Discours du Saint-Père et rencontre avec les jeunes
Discours du Saint-Père et rencontre avec les jeunes le samedi 29 avril 2023.
Dicsértessék a Jézus Krisztus! [Loué soit Jésus-Christ !]
Chers frères et sœurs, je voudrais vous dire köszönöm ! [Merci] Merci pour la danse, merci pour le chant, pour vos témoignages courageux, et merci à chacun d’être ici : je suis heureux d’être avec vous ! Merci.
Mgr Ferenc nous a dit que la jeunesse est un temps de grandes questions et de grandes réponses. C’est vrai, et il est important qu’il y ait quelqu’un pour provoquer et écouter vos questions, sans vous donner des réponses faciles, des réponses toutes faites, mais pour vous aider à relever le défi sans peur de l’aventure de la vie, à la recherche de grandes réponses. Les réponses toutes faites ne sont d’aucune utilité et ne rendent pas heureux. C’est ce que Jésus faisait. Bertalan, tu as dit que Jésus n’est pas le personnage d’un livre de fables ou le super-héros d’une bande dessinée, et c’est vrai : le Christ est Dieu dans la chair, il est le Dieu vivant qui s’approche de nous. Il est l’Ami, le meilleur des amis, il est le Frère, le meilleur des frères, et il est très adroit pour poser des questions. Dans l’Évangile, en effet, avant de donner des réponses, il pose des questions, Lui qui est le Maître. Je pense au moment où il se trouve face à cette femme adultère que tout le monde pointe du doigt. Jésus intervient, ceux qui l’accusaient s’en vont et Il reste seul avec elle. Il lui demande alors avec délicatesse : « Femme, où sont-ils donc ? Personne ne t’a condamnée ? » (Jn 8,10). Elle répond : « Personne, Seigneur ! » (v. 11). En disant cela, elle comprend que Dieu ne veut pas condamner, mais pardonner. Mettez ceci dans votre tête : Dieu ne veut pas condamner, mais pardonner. Dieu pardonne toujours. Comment dit-on en hongrois « Dieu pardonne toujours » ? [le traducteur le dit en hongrois et le pape le fait répéter aux jeunes] N’oubliez pas ! Il est prêt à nous relever à chaque chute ! Avec Lui, nous ne devons jamais avoir peur de marcher et d’avancer dans la vie. Pensons aussi à Marie Madeleine qui, au matin de Pâques, a été la première à voir Jésus ressuscité – et elle avait une histoire cette femme-là ! Mais elle a été la première à la voir. Elle pleure près du tombeau vide et Jésus lui demande : « Femme, pourquoi pleures-tu ? Qui cherches-tu ? » (Jn 20,15). Alors, touchée au plus profond d’elle-même, Marie de Magdala ouvre son cœur, elle lui dit ses angoisses, révèle ses désirs et son amour : » Où est le Seigneur ? « .
Et regardons la première rencontre de Jésus avec ceux qui deviendront ses disciples. Deux d’entre eux, orientés par Jean Baptiste, le suivent. Le Seigneur se retourne et pose une seule question : « Que cherchez-vous ? » (Jn 1,38). Moi aussi, je pose une question, et chacun y répond dans son cœur, en silence. Ma question est la suivante : « Que cherchez-vous ? Que cherchez-vous dans la vie ? Que cherches-tu dans ton cœur ? » En silence, chacun répond en son for intérieur. Qu’est-ce que je cherche ? Jésus ne prêche pas tant, non il chemine, il chemine avec chacun d’entre nous ; Jésus chemine près de chacun d’entre nous. Il ne veut pas que ses disciples soient des écoliers qui répètent une leçon, mais qu’ils soient des jeunes libres et qu’ils cheminent, compagnons de route d’un Dieu qui écoute, qui écoute leurs besoins et qui est attentif à leurs rêves. Puis, au bout d’un certain temps, deux jeunes disciples se fourvoient – les disciples de Jésus se sont tellement trompés ! – et ils adressent à Jésus une mauvaise requête, à savoir être à sa droite et à sa gauche lorsqu’Il deviendra Roi – ils voulaient s’élever, ceux-là ! Mais il est intéressant de voir que Jésus ne leur reproche pas d’avoir osé, il ne leur dit pas : « Comment vous permettez-vous, arrêtez de rêver de telles choses ! ». Non, Jésus ne détruit pas leurs rêves, mais il les corrige sur la manière de les réaliser. Il accepte leur désir d’atteindre les sommets – c’est une bonne chose – mais il insiste sur une chose, dont il faut bien se souvenir : on ne devient pas grand en dépassant les autres, mais en s’abaissant vers les autres ; non pas aux dépens des autres, mais en servant les autres (cf. Mc 10, 35-45). [le Pape demande au traducteur de répéter la dernière phrase en hongrois] Vous avez compris ? Vous voyez, chers amis, Jésus est heureux que nous atteignons de grands objectifs. Il ne nous veut pas paresseux ni peureux, il ne nous veut pas silencieux ni timides, il nous veut vivants, actifs, protagonistes, protagonistes de l’histoire. Et il ne dévalorise jamais nos attentes mais, au contraire, il élève la barre de nos désirs. Jésus serait d’accord avec un de vos proverbes, que j’espère bien prononcer : Aki mer az nyer [Celui qui ose gagne].
Vous pouvez me demander : comment devenir vainqueurs dans la vie ? Il y a deux étapes fondamentales, comme dans le sport : premièrement, viser haut ; deuxièmement, s’entraîner. Viser haut. Dis-moi, as-tu un talent ? Tu en as certainement un, nous en avons tous ! Ne le mets pas de côté en pensant qu’il te suffit du minimum indispensable pour être heureux : un diplôme, un travail pour gagner de l’argent, se divertir un peu… Non, mets ce que tu as en jeu ! Tu as une qualité ? Investis-y sans crainte, vas-y ! Tu sens au fond du cœur que tu as une capacité qui peut faire grand bien ? Sens-tu qu’il est bon d’aimer le Seigneur, de fonder une famille nombreuse, d’aider ceux qui sont dans le besoin ? Vas-y, ne pense pas que ce sont des désirs inaccessibles, mais investis dans les grands objectifs de la vie ! Ça c’est la première étape, viser haut. Et la seconde : s’entrainer. Comment ? En dialoguant avec Jésus, qui est le meilleur entraineur possible. Il t’écoute, Il te motive, Il croit en toi, tu sais, Jésus croit en toi ! Il sait faire ressortir le meilleur de toi-même. Et il invite toujours à faire équipe : jamais seul, mais avec d’autres : c’est très important. Si tu veux mûrir et grandir dans la vie, va de l’avant en faisant équipe, dans la communauté, en vivant des expériences communes. Je pense, par exemple, aux Journées Mondiales de la Jeunesse et je profite de l’occasion pour vous inviter aux prochaines qui auront lieu au Portugal, à Lisbonne, au début du mois d’août. Aujourd’hui, la tentation est grande de se contenter d’un téléphone portable et de quelques amis – peu de choses, en somme ! Mais, même si c’est ce que beaucoup font, même si c’est ce que tu as envie de faire, ce n’est pas bon. Tu ne peux pas t’enfermer dans un petit groupe d’amis et ne communiquer qu’avec ton téléphone portable : c’est – permettez-moi l’expression – un peu débile.
Il y a aussi un élément important dans l’entrainement et toi, Krisztina, tu nous l’as rappelé en disant qu’au milieu de mille courses, de tant de frénésie et de vitesse, une chose essentielle manque aujourd’hui aux jeunes, et aussi aux adultes. Tu as dit : « Dans le bruit nous ne nous accordons pas de temps pour le silence, parce que nous avons peur de la solitude et nous finissons par être fatigués tous les jours ». Tu l’as dit, Krisztina : merci. Je voudrais vous dire : n’ayez pas peur d’aller à contre-courant, de trouver chaque jour un temps de silence pour vous arrêter et prier. Aujourd’hui, tout vous dit qu’il faut être rapides, efficaces, pratiquement parfaits, comme des machines ! Mais, les amis, nous ne sommes pas des machines ! Et puis nous nous rendons compte que nous sommes souvent en panne d’essence et que nous ne savons plus quoi faire. Il est bon de pouvoir s’arrêter pour faire le plein, pour recharger les batteries. Mais attention : non pas pour se plonger dans ses mélancolies ou ruminer ses tristesses, non pas pour penser à qui m’a fait ceci ou cela, en faisant des théories sur le comportement des autres, non, ce n’est pas bon! C’est un poison, il ne faut pas le faire.
Le silence est le terrain sur lequel on peut cultiver des relations bénéfiques, parce qu’il nous permet de confier à Jésus ce que nous vivons, de Lui apporter des visages et des noms, de Lui confier nos peines, de passer en revue nos amis et de dire une prière pour eux. Le silence nous donne l’occasion de lire une page de l’Évangile qui parle à notre vie, d’adorer Dieu et de trouver ainsi la paix du cœur. Le silence permet de prendre ce livre que tu n’es pas obligé de lire, mais qui t’aide à lire l’âme humaine, à observer la nature pour ne pas être seulement en contact avec les choses faites par les hommes et à découvrir la beauté qui nous entoure. Mais le silence n’est pas fait pour rester collé aux téléphones portables et aux réseaux sociaux ; non, s’il te plaît : la vie est réelle, pas virtuelle, elle ne se passe pas sur un écran, la vie se passe dans le monde ! S’il te plaît, ne virtualises pas la vie ! Je répète : ne virtualises pas la vie, qui est concrète. Compris ?
Le silence est donc la porte de la prière, et la prière est la porte de l’amour. Dóra, je voudrais te remercier parce que tu as parlé de la foi comme d’une histoire d’amour- cela est beau, c’est ton expérience -, où chaque jour tu affrontes les difficultés de l’adolescence. Mais tu sais qu’il y a Quelqu’un avec toi, Quelqu’un pour toi, et que ce Quelqu’un, Jésus, n’a pas peur de surmonter avec toi tous les obstacles que tu rencontres. La prière t’aide à le faire parce qu’elle est un dialogue avec Jésus, tout comme la Messe est une rencontre avec Lui, et la Confession est l’étreinte que tu reçois de Lui. Je pense au grand musicien Franz Liszt. En nettoyant son piano, on a trouvé des grains de chapelet qui, sans doute en se cassant, sont probablement tombés dans l’instrument. C’est un indice qui nous fait penser qu’avant une composition ou une exécution, peut-être même après un moment de plaisir au piano, il avait l’habitude de prier : il parlait au Seigneur, parlait à la Vierge de ce qu’il aimait, et il mettait son art et ses talents dans la prière. Prier n’est pas ennuyeux ! C’est nous qui le rendons ennuyeux. Prier est une rencontre, une rencontre avec le Seigneur : c’est beau cela. Et lorsque vous priez, n’ayez pas peur d’apporter à Jésus tout ce qui se passe dans votre monde intérieur : vos affections, vos craintes, vos problèmes, vos attentes, vos souvenirs, vos espoirs, tout, même vos péchés. Il comprend tout. La prière est dialogue de vie, la prière est vie. Bertalan, aujourd’hui tu n’as pas eu honte de parler à tout le monde de l’anxiété qui te paralyse parfois et des difficultés à approcher de la foi. Qu’il est beau d’avoir le courage de la vérité, qui ne consiste pas à montrer que l’on n’a jamais peur, mais à s’ouvrir et à partager ses fragilités avec le Seigneur et avec les autres, sans cacher, sans déguiser, sans porter de masques. Merci pour ton témoignage, Bertalan, merci ! Le Seigneur, comme nous le dit l’Évangile à chaque page, ne fait pas de grandes choses avec des personnes extraordinaires, mais avec des personnes vraies, limitées comme nous. En revanche, ceux qui se fient à leurs propres capacités et qui vivent d’apparences, tiennent Dieu loin du cœur, parce qu’ils ne s’occupent que d’eux. Avec ses questions, son amour et son Esprit, Jésus creuse en nous afin de faire de nous des personnes vraies. Et nous avons tellement besoin de personnes vraies aujourd’hui ! Je vous dit une chose : savez-vous quel est le danger aujourd’hui ? D’être une personne fausse. S’il te plaît, ne sois jamais une personne fausse, sois toujours une personne vraie, avec ta propre vérité ! « Eh, Père, j’ai honte parce que ma réalité n’est pas bonne, vous savez, Père, j’ai mes propres choses à l’intérieur… ». Regarde devant toi, vers le Seigneur, prends courage ! Le Seigneur nous veut tels que nous sommes, tels que nous sommes maintenant, Il nous aime tels que nous sommes. Prends courage et va de l’avant ! Ne vous effrayez pas de vos misères.
Et à cet égard, nous avons été frappés par ce que tu as dit, Tódor, à commencer par ton nom, que tu portes en l’honneur du bienheureux Théodore, grand confesseur de la foi qui nous appelle à ne pas vivre dans la demi-mesure. Tu as voulu « tirer la sonnette d’alarme », en disant que le zèle pour la mission est anesthésié par le fait que nous vivons dans la sécurité et le confort, alors qu’à quelques kilomètres d’ici, la guerre et la souffrance sont à l’ordre du jour. Voici donc une invitation : prendre la vie en main pour aider le monde à vivre en paix. Laissons-nous être dérangés et demandons-nous, chacun : que fais-je pour les autres, que fais-je pour la société, que fais-je pour l’Église, que fais-je pour mes ennemis ? Est-ce que je vis en pensant à mon propre bien ou est-ce que je m’implique pour quelqu’un, sans calculer mes propres intérêts ? S’il vous plaît, interrogeons-nous sur notre gratuité, sur notre capacité à aimer, aimer selon Jésus, c’est-à-dire aimer et servir.
Chers amis, il y a une dernière chose que je voudrais partager avec vous, une page de l’Évangile qui résume ce que nous avons dit. Il y a un an et demi, j’étais ici pour le Congrès Eucharistique. Dans l’Évangile de Jean, au chapitre 6, il y a une belle page eucharistique qui a pour centre un jeune homme. Elle parle d’un jeune homme qui, dans la foule, écoutait Jésus. Il savait probablement que la rencontre allait durer longtemps et il avait été prévoyant : il avait apporté son déjeuner avec lui – vous avez apporté un sandwich ? Mais Jésus a de la compassion pour la foule – ils étaient plus de 5 000 – et veut la nourrir ; alors, à sa manière, il pose des questions aux disciples pour débloquer leurs énergies. Il demande à l’un d’eux comment faire et il reçoit une réponse de « comptable » : « Le salaire de deux cents journées ne suffirait pas pour que chacun reçoive un peu de pain » (Jn 6, 7). Comme pour dire : c’est mathématiquement impossible. Un autre, entre-temps, voit ce garçon et fait une observation, mais encore pessimiste : « Il y a là un jeune garçon qui a cinq pains d’orge et deux poissons, mais qu’est-ce que cela pour tant de monde ! » (v. 9). Au contraire, ces cinq pains et deux poissons ont suffi à Jésus pour accomplir le fameux miracle de la multiplication des pains. Chacun de nous, les petites choses que nous avons, même nos péchés, suffisent à Jésus. Et que devons-nous faire ? Les laisser entre les mains de Jésus : voilà, c’est tout.
Cependant, l’Évangile ne raconte pas un détail, qu’il laisse à notre imagination : comment les disciples ont-ils convaincu ce jeune homme de donner tout ce qu’il avait ? Peut-être lui auront-ils demandé d’apporter son repas et il aura regardé autour de lui, voyant des milliers de personnes. Et peut-être, comme eux, aura-t-il répondu en disant : « Ce n’est pas assez, pourquoi me demander, pourquoi ne vous en chargez-vous pas, vous qui êtes les disciples de Jésus? Qui suis-je ? » Alors, peut-être, lui auront-ils dit que c’était Jésus lui-même qui demandait. Et il fait une chose extraordinaire : il fait confiance. Ce garçon, qui avait pris son déjeuner pour lui, fait confiance, il donne tout, il ne garde rien pour lui. Il était venu pour recevoir de Jésus et il se retrouve à donner à Jésus. Mais c’est ainsi que le miracle se produit. Il vient du partage : la multiplication opérée par Jésus commence par le partage de ce jeune homme avec Lui et pour les autres. Le peu de ce jeune homme entre les mains de Jésus devient beaucoup. Voilà où mène la foi : à la liberté de donner, à l’enthousiasme du don, au dépassement des peurs, à l’implication ! Mes amis, chacun de vous est précieux pour Jésus, et pour moi aussi ! Rappelles-toi que personne ne peut prendre ta place dans l’histoire du monde, dans l’histoire de l’Église, personne ne peut te remplacer, personne ne peut faire ce que tu es le seul à pouvoir faire. Aidons-nous donc mutuellement à croire que nous sommes aimés et précieux, que nous sommes faits pour de grandes choses. Prions pour cela et encourageons-nous les uns les autres ! Et n’oubliez pas de me faire du bien par vos prières. Köszönöm! [merci!].