Les tests génétiques : quelle utilisation et quelles questions éthiques ?

Par Aliette Carville le jeudi 26 mars 2009

Aujourd’hui de plus en plus de tests génétiques sont utilisés en clinique pour faciliter le diagnostic et donc la prise en charge clinique des patients. Comme tout test clinique l’objectif et la justification de son utilisation repose sur les avantages que l’on peut en attendre qui peuvent être curatifs ou préventifs (1).

Savoir ou ne pas savoir

Mais quel serait l’intérêt de connaître son statut génétique si aucun traitement ne permettait de prendre en charge ou de prévenir la maladie liée à ce statut? L’angoisse générée par de telles informations doit être bien évaluée. Il existe dans des familles fortement touchées par des maladies génétiques graves « des personnes qui « veulent savoir » … pour être libérées d’un doute qu’elles jugent pire que l’éventuelle révélation d’une particularité génétique lourde de conséquences ; ou pour prendre des décisions concernant leur orientation professionnelles, la gestion de leurs biens, la fondation d’un couple, le choix d’un conjoint, leur descendance … » (2). L’accompagnement psychologique de ces personnes en amont de ces tests et en aval du résultat est totalement nécessaire, afin de leur permettre d’appréhender les conséquences de cette information dans leur histoire ainsi que dans celle de leur famille. Mais d’autres au contraire préfère ne pas savoir.

La transmission d’une information génétique aux membres de la famille

La question importante également de la transmission de cette information aux autres membres de la famille potentiellement touchés est également cruciale. Comment prendre contact avec une personne qui n’a rien demandé, comment lui permettre d’exercer sa liberté de savoir ou de ne pas savoir ? Comment informer les membres d’une famille tout en gardant la confidentialité sur la personne diagnostiquée initialement ? La loi actuelle prévoit un système compliqué qui va devoir être revu lors de la révision de la loi de bioéthique. Il semble impossible de répondre à cette question sans prendre en compte la notion de mesure préventive ou curative associée à cette information génétique. Toute information n’est pas nécessaire à transmettre.

Tests génétiques prédictifs

Pour les maladies génétiques multifactorielles, on peut se poser la question de la compréhension de l’information reçue et de l’angoisse qu’elle peut générer. Que signifie une probabilité vis-à-vis d’un risque de tomber malade ? Saurons nous individuellement ne pas se sentir condamner à la moindre information concernant notre avenir probable révélé par ces gènes ? Le monde médical saura-t-il utiliser ces tests dits de prédispositions que lorsqu’ils auront acquis l’assurance de l’utilité clinique de ces tests ? Le développement de proposition de tests génétiques via Internet ne fait qu’amplifier ces problématiques et il semble nécessaire de former et d’avertir la population sur les risques qu’ils encourent à réaliser de tels tests hors du champ médical.

Aliette Carville est biologiste et historienne des sciences

(1) Déontologie médicale et diagnostic génétique. Conseil National de l’ordre des médecins sept 1997

(2) Conseil permanent de la conférence des évêques de France. Essor de la génétique et dignité humaine. Ed Centurion/Cerf. 1998, pIX Présentation par le Père P. Vespieren.

Fiches du groupe de travail "bioéthique"

Glossaire

PMA (procréation médicalement assistée) : pratiques cliniques et biologiques visant à remédier à l’infertilité du couple ou à éviter la transmission d’une maladie d’une particulière gravité.
GPA (gestation pour autrui) : le fait, pour une femme, de porter et de mettre au monde un enfant pour le compte d’un tiers.
CELLULES SOUCHES EMBRYONNAIRES : issues de l’embryon à un stade très précoce et douées de deux capacités : celle de se multiplier à l’infini et celle de donner naissance à tous les types de cellules de l’organisme (pluripotence).
(Source : INSERM)
CRISPR-Cas9 (clustered regularly interspaced short palindromic repeat) : « ciseaux génétiques » permettant d’éditer l’ADN d’une cellule somatique ou germinale. Cet outil cible une zone spécifique de l’ADN et la coupe. Cela permet ensuite de corriger ou modifier la séquence ciblée.
(Source : CNRS)
INTELLIGENCE ARTIFICIELLE : théories et techniques « consistant à faire faire à des machines ce que l’homme ferait moyennant une certaine
intelligence ». On distingue IA faible (IA capable de simuler l’intelligence humaine pour une tâche déterminée) et IA forte (IA générique et autonome qui pourrait appliquer ses capacités à n’importe quel problème).
(Source : CNIL)
BIG DATA (« données massives ») : conjonction entre d’immenses volumes de données et les nouvelles techniques permettant de traiter ces données, voire d’en tirer par le repérage de corrélations des informations inattendues.
(Source : CNIL)