Documents épiscopat : « Glorifiez Dieu dans votre corps ! » | Documents épiscopat
Trente-six millions de Français pratiquent un sport, réalité incontournable dans notre société (santé, économie, spectacle, loisirs). Un enjeu pastoral de premier plan pour l’Église. L’Église s’est toujours intéressée aux disciplines sportives qui, pratiquées de manière juste, représentent un accomplissement et une forme d’exercice spirituel. Remontant aux sources et scrutant le fonctionnement des sportifs sur et en dehors du terrain, ce numéro dévoile les enjeux sociétaux, d’éducation et de santé du sport. Il en interroge aussi les aspects économiques, financiers et médiatiques.
Edito de Mgr Jacques Blaquart
Les compétitions de Ligue 1 de foot, les prestations des équipes de France ou les étapes du Tour de France ont envahi nos écrans. À l’horizon, se profilent les Jeux olympiques et paralympiques de 2024, à Paris. D’aucuns parleront dopage, argent des stars, violences des stades, récupération politique – reflets des maux endémiques de notre société. La médiatisation des excès ne doit pas masquer les activités sportives qui se déroulent bien grâce à des milliers d’éducateurs et à 3,5 millions de bénévoles dans notre pays.
Le progrès technique, le confort, la multiplicité des écrans, ont fortement réduit nos aptitudes corporelles (-25 % en cinquante ans). Or, notre corps a besoin d’exprimer ses potentialités. Pratiquer une activité physique est nécessaire pour la santé et pour l’esprit : c’est une école de volonté, de courage, de dépassement de soi et de but à atteindre – vertus humaines éminemment chrétiennes. À travers une activité ludique, nombre d’adolescents et de personnes en difficulté apprennent des règles de vie sociale et à réguler leur énergie, à se connaître. Le succès des Jeux paralympiques révèle les capacités étonnantes de l’individu. Un match de basalte en fauteuil est époustouflant de virtuosité et d’engagement. Et la gymnastique proposée dans les maisons de retraite rappelle qu’il est presque toujours possible d’avoir une activité physique, bonne pour le moral, l’équilibre et la vie sociale.
Les saints éducateurs comme Don Bosco ont compris combien une activité physique ouvre les cœurs
L’Église s’est toujours intéressée aux disciplines sportives. Saint Paul fait référence aux combats, à la course. La pastorale de l’Église envers les jeunes générations est un défi. Les patronages, les mouvements éducatifs comme le scoutisme, ou l’UGSEL des établissements catholiques, ont fait leurs preuves. Les saints éducateurs comme Don Bosco ont compris combien une activité physique ouvre les cœurs à une dimension spirituelle : l’écologie intégrale dont nous parlons, ils la pratiquaient. Quand des sportifs parlent ouvertement de leur foi, leur témoignage est mieux reçu que bien des enseignements religieux. Les « pèlé VTT », les sessions « Foot for Jesus », les « camps ski, montagne et prière », les Goums, l’accueil des marcheurs au long du chemin vers Compostelle, sont autant d’occasions de faire connaître Jésus. Avec les encouragements des papes – de Pie X à Jean Paul II et jusqu’à François, soulignant la dimension fraternelle du sport – éducateurs chrétiens, prêtres, diacres et laïcs lancent des initiatives, sur terre ou sur mer (« Challenge des cathédrales », « Avance au large » …), conscients de l’enjeu pastoral des activités sportives.
Le sport, pratiqué de manière juste, est une bonne école d’accomplissement de soi, un exercice spirituel. À ceux qui opposent corps et esprit, faisant du sport une activité non spirituelle, nous disons avec saint Paul : « Glorifiez Dieu dans votre corps ! » (1 Co 6, 20). Dieu s’est incarné dans notre humanité. En Jésus, il s’est fait homme éprouvant fatique, soif, faim, efforts physiques du charpentier, longues marches, souffrance corporelle. L’effort du chrétien sportif le révèle à lui-même, lui ouvrant une meilleure compréhension du Christ et des autres. Je sais ce que je dois au sport : ouverture au monde, occasion de rencontres et de brassage social, connaissance de mes capacités et limites, respect de l’adversaire. La pratique du football m’a appris la synodalité, la vie en équipe : pour gagner, l’esprit collectif doit l’emporter sur la tentation égoïste de se mettre en valeur. Notre pastorale est crédible quand elle prend en compte toutes les dimensions de la personne. Lisez ce document [*]. Il ouvre des perspectives insoupçonnées pour l’annonce de Jésus Christ aux hommes et aux femmes d’aujourd’hui.
Mgr Jacques Blaquart,
évêque d’Orléans
[*] Fin février 2020, Mgr Bruno Feillet et les responsables du Service national Famille et Société (SNFS) travaillaient à Rome, quand Santiago Pérez de Camino Gaisse, chargé de la section Église et sport au Vatican, a demandé que soit établi un « contact stable à la Conférence épiscopale française pour les questions relatives au sport », a fortiori avec la perspective des JOP de Paris, en 2024. Un groupe de travail a été constitué au pôle Société du SNFS, sous la responsabilité de Mgr Jacques Blaquart, et coordonnée par le père Alain Paillard. Le 27 octobre 2020, le Conseil épiscopal Famille et Société demandait de « réaliser un Documents Épiscopat qui trace les contours de la place du sport aujourd’hui dans la société, sa signification et les enjeux pastoraux pour l’Église ; ensuite approfondir certaines questions plus particulière et donner réponse à des besoins particuliers (notes, travail sur l’implication de l’Église dans les JOP 2024, autres contributions…. »