« La condition de célibataire de Jésus est le fondement suprême de notre engagement », homélie de Mgr Lebrun pour la messe chrismale en 2010
Is 61, 1-3a.6a.8b-9 ; ps 88
Ap 1, 5-8 ; Lc 4, 16-21
Ceci est mon corps livré pour vous !
Frères prêtres, combien de fois n’avons-nous pas prononcé cette parole de Jésus ? Frères et sœurs, combien de fois ne l’avez-vous pas entendu et n’y avez-vous pas communié ? Au fur et à mesure de nos rencontres, frères prêtres, je mesure quel amour, quelle fidélité à l’amour, quel combat aussi, représente cette parole, cœur de notre vie de prêtre, sommet de la vie de Jésus.
Que l’évangile et la fête de ce soir nous aident à l’accueillir à nouveau.
Cette parole de l’Ecriture, dit Jésus, c’est aujourd’hui qu’elle s’accomplit. Il parle de la belle prophétie d’Isaïe annonçant la libération des prisonniers et la vue rendue aux aveugles. Cela était vrai car ce n’était pas un fantôme ou un pur esprit qui s’est présenté à la synagogue de Nazareth. C’était celui qui, ayant grandi, dira en vérité, en allant au bout de l’amour : Ceci est mon corps livré pour vous !
Cela demeure vrai parce que, au sein de son Église, des hommes, en chair et en os, continuent de dire Ceci est mon corps livré pour vous, en rejoignant le bout de l’amour. Et ce bout de l’amour est véridique car des chrétiens, de bien des manières, participent à la libération des prisonniers, au combat contre la cécité, à la lutte contre la pauvreté. Cela est véridique aussi parce que d’autres que des chrétiens participent aux victoires de l’amour et que nous les accueillons dans l’action de grâce du Fils pour l’œuvre du Père et de l’Esprit.
Au centre de l’Eucharistie, au centre de l’Église, au centre de la vie du monde, il y a le don du Corps de Jésus, par amour ! Un corps façonné dans le sein de la Vierge Marie, un corps engendré par l’Esprit Saint, l’amour en personne. Au centre de notre vie, au centre de notre communauté, il y a le réalisme de l’eucharistie, le réalisme de l’incarnation : Ceci est mon corps livré pour vous !
Frères prêtres, le célibat qui est le nôtre fait partie de ce réalisme. Chaque fois que nous disons « Ceci est mon corps livré pour vous » nous le disons au nom de Jésus et nous le disons en notre nom aussi. Nous le disons en vérité et avec réalisme pour la communauté, et pour le monde.
Le réalisme de l’incarnation n’est pas fait de raisonnement nécessaire ; il est fait d’amour gratuit. C’est pourquoi nous assumons le célibat non comme une règle nécessaire mais comme un appel à aimer du plus grand amour. Pourquoi Jésus était-il célibataire ? C’est cette question que nous posons quand nous nous demandons, quand la communauté voire la société nous demande : pourquoi êtes-vous célibataire ? La condition de célibataire de Jésus est le fondement suprême de notre engagement.
Pourquoi Jésus était-il célibataire ? La réponse est difficilement compréhensible … sauf peut-être par les plus pauvres ; ceux précisément qui sont dans la solitude de la prison ou de la cécité ; ceux qui sont dans l’oppression et qui attendent une année de bienfaits. Notre célibat n’est vrai que s’il est signe de pauvreté et de communion avec les plus pauvres ; s’il est en même temps union à Jésus qui s’est fait pauvre et chaste.
+ Dominique Lebrun
Evêque de Saint-Étienne