Adresse du cardinal Barbarin au pape François pour « Fratello »

S. Ém. le Cardinal Philippe BarbarinAdresse du Cardinal Philippe Barbarin, archevêque de Lyon, au pape François, à l’audience, salle Paul VI, pour « Fratello », pèlerinage européen des personnes en situation de précarité pour le Jubilé de la Miséricorde, à Rome, le 11 novembre 2016.

Très Saint Père,
Cher Pape François,

C’est une audience bien singulière qui, grâce à vous, s’ouvre aujourd’hui.
Vous avez, depuis le début de votre Pontificat, désiré une Eglise pauvre pour les pauvres. Dans votre première exhortation apostolique, que nous avons reçue comme un véritable programme pastoral, vous écrivez que « le Christ lui-même s’est fait pauvre, toujours proche des pauvres », et vous affirmez que « tout le chemin de notre Rédemption est marqué par les pauvres ».

Aujourd’hui, ceux que vous accueillez sont heureux de se sentir au cœur de l’Eglise, proches du pape des pauvres. A vrai dire, ils n’ont pas besoin d’être accueillis. Ils savent bien qu’ils sont ici chez eux, que dans la grande fraternité de l’Eglise, ils sont notre « trésor », notre richesse !
Autrefois, le Préfet de Rome, informé que l’Eglise possédait des trésors dont saint Laurent avait la garde, donna l’ordre au diacre de les lui livrer. Laurent revint quelque temps après avec les pauvres, les orphelins, les estropiés, en disant : « Voilà les trésors de l’Eglise… L’Eglise n’a point d’autres richesses ! »
Souvent, j’aime à penser que, lorsque Jésus dit à ses disciples : « Les pauvres, vous les avez toujours avec vous » (Jn 12, 8), il ne s’agit pas, pour nous, de nous habituer à leur présence. J’ai plutôt l’impression qu’il nous donne une consigne et un moyen de reconnaître ses disciples : « Ce qui caractérise les amis de Jésus, c’est qu’ils ont toujours les pauvres avec eux » !

Aujourd’hui, en France, en Europe et ailleurs, des jeunes et des moins jeunes en sont une belle illustration. Ces hommes et ces femmes ont pris l’Evangile au sérieux. « Quand tu donnes un déjeuner ou un dîner, dit Jésus, n’invite pas tes amis, ni tes frères, ni tes parents, ni de riches voisins ; sinon, eux aussi, t’inviteraient en retour, et la politesse te serait rendue. Au contraire, quand tu donnes un festin, invite des pauvres, des estropiés, des boiteux, des aveugles … et tu seras heureux parce qu’ils n’ont rien à te rendre. » Eux aussi ont entendu cette parole de Jésus : ils ne partagent pas simplement un repas ou même des repas, mais leur maison, leur appartement, leur prière, leur détente… Ils ont choisi de partager leur vie au quotidien.

C’est le cas des membres de toutes ces associations qui sont à l’origine du pèlerinage « Fratello », comme vous le dira Etienne Villemain. Ils vivent et prient ensemble, ils partagent leurs repas et leur toit. De pauvres qu’ils étaient, ils ont trouvé bien plus qu’un abri, mais des frères et sœurs, des amis. Et ces amis, de riches qu’ils étaient, découvrent leur pauvreté et combien cette proximité devient aussi pour chacun d’eux un chemin de libération.
Pour ces « colocataires de l’Evangile » et pour tous ceux qui les accompagnent, le temps passe, et il n’y a ni pauvres ni riches, mais une fraternité unie par une même destinée. Certains pensaient venir pour aider, ils sont restés parce qu’ils sont devenus des amis. Certains pensaient venir pour être aidés, ils sont restés parce qu’ils ont trouvé des amis.

A Lyon, j’en suis le témoin à l’archevêché, où nous vivons avec deux collocations de Lazare et une de Marthe et Marie. C’est un moment d’émerveillement et de joie intense pour tous, lorsqu’arrive « à la maison » un bébé tout juste sorti de la maternité. Nous nous réjouissons de nos occasions de prier et de participer ensemble à l’Eucharistie. Et il faudrait évoquer aussi ces rencontres charmantes, parce que gratuites et inattendues. On a l’impression que l’amitié avec Jésus grandit au même rythme que l’amitié qui nous unit.

Pour moi, l’essentiel est d’entendre la voix du Père qui vient sur son Fils Bien-aimé : « En lui, j’ai mis tout mon amour ». En allant boire à cette source, à cette fontaine de Miséricorde, pour la répandre autour de nous, nous comprenons mieux cette demande centrale du Notre Père : « Que ta volonté soit faite, sur la terre comme au ciel ».

Sa volonté, c’est que sa Miséricorde rejoigne tous ses enfants, et spécialement ceux que vous accueillez ce matin. Pour les uns, la joie de ne plus être seuls, de ne plus être écrasés par la misère, pour les autres de ne plus être étouffés par la richesse ou le confort, mais de découvrir un amour mutuel qui trouve sa source dans l’amour même de Dieu.

En venant à Rome de vingt-deux pays, presqu’au terme de ce Grand Jubilé de la Miséricorde, nous demandons la grâce de nous approcher un peu plus du cœur de Jésus.

Cher Pape François, c’est une chance de vous rencontrer aujourd’hui, de vous voir et de vous entendre. Tous savent qu’il y a une grande cohérence entre vos gestes, vos paroles et vos actes. C’est la raison pour laquelle nous voudrions qu’à la fin de cette audience quelques pèlerins puissent prier pour vous, en posant, si vous l’acceptez, leurs mains sur vos épaules. Ce sera la prière des pauvres pour le Pape des Pauvres !

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