« Cette génération nous entraîne à être des serviteurs de la Parole de Dieu », interview de Mgr Rivière

Mgr Benoît Rivière, évêque d’Autun, Chalon et Mâcon et président du Conseil pour la pastorale des jeunes, a participé au pèlerinage en Terre Sainte qui a réuni 2 000 jeunes autour de 18 évêques. Il revient sur ce que cet évènement a suscité pour l’Eglise et les jeunes qui y ont participé.

Quel message les évêques ont-ils lancé aux jeunes pour leur retour dans leurs paroisses en France ?
Ils ont entraîné les jeunes avec eux dans un ressourcement de la foi. Ils ont pris du temps pour approfondir l’Ecriture sainte avec eux, et il n’y a pas de mission, de développement à la vie chrétienne sans un retour aux sources, sans la nourriture recueillie chaque jour dans l’Ecriture sainte. Nous avons voulu vivre cette expérience spirituelle avec ces jeunes pour que notre vie de retour en Terre Sainte ne soit pas une vie superficielle. Le cardinal Vingt-Trois leur a dit que le lieu de la rencontre avec les autres au nom du Christ est la vie ordinaire. C’est dans les églises locales ordinaires, dans la vie quotidienne, quels que soient nos milieux et nos lieux d’appartenance que se joue la mission.
Cela m’amène à dire que chaque pasteur, chaque évêque, chaque prêtre est renvoyé au sérieux du regard qu’il porte sur la jeunesse. Quand tu regardes un jeune, comment le regardes-tu ? Le vois-tu avec cette profondeur d’attente qui est en lui ? Cette attente qui est un terreau de liberté spirituelle pour grandir. Nous sommes renvoyés au sérieux et à l’exigence de ce que nous proposons et dans lequel nous engageons la jeunesse. Nous sommes également renvoyés à la responsabilité propre des jeunes entre nous. Ce pèlerinage a été un très beau travail des jeunes professionnels, qui ont été les acteurs et les serviteurs sans lesquels il n’aurait pas pu avoir eu lieu. Cela nous renvoie à la question : laissons-nous la place et la mesure aux jeunes dans la vie de l’Eglise ? Cette génération nous entraîne à être des serviteurs de la Parole de Dieu.

Comment poursuivre ce qui a été impulsé au cours de ce pèlerinage dans les paroisses ?
J’ai une forte attente de ce qui va grandir dans la pastorale universitaire après ce pèlerinage. Cela dépend pour une part des jeunes eux-mêmes, de l’accueil dans les paroisses et des évêques. L’important est les liens tissés dans l’Eglise, entre les jeunes euxmêmes, entre les jeunes avec les prêtres et les évêques. Je fais confiance à ce tissu de charité qui s’est élaboré. J’attends beaucoup en termes d’engagement et d’évangélisation. Mais il est encore trop tôt pour répondre à cette question.

Comment ce pèlerinage s’inscrit-il dans la pastorale des jeunes de l’Eglise en France ?
Ce pèlerinage était porté par le service pour l’évangélisation des enfants et des jeunes avec une équipe de jeunes professionnels accompagnés de prêtres et de religieuses. Il a fait apparaître des forces vives de l’Eglise que l’on trouve dans de nouveaux endroits. Nous devons chercher dans la pastorale universitaire à appeler tous ceux qui attendent d’être appelés aux services des autres. Et ils sont plus nombreux que ce qu’on imagine. Les aumôneries d’étudiants sont un des lieux majeurs pour la pastorale universitaire avec les groupes d’amitié, les groupes liés aux communautés religieuses et les différents groupes de prière. On voit ainsi apparaître la mosaïque très colorée de la pastorale des jeunes, qui est plus vivante que ce que l’on croit, et qui attend que nous laissions se déployer son dynamisme à l’intérieur du mystère de l’Eglise. C’est une espérance pour moi que les forces vives de la pastorale des jeunes en France évoluent. Nous devons être attentifs à ces évolutions.

Est-ce une synergie avec les JMJ ?
Oui naturellement. A la fin de la messe, j’ai dit aux jeunes : soyez de ceux qui se lèvent pour appeler d’autres jeunes et pour rendre service afin que d’autres jeunes puissent vivre l’expérience des JMJ de Madrid. Ce sont des points de rendez-vous dans la ligne des JMJ et les jeunes spontanément le perçoivent comme cela. Et c’est différent des JMJ, avec un rythme spirituel approfondi sur dix jours et en même temps avec le climat de la vie d’Eglise, de la confession de foi qui se fait de manière explicite.

L’Eglise compte-t-elle organiser d’autres pèlerinages en Terre Sainte de cette ampleur dans les prochaines années ?
C’est la question que nous nous posons avec d’autres responsables de la pastorale des jeunes. Nous réfléchissons à la possibilité de relancer une telle invitation dans quelques années. Si nous la réitérons, elle correspondra à une attente. Quand je vois comment les étudiants ont répondu alors que c’était la première fois, j’ai dans l’idée qu’une telle proposition, à la fois exigeante et enthousiasmante, rencontrera un oui chez de nombreux étudiants.

Comment cette rencontre a renforcé le lien entre l’Eglise d’Occident et l’Eglise d’Orient ?

Nous avons beaucoup cherché à être accueillis et à rencontrer les chrétiens vivant en Terre Sainte. Les groupes ont séjourné plusieurs journées dans des paroisses avec des groupes de chrétiens, surtout palestiniens. Certains jeunes correspondent toujours avec eux. Des liens d’amitié se sont tissés entre ces jeunes et permettront que ce ne soit pas seulement une rencontre occasionnelle. Nous avons entendu les communautés chrétiennes nous dire combien notre venue était importante pour eux. Elles sont tentées par le découragement. La visite d’autres chrétiens est un formidable élan d’espérance pour eux car leur situation est une véritable épreuve. Un tel pèlerinage permet de les encourager et apporte un bol d’oxygène à ces communautés qui se sentent devenues très minoritaires, et qui pourtant sont attendues en Terre Sainte car elles peuvent faire le pont entre des antagonismes difficilement surmontables aujourd’hui.