Sylvain, diacre pour retrouver le sens du sacré

Sylvain Contensou, diacre à Auch

Ordonné diacre permanent pour le diocèse d’Auch le 15 octobre 2023, Sylvain Contensou vit sa mission au service de sa paroisse et de la pastorale diocésaine des familles. Portrait. Par Florence de Maistre.

“La dimension verticale, le sacré, mérite d’être travaillée aujourd’hui dans l’Église. J’ai à cœur de recréer le lien entre le Créateur et les hommes, d’en être le signe au nom de Jésus Christ”, annonce Sylvain Contensou, 52 ans, banquier, consultant entreprise. Il y a trois ans, avec son épouse Ruxandra d’origine roumaine orthodoxe et leurs enfants Mathilde, 24 ans, et Thomas, 20 ans, Sylvain quitte la région d’Orléans pour revenir à ses origines familiales dans le Gers. “J’ai été très bien accueilli par Mgr Bertrand Lacombe. J’ai suivi la formation au diaconat avec la Province ecclésiale de Tours et je l’ai prolongé ici deux ans, le temps de m’installer dans le paysage”, indique Sylvain. Chaque jour, il se rend à Toulouse dans le département frontalier pour son travail.

Dès son arrivée, Sylvain Contensou s’investit dans la paroisse Saint-Bertrand de L’Isle-Jourdain et rejoint en particulier l’équipe de formation pour les parents qui demandent à baptiser leur enfant, et la redynamise. “Je suis très sensible au fait que chacun s’épanouisse dans le temps qu’il consacre aux services d’Église, pour que cela ne devienne pas une plaie. J’essaie de valoriser les personnes dans une préparation au baptême qui mobilise davantage joie et interactivité. Aujourd’hui comme diacre, j’officie aussi à la liturgie, en étant très bien assisté par un prêtre un peu tatillon auprès de qui j’apprends beaucoup”, souligne le diacre permanent.

Une mission portée en couple

Après ses longues années de formation, très théorique et intellectuelle, Sylvain reconnaît son manque de pratique et d’aisance. D’ici quelques mois, les relations aux familles et aux futurs mariés seront sans doute plus décontractées. Il comprend néanmoins l’importance de ce temps donné qui permet une certaine maturation du cheminement. “Petit à petit, nous nous mettons en route pour devenir un homme, porte-parole de l’Église. La durée de la formation rassure, donne confiance, permet de dialoguer en couple. Nos accompagnateurs sont très vigilants pour que le sacrement du mariage demeure premier. Je suis ordonné, mais il y a une dimension diaconale du couple : mon épouse est vraiment partie prenante de mon ministère”, poursuit Sylvain.

C’est d’ailleurs le couple marié de Sylvain et Ruxandra, artiste peintre, que Mgr Bertrand Lacombe, archevêque d’Auch, vient d’appeler au service de la pastorale diocésaine des familles. Tous deux se réjouissent de s’impliquer et de vivre ensemble cette mission porteuse de sens. Il y a peu, la nouvelle équipe diocésaine constituée de trois couples et d’un prêtre accompagnateur s’est réunie par visioconférence. Objectifs : encourager les mouvements, proposer des temps forts, mais surtout “faire transpirer la fraternité”, partage le diacre surpris d’avoir perçu, ici ou là dans le territoire, quelques tensions.

diacre Contensou à Auch

“Appelons-les !”

D’après son expérience paroissiale et celles de ses frères diacres, Sylvain assure que la figure du diacre a toute sa place dans l’Église : lui-même est attendu par son curé. Ce dernier a bien compris comment Sylvain et l’autre diacre de la paroisse peuvent être un soutien, une personne ressource notamment dans les relations avec les laïcs. Paroissiens et fidèles sont également bienveillants et reconnaissants de l’engagement de ces hommes mariés et clercs.

De là à ce que la vocation diaconale pallie au manque de prêtres ? “Il y a un fossé énorme. Ça m’interroge au regard de l’avenir de l’Église et de la pyramide des âges ! J’ai déjà soulevé le sujet en formation, sans vraiment recevoir de réponse. Demain, l’évêque pourrait me confier la mission de tenir la paroisse et ne réserver aux prêtres que le sacramentel. Je suis surpris par le fait que l’on n’appelle pas plus de pères de famille au diaconat permanent. Peut-être dévoyons-nous la vocation de prêtre ? Nous ne les remplacerons jamais : le sacerdoce est juste magnifique ! Mais dans l’attente d’un renouveau, il pourrait y avoir davantage de ministres ordonnés”, insiste Sylvain. Il y a quelques semaines, le diacre participait à la célébration d’une ordination diaconale en vue du sacerdoce. Il a vu dans la belle assemblée “un vivier de compétences” et a pensé : “appelons-les” ! “Certains sont déjà tellement au service de l’Église, je m’étonne qu’ils ne franchissent pas le cap, mais ça se travaille !”, relève le banquier dans un éclat de voix chaleureux.

Entre vie professionnelle et vie familiale

Dans sa mission, tout diacre est invité à rejoindre les périphéries, à choisir d’aller à la rencontre de ses contemporains et à faire ce lien avec la structure ecclésiale. Ingénieur de formation, travaillant dans une banque, Sylvain a certaines facilités pour structurer sa pensée à l’écrit et à l’oral, et une capacité à s’exprimer en public sans difficulté, au nom de l’Église. “Avec mes habitudes culturelles, je pourrais passer à côté du premier service qui m’est demandé, louper une fragilité. C’est pourquoi j’essaie de redoubler d’attention aux petits et aux faibles”, souffle le diacre. Mais ce n’est pas pour autant plus aisé d’être signe au sein de son milieu professionnel. “Mon travail n’est pas mon lieu de mission. J’ai été très déçu lorsque j’ai invité mes collègues à la célébration de mon ordination : ils n’ont pas souhaité en savoir davantage. C’est ta vie, m’ont-ils dit. En revanche, je prie beaucoup pour eux. Le bureau demeure un beau lieu de vie chrétienne : en pratique, tout l’Évangile est là, toutes les passions humaines aussi”, révèle le banquier.

Entre une vie professionnelle bien chargée et le service diaconal, le burn out guette. Avec l’aide de son épouse, Sylvain est vigilant, discerne là où sa présence est utile, là où elle est accessoire et s’autorise à dire non à certaines sollicitations. “Il faut se préserver un jardin secret. C’est vraiment important !”, lance Sylvain. Les week-end où ses enfants étudiants rentrent, il bloque son agenda et privilégie la vie de famille. Son temps disponible ? Il le passe entièrement dans la rénovation de sa maison située en pleine campagne. Bricoleur malgré lui, il espère que les travaux seront achevés d’ici l’été. “Il nous aura fallu près de trois ans pour concrétiser notre arrivée !”, s’amuse-t-il. Il imagine aussi réserver prochainement un week-end pour son couple, à Lourdes qui n’est pas loin ou dans un monastère. Avec les enfants qui ont quitté la maison, Sylvain et Ruxandra se retrouvent au quotidien dans une situation qu’ils n’ont pas connue depuis longtemps, les moments d’intimité ensemble sont à réinventer.

L’importance de la prière

De sa formation au diaconat, Sylvain retient surtout la vie communautaire qu’il a beaucoup appréciée : au gré de l’évolution du groupe, il se crée une vraie fraternité de couples et de diacres. Avec son changement de province ecclésiale, ces liens sont à recréer. Le diacre assure néanmoins que le cérémonial des 60 ans du rétablissement du diaconat permanent met en évidence cette fraternité. Il a hâte qu’au sein de l’Église d’Auch des rencontres régulières avec les dix diacres du diocèse se remettent en place, “pour discuter, échanger et partager sur nos états d’âme”.

Son ressourcement, Sylvain le puise surtout dans la prière des heures, qui devient de plus en plus nourrissante pour lui. “Je m’efforce de prier les laudes et les vêpres chaque jour. Au début, cela semble un peu artificiel. Puis, quand l’heure vient et que je suis en retard, le cœur parle. C’est plus important qu’il n’y paraît : le Seigneur m’attend !”, confie le diacre, qui s’isole, seul, dans un lieu à part avec son livre. Son épouse formule, de son côté, une autre prière personnelle, mais ensemble ils développent un dialogue très riche, nourri de nombreuses lectures, sur la vie de l’Église, ses difficultés dans la société. Le diacre ponctue : “Son message est d’une belle actualité ! Mais le sens du sacré a été perdu. Les gens sont paumés, ne comprennent pas le lien transcendantal entre Dieu et les hommes. Pourtant leurs attentes sont fortes, ils ont une telle quête : ils sont assoiffés, sans reconnaître en l’Église l’incarnation de leur recherche. Redonnons au Christ, sa place dans nos missions quelles qu’elles soient : les gens en ont besoin !”.

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