Homélie du dimanche 13 février

Dimanche 13 février 2022

6e dimanche du Temps ordinaire

Références bibliques :

Lecture du livre de Jérémie : 17. 5 à 8 : “Béni soit l’homme qui met sa confiance dans le Seigneur.” 
Psaume 1 : “ Il est comme un arbre planté près d’un ruisseau et qui donne du fruit en son temps.” 
Saint Paul. 1ère lettre aux Corinthiens : 15. 12 à 20 : “Le Christ est ressuscité d’entre les morts pour être parmi les morts le premier ressuscité.” 
Evangile selon saint Luc : 6. 17 à 26 :”Soyez heureux et sautez de joie, car votre récompense est grande dans le ciel.” 

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Une fois de plus, les textes de ce dimanche nous permettent des réflexions nombreuses et fort diverses, mais tous, d’une manière ou d’une autre, ils nous invitent en fait à une méditation sur le bonheur. L’attitude fondamentale de l’homme qui s’en remet à Dieu n’est pas un vague sentiment. C’est une exigence parfois douloureuse. Mais de cet abandon jaillit la paix et donc la joie.

PERSONNEL ET COMMUNAUTAIRE .

Le texte du prophète Jérémie marque une différence avec la tradition de la révélation biblique. Dans le Deutéronome, nous retrouvons les mêmes images empruntées à la vie agricole et rurale d’Israël. Nous retrouvons aussi le “tu”, mais ce mot désigne tout le peuple. En Jérémie, l’interpellation est plus directe : c’est l’homme qui met sa confiance dans le Seigneur. Chacun est appelé à faire son choix. Toute décision est redoutable dans ses conséquences, car elle entraîne l’homme au delà de lui-même.

La responsabilité est personnelle. Il en est de même dans la relation avec Dieu qui est une relation d’être vivant avec un être vivant. Celui qui s’appuie seulement sur un être de chair sera conduit à en devenir un jour malheureux. Il connaîtra comme un désert. Celui qui s’appuie sur le Seigneur peut connaître une chaleur torride, il restera avec son feuillage vert. Il nous faut nous souvenir de ce que peut représenter la chaleur destructrice dans le désert.

LE PREMIER RESSUSCITE

Reprenant alors la lettre aux Corinthiens, (15.19), nous avons à nous appuyer sur le Christ Jésus, puisque « nous avons mis notre espoir dans le Christ » par delà la mort et non “pour cette vie seulement”. C’est pourquoi nous avons à élargir nos perspectives au delà de notre vie immédiate

La tradition orientale des icônes traduit ce « par delà la mort » quand elle présente la résurrection du Seigneur d’une manière toute différente de celle de l’iconographie occidentale où le Christ se trouve soit devant le tombeau, victorieux, soit enjambant les bords de ce tombeau. La tradition orthodoxe et orientale exprime la résurrection par le Christ descendant “aux enfers” et prenant par la main les justes qui attendaient sa venue.

Ces icônes sont la transposition de cette affirmation de saint Paul dans sa lettre aux Corinthiens :”Le Christ ressuscité d’entre les mort est parmi les morts le premier ressuscité.”

UN RENVERSEMENT DES VALEURS

Les béatitudes ne sont ni une condamnation des riches, ni une assurance de la réalisation immédiate d’un bonheur matérialisé. C’est un renversement des valeurs admises. Jésus ne donne ni recettes ni solutions précises. La seule, c’est de vivre l’idéal du christianisme, c’est-à-dire vivre de Lui. Car toute la trame de ces béatitudes, en fait, c’est l’amour, la charité et non point dans des circonstances ordinaires. C’est une charité sans borne, bonté, compassion, indulgence, parce qu’elle est détachée des biens terrestres.

Heureux les pauvres …

C’est donc une invitation très forte à voir les réalités que nous vivons d’une autre manière. C’est aussi un appel à modifier notre comportement. Nous vivons dans l’illusion d’un bonheur apparent, mais qui est fondamentalement faux. La richesse des biens matériels est-elle essentielle à la paix intérieure, à la réalisation de notre personnalité selon les perspectives de ce que nous sommes en tant qu’êtres créés par Dieu. Les disciples étaient venus pour entendre Jésus. Jésus s’adresse d’abord à eux, et donc à nous qui voulons être ses disciples.

La pauvreté, selon la tradition des sages de l’Inde, est une libération si elle est vécue comme telle. D’ailleurs plusieurs théologiens chrétiens de l’Inde se sont opposés à une théologie de la libération occidentale en ce sens. Il y a certes beaucoup à nuancer les affirmations des uns comme des autres.

Il n’en reste pas moins que seul le partage apporte la paix. Quand on cherche la cause la plus profonde de tout bonheur, on ne la trouve ni dans l’argent, ni dans le luxe, ni dans le profit, ni dans la domination, ni dans la jouissance.

Chez des gens heureux, on trouve toujours à la base une forte intériorité, une joie spontanée pour les petites choses, une absence de toute envie insensée, une grande simplicité.

Heureux, vous qui êtes affamés, qui souffrez non du manque de pain, mais du manque de justice et de paix. Ceux qui veulent réaliser la paix dans une volonté de partage qui est issue de l’amour et la génère à son tour quand elle rejoint l’amour que Dieu nous porte. Il est Père. Nous devons le vivre comme les frères d’un même père.

Heureux, non pas ceux qui nivellent les difficultés, mais qui résistent à toutes les puissances de division et de haines qui sont à l’œuvre dans le monde. Heureux ceux qui n’ont pas peur de se ridiculiser pour sauvegarder l’unité et qui deviennent des sources de réconciliation et d’apaisement au cœur des inévitables tensions.

Heureux ceux qui pleurent, ceux qui sont capables de pleurer et de se réjouir avec leurs frères. Ceux qui ne connaissent pas la sécheresse de l’indifférence et qui, avant de parler, savent poser sur tout être un regard d’amour. Ceux qui n’ont pas honte de consoler et qui s’ouvrent aux cris de leurs frères parce qu’ils ont leur cœur pour unique mesure. Ceux qui, révoltés par la douleur du monde, gardent l’espérance au cœur de la souffrance.

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“Dieu qui veux habiter les coeurs droits et sincères, donne-nous de vivre selon ta grâce, alors tu pourras venir en nous pour y faire ta demeure.” (oraison d’ouverture de la messe) “Donne à tous ceux qui font ta volonté le bonheur que tu leur as promis.” (prière sur les offrandes)

 

année liturgique B