’il rappelle aujourd’hui aux Corinthiens.

Les béatitudes sont à lire selon la “nouvelle nature humaine”, selon l’homme nouveau que nous sommes ”icône de celui qui vient du ciel” (1 Cor. 15. 49) “Vous serez les fils du Dieu Très-Haut, soyez miséricordieux autant que le Père est miséricordieux.”

Du faire, on passe à l’être. Certes, ce travail de conversion ne sera jamais achevé. Nous connaissons nos limites et nos humaines faiblesses, mais en donnant “une mesure bien pleine, bien tassée”, nous donnons à notre vie et à nos frères la mesure dont Dieu se sert pour nous. Le geste qui prend le récipient entre ses mains, et le secoue fermement pour que le grain se tasse à chaque choc, est celui-là même de Dieu à notre égard. Il nous paraît parfois dur et brutal; il est la condition pour que la mesure soit pleine et totale.

“Pardonnez et vous serez pardonnés, donnez et vous recevrez…”

***

Les deux prières de la liturgie, au début et en conclusion de la messe de ce dimanche sont d’une grande richesse par delà la simplicité tout romaine des mots : “Nous t’en prions, Dieu tout-Puissant, donne-nous de recueillir tous les fruits de salut dont ces mystères sont déjà la promesse et le gage.” (prière après la communion).

Cette eucharistie vécue est en effet un gage venant de Dieu, à nous d’en recueillir tous, tous les fruits… en “conformant à Ta volonté nos paroles et nos actes dans une inlassable recherche des biens spirituels.” (Prière d’ouverture de la messe)

 

 

année liturgique B