Homélie du dimanche 13 novembre
Dimanche 13 novembre 2022
Trente-troisième dimanche du temps ordinaire
Références bibliques
Lecture du livre de Malachie : 3. 19 à 20 : “Le Soleil de Justice se lèvera et apportera la guérison dans son rayonnement. »
Psaume 97 : “ Acclamez le Seigneur, car il vient. »
Lecture de la seconde lettre de saint Paul aux Thessaloniciens: 3. 7 à 12 : “Qu’ils travaillent dans le calme pour manger le pain qu’ils auront gagné. »
Evangile selon saint Luc : 21. 5 à 19 : “C’est par votre persévérance que vous êtes maîtres de votre vie. »
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A partir de ce dimanche et jusqu’au premier dimanche de l’Avent, les passages de l’Evangile, y compris ceux que nous lisons en semaine d’ailleurs, concernent l’achèvement de l’Histoire. Plus que l’attente du Messie, le véritable commencement de l’Histoire est la venue du Seigneur parmi les hommes, et son achèvement de l’Histoire est le retour du Christ à la « fin des jours ».
Pour le lecteur d’aujourd’hui, cet achèvement, « le Jour du Seigneur », se lit d’une manière déconcertante car il est présenté selon une « imagerie apocalyptique » qui n’est pas la nôtre, même si (et peut-être aussi parce que) les films d’épouvante sont monnaie courante aujourd’hui.
Etymologiquement, l’apocalypse ne signifie pas catastrophe mais « révélation », « découverte ». C’est la révélation du Royaume où se trouve le siège de l’Agneau, entouré de la foule innombrable de ceux qui ont servi Dieu. Mais les descriptions imagées du prophète Daniel et de l’évangéliste saint Jean en ont dévié le sens dans la pensée populaire.
LE JOUR DU SEIGNEUR
La première lecture de la liturgie de la Parole est tirée du livre de Malachie, qui est le dernier dans le classement habituel de l’Ancien Testament, est très court. Plusieurs passages en ont été repris soit par Jean le Baptiste, soit par le Seigneur Jésus lui-même.
Il fut écrit un peu moins de 500 ans avant Jésus-Christ. Le peuple d’Israël est revenu de son exil à Babylone et le temps a été reconstruit. Ce devrait être la joie. En fait, c’est l’échec. La grande masse du peuple ne s’est pas convertie. Beaucoup de prêtres sont indignes de leur charge. Les fidèles s’interrogent alors et ils sont tentés de dire comme les mécréants : »Inutile de servir Dieu. » (Mal. 3. 14)
Dieu répond par son prophète en affirmant qu’il prépare le jour où, enfin, l’on verra clair : »Alors, vous verrez à nouveau la différence entre le juste et le méchant, entre celui qui sert Dieu et celui qui ne le sert pas. » (3. 18) La clarté et la chaleur de ce jour seront une fournaise ardente pour les arrogants qui brûleront comme de la paille. (Mal. 3. 19 et Luc 3. 17) Ceux qui respectent Dieu seront, au contraire, guéris par son rayonnement. (Mal 3. 20)
Saint Jean le Baptiste emploie cette image de la paille (Luc 3. 17). Elle se retrouve également chez saint Paul quand le feu du jugement prouvera ce que vaut l’oeuvre de chacun (1 Cor. 3. 13). L’image que Malachie emploie pour le Jour du Seigneur (« Ce feu ne laissera ni racine ni branche ») est aussi employée par le Précurseur « Tout arbre qui ne produit pas de bon fruits va être coupé et jeté au feu. » (Luc 3. 9)
A l’opposé, ce Jour du Seigneur verra se lever le soleil de justice, sa lumière et sa chaleur bienfaisante sur ceux qui craignent le nom de Dieu, qui l’adorent et le servent. Zacharie, dans son action de grâce, salue la visite « de l’astre levant venu d’en haut » (Luc 1. 78). Au début de son Evangile, l’apôtre saint Jean parle de cette lumière qui est le Verbe de Dieu.
Toutes ces images n’évoquent pas la toute proche fin des temps, sur un ton de catastrophe comme certains le répètent encore de nos jours. C’est le contraire. Les temps messianiques sont commencés et il ne faut pas se tromper d’avenir. Les chrétiens ne sont pas dans une attente intemporelle comme le sont encore les Juifs. Ils ne sont pas en fuite vers une éternité qui s’annonce dans le malheur. Ils croient que l’Eternel est déjà venu dans le temps, depuis que le Verbe de Dieu s’est fait chair (Jean 1. 14) et qu’il reviendra un jour dans la Gloire.
UNE ATTENTE VECUE DANS LE CALME QUOTIDIEN
C’est vrai que certaines lectures et certains chants de l’office des défunts, que nous commémorerons le 2 novembre, paraissent terrifiantes. C’est ainsi que l’on comprendra ce « Dies Irae » si on en reste à la surface humaine des termes employés, alors qu’ils expriment toute la profondeur de la miséricorde divine.
« Tu as pardonné à Marie » parce qu’elle a tant aimé. « Tu as pardonné au bon larron » parce qu’il avait pleine confiance en toi. N’est-ce pas d’ailleurs significatif que l’ancienne liturgie de l’absoute et du dernier adieu se terminait par le cantique de Zacharie qui saluait l’aurore du salut de Dieu. « Acclamez Dieu, car il vient » chante le psaume.
Notre attitude ne doit donc pas être faite de peur, devant l’avenir que Dieu nous ouvre,pas plus qu’elle ne doit rester inactive. Saint Paul les rappelle à l’ordre les Thessaloniciens qui étaient des frénétiques du retour du Christ sur terre : la proximité du Royaume de Dieu ne doit pas servir de prétexte à l’oisiveté qui est, selon l’adage populaire » mère de tous les vices. A ceux qui sont « affairés sans rien faire », il donne cette recommandation : »Qu’ils travaillent dans le calme pour manger le pain qu’ils auront gagné. » (2 Thes. 3. 12)
En reprenant le même thème, saint Paul dira dans sa lettre aux Ephésiens : »Qu’il prenne plutôt la peine de travailler honnêtement de ses mains, afin d’avoir de quoi partager avec celui qui est dans le besoin. » (Eph. 4. 28)
NE VOUS LAISSEZ PAS EGARER.
La suite de l’Evangile d’aujourd’hui avait déjà été lue, au premier dimanche de l’Avent, en novembre 1999, au début de l’année liturgique.
Saint Luc distingue plus nettement que saint Marc les différents plans historiques : la destruction du temple, dont « il ne restera pas pierre sur pierre »; la venue dernière « qui ne sera pas tout de suite » et, entre les deux, un temps intermédiaire « Il faut que cela arrive d’abord. »
La persécution, le témoignage et la présence du Christ y sont intimement liés, comme dans le discours après la Cène (Jean 14 à 17) sont intimement associés la haine du monde et l’envoi du Paraclet », de l’Esprit consolateur et protecteur.
La venue dernière, « la fin du monde » n’est pas présentée comme une fin en soi et un anéantissement, mais comme les déchirements qui sont les douleurs d’un enfantement (Matthieu 24. 8) d’une humanité nouvelle dans un monde nouveau (Romains 8).
C’est donc à nous de voir clair, de ne pas nous laisser égarer, de rester confiants malgré tout, quelles que soient nos épreuves. Le Christ le répète à ses disciples : »Prenez garde de ne pas vous laisser égarer… ne vous souciez pas de votre défense …pas un cheveu de votre tête ne sera perdu. »
Cette nécessaire persévérance a été soulignée par saint Paul aux Thessaloniciens (1 Thes. 3.5). Saint Luc, son disciple, rappelle que c’est une parole de Jésus qui la fonde : »C’est par votre persévérance que vous obtiendrez la vie. » Le texte grec, qui est celui de saint Luc, est plus fort en ce qu’il exprime. La « persévérance » est la traduction du mot grec « upomonè » qui signifie « force de résistance dans la durée »., « Supporter les coups sans fléchir ». La « vie » est la traduction de « psuchè » qui est l’âme en tant qu’elle est notre être personnel.
Cette maîtrise constante, cette fidélité, est l’un des aspects de l’espérance elle-même et non pas une insensibilité aux coups reçus. Dans cet effort de « constance », nous savons que nous ne sommes pas seuls : « je vous inspirerai un langage et une sagesse » . A l’inverse, ce seront nos adversaires qui ne pourront « nous opposer ni résistance, ni contradiction ». (Luc 21. 15)
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« Accorde-nous, Seigneur, de trouver notre joie dans notre fidélité », nous fait dire l’oraison du début de la liturgie eucharistique, même si nous ne sommes pas dans les situations décrites par l’Evangile.
Prions aussi pour nos frères qui, dans d’autres pays, doivent encore témoigner de leur foi et de leur attachement au Christ que ce soit sur le continent africain ou dans certaines régions de l’Asie. « Etends au monde entier le salut et la paix. Affermis la foi et la charité de ton Eglise au long de son chemin sur la terre. » (Prière eucharistique)