Trois questions à Mgr Rey qui publie un ouvrage intitulé Le Prêtre
La fidélité chrétienne doit s’appuyer sur celle du Christ à l’égard de son Eglise pour laquelle Lui-même s’est livré jusqu’à donner sa vie. Il existe des figures de fidélité qui soutiennent et stimulent la nôtre. Je pense à mes parents dont le témoignage de 70 ans de vie commune m’a montré que amour rime avec toujours.
La fidélité se construit au quotidien. Les grandes fidélités se déploient à partir des petites fidélités vécues au jour le jour : fidélité à la prière, aux amitiés, aux engagements. Paradoxalement, alors que notre culture prône « l’infidélité » toujours en quête de nouvelles expériences, le zapping perpétuel et ses attachements successifs et contractuels, l’homme contemporain est en recherche d’ancrage profond et durable, d’un amour qui ne faillit point.
Toute fidélité est un art de vivre avec le temps : au-delà de l’éphémère nous cherchons à construire sur de l’invariant, sur des permanences. Et c’est là que nous pouvons rencontrer le Christ : « Le ciel et la terre passeront ; mes paroles ne passeront point. »
Parmi les trois postures « frère, père et époux » (p. 84) que le prêtre est invité à incarner, laquelle vous semble la plus difficile, et peut-être aussi la plus urgente, à assumer dans notre contexte occidental ?
La posture du frère est fondatrice des deux autres. Comment peut-on exercer une paternité sinon à l’intérieur d’une fraternité commune ? Comme chrétiens nous la recevons au baptême. La dimension sponsale est aujourd’hui la plus incomprise. C’est à partir d’elle que prennent sens le célibat du prêtre et son attachement indéfectible à l’Eglise dont il est le ministre. Car il tient la place du Christ époux.
La dimension de la paternité me paraît une urgence et un défi dans un contexte où les figures de paternité sont mises en cause dans les modèles sociaux en raison du délitement de la famille et de la démission de l’autorité. « Une société sans père est une société sans repère », disent les psychosociologues. C’est en donnant sa vie à l’exemple du Christ et jusqu’à la perte de soi que l’on peut donner la vie. La paternité chrétienne est sacrificielle, mais elle est source de joie.
Vous dites page 118, que l’ordination sacerdotale députe à l’espérance. Quel message voudriez-vous partager aux confrères les plus éprouvés par le chemin de la vie et de la mission?
Face à leurs propres difficultés et aux résistances du terrain, certains prêtres désespèrent de leur ministère. Ils ne voient guère les fruits de leur apostolat et sont confrontés à l’indifférence, parfois au mépris. On ne peut pas porter tout seul « la charge de l’espérance ». Le lien av ec les laïcs, le soutien des frères prêtres me semblent indispensables pour nous maintenir dans une ferme espérance et éviter que le ministère se déploie dans une fuite en avant perpétuelle ou la recherche de consolations qui nous déportent de la mission que l’Eglise attend de nous. L’espérance chrétienne se nourrit de prière. Elle est confiance en la présence de Dieu qui se sert de nos talents mais aussi de nos fragilités.
L’espérance est un don et une responsabilité. Pour le prêtre, elle consiste aussi à porter ceux qui l’ont perdue.
Elle est enfin certitude qu’à travers les combats, le Ressuscité est au bout du chemin !…
Les bénéfices de la vente du livre sont entièrement reversés au Séminaire diocésain de La Castille.