Conférence des commissions justice et paix d’Europe

Une délégation du Conseil d’Eglises Chrétiennes en France a effectué, à Jérusalem et dans quelques autres lieux d’Israël et de la Palestine, un voyage envisagé et préparé dans l’esprit que voici :Le Conseil d’Eglises Chrétiennes en France (CECEF), soucieux de marquer la solidarité des Eglises catholique, orthodoxes et protestantes en France avec les Eglises qui vivent et témoignent en Israël et Palestine au sein du conflit qui, à nouveau, embrase cette région, a souhaité envoyer une délégation pour rencontrer ces Eglises, du 8 au 13 juillet 2001.

Cette délégation conduite par le Président en exercice du CECEF, le pasteur Jean-Arnold de Clermont, président de la Fédération protestante de France, comprendra le Métropolite Jérémie, président de l¹Assemblée des évêques orthodoxes de France et co-président du CECEF et Mgr Guy Thomazeau, évêque de Beauvais, membre du Conseil Permanent de la Conférence des Evêques de France et du Conseil d¹Eglises Chrétiennes en France, représentant M. le Cardinal Louis-Marie Billé, empêché.

Le premier objectif de cette délégation est de se joindre à la prière des Eglises en Israël et Palestine pour manifester au coeur de leur vie spirituelle l¹attention, la compassion et la fraternité des Eglises en France.

Cette délégation permettra d¹écouter la voix des responsables de ces Eglises pour la faire entendre avec toute l¹attention qu¹elle mérite dans notre pays. Par les nombreux contacts qu¹elle prendra, elle soulignera l¹importance des dialogues oecuméniques et inter-religieux, dans le contexte de la recherche de la paix et de la justice.

Le Conseil d¹Eglises Chrétiennes demande aux Eglises en France de porter cette visite dans leur intercession pour qu¹elle contribue à développer La fraternité avec les Eglises en Israël et Palestine.

Paris, le 27 juin 2001
Avec le recul de plusieurs semaines, nous souhaitons faire part de quelques réflexions, que nous savons marquées nul ne peut s¹en étonner par la situation et le témoignage de nos interlocuteurs, chrétiens appartenant à diverses familles confessionnelles mais dont, comme ils le disent,  » la crise actuelle a resserré les liens « . Ils nous ont demandé avec insistance de faire écho à ce qu¹ils nous ont dit et à ce qu¹ils ont voulu nous montrer :  » Les faits vous sont connus, disaient-ils ; il vous a manqué jusqu¹à maintenant la volonté de parler. Maintenant, vous ne pouvez plus vous taire.  »

Nous avons rencontré des responsables d¹Eglises. Grâce au Near East Council of Churches (en particulier son secrétaire exécutif Ramzi Zananiri. Nous les remercions d¹avoir organisés pour nous accueil et contacts), nous sommes allés à Gaza, à Bethléem, à Jérusalem. Nous n¹avons pas tout vu et nous risquons d¹être perçus comme partisans. Mais nous n¹ignorons pas la complexité d¹une situation où, le désespoir d¹un côté, la peur de l¹autre, engendrent des actions de répression insupportables, répondant à des actions terroristes que rien ne permet de cautionner ou de justifier.

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Nous avons ressenti tout au long de ce voyage combien notre visite (comme toute visite de frères et de soeurs chrétiens) était reçue avec reconnaissance, à la fois comme manifestation de solidarité (nous savons, disaient nos interlocuteurs, que nous ne sommes pas seuls) et parce que ceux qui ont vu peuvent témoigner. Nous pensons d¹ailleurs que, même si le tourisme est incertain, de telles visites sont toujours possibles. Elles sont demandées et appréciées.

Dans cette perspective, nos Eglises pourraient susciter quelques initiatives, notamment aux temps de l¹Avent, de Noël, de la Semaine Sainte. Par exemple, par des échanges entre paroisses, ou en envoyant des délégations pour les fêtes à Bethléem, Beit Jala, GazaŠ Il s¹agit moins de se rendre  » sur les Lieux Saints  » que de rencontrer des communautés chrétiennes vivantes.

Le CECEF souhaite en retour inviter des responsables d¹Eglises d¹Israël-Palestine à constituer, dès les premiers mois de 2002, une délégation pour venir nous visiter et porter témoignage chez nous de ce qu¹ils vivent là-bas.

Notre séjour à Gaza et Beit Jala a été pour nous particulièrement marquant. A Gaza (40 % de la bande de Gaza 45 km de long sur 8 de large, 1,2 million d¹habitants dont 830.000 réfugiés est occupée par des implantations israéliennes, avec 5500 colons), nous avons eu contact avec une population stressée et sans espoir, connaissant un chômage de 53 % en même temps que toutes les conséquences psychosomatiques de l¹impossibilité de sortir. La seule perception de ce qui se passe là traduit l¹urgence absolue d¹une solution à l¹ensemble des problèmes.

Cette solution, nous savons qu¹elle est difficile à mettre en ¦uvre. Du moins sommes-nous sûrs que la spirale de la violence ne peut être stoppée que par la reconnaissance du droit qu¹a chaque peuple d¹avoir une patrie et de vivre dans la paix et la tranquillité avec les autres peuples de la région. Cela ne peut se faire que sur la base de la loi internationale et des résolutions et déclarations des Nations Unies au sujet d¹Israël-Palestine (résolutions 242 et 338 des Nations Unies. Mais aussi une 4ème convention de Genève sur les droits des civils en temps de guerre).

La question de la colonisation nous est apparue comme un point particulièrement sensible. Nous ne voyons pas quelle paix sera possible sans un arrêt de la politique de colonisation et sans qu¹un signe clair soit là-dessus donné.

Nous savons plus généralement que l’on ne peut rêver de supprimer la violence condamnable d¹où qu¹elle vienne sans s¹attaquer aux situations de violence. La paix et la sécurité sont des fruits de la justice, mais il n¹y a pas non plus de justice équitable sans désir de paix, sans pardon, et finalement sans amour. Cela, nous le tenons de notre commune référence à la Bible.

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Revenus chez nous, nous portons un certain nombre de souhaits. Ceux-ci concernent bien sûr la vie politique de notre pays où tout usage partisan du conflit israélo-palestinien doit être écarté. Nous sommes attentifs à la mise en oeuvre des engagements du gouvernement français et de l¹Union européenne, dans le respect des textes des Nations Unies et des conventions internationales, des Accords d¹Association de l¹Union européenne avec Israël et l¹autorité palestinienne.

Nous appelons une fois de plus les chrétiens de France à la solidarité concrète avec les Eglises d¹Israël-Palestine, dans tous les domaines possibles (défense des droits humains, secours d¹urgence, éducation, mouvements féminins).

Nous appelons les chrétiens de France à la prière. Nous-mêmes, dès notre arrivée le dimanche 8 juillet, nous avons pu prendre part à la prière des différentes communautés catholique, grecque-orthodoxe (de beaucoup la plus nombreuse dans le pays) et luthérienne. Pourquoi nos Eglises ne se joindraient-elles pas à la campagne internationale de veillée de prière pour la paix et la justice et la fin du conflit en Israël ?

Comment ne pas dire à quel point nous nous sentons intérieurement déchirés par ce qui se passe en Israël-Palestine, par ce conflit qui semble ne jamais finir ? Nous connaissons l¹enracinement de l¹Evangile et de la foi chrétienne dans l¹Ancien Testament. Nous redisons notre attachement au peuple juif et récusons toute forme d¹antisémitisme. Cela ne nous amène pas à approuver tout ce que fait l¹Etat d¹Israël, tout en reconnaissant son droit absolu à une vraie sécurité dans des frontières reconnues. En même temps, nous savons ce que souffrent tant de palestiniens pour lesquels nous espérons une vraie paix sur leur propre terre. Que l¹Esprit de Dieu féconde l¹action de tous ceux qui, de part et d¹autre, travaillent à l¹avènement de la paix.

Monsieur le Pasteur Jean-Arnold de Clermont
Président de la Fédération protestante de France,
Président en exercice du CECEF,
qui conduisait la délégation

Mgr Guy Thomazeau, évêque de Beauvais,
membre du Conseil Permanent de l¹épiscopat,
membre du CECEF

Mgr Jérémie, Président de l¹Assemblée
des évêques orthodoxes de France,
co-président du CECEF