Edmond Michelet [1899-1970]
Une existence toujours ouverte à la réconciliation
Résistant et déporté, puis ministre à plusieurs reprises, ce père de sept enfants a enraciné ses nombreux engagements dans la charité et l’Eucharistie. L’enquête canonique en vue de sa béatification vient d’être ouverte.
Juin 1940. Honte de la débâcle ! Pour Edmond Michelet, agent commercial en produits alimentaires à Brive, père de sept enfants, ce n’est pas l’heure de courber la tête, c’est l’heure de résister. Le 17 juin, il distribue un tract sur lequel il a recopié des passages prophétiques de Charles Péguy écrits un quart de siècle plus tôt : « En temps de guerre, celui qui ne se rend pas est mon homme, quel qu’il soit, d’où qu’il vienne, et quel que soit son parti… Et celui qui se rend ne sera jamais qu’un salaud, quand même il serait marguillier de sa paroisse… ». Interrogé sur ce tract vingt ans plus tard, au lendemain de sa démission du poste de ministre de la Justice, il dira : « Mon Dieu, que la France paraissait fatiguée et pauvre de force, tant au spirituel qu’au temporel, en ces jours de juin 1940 ! » Et de relire les propos de Péguy : « C’est que la France a à pourvoir à deux tâches et à deux fidélités, à sa vocation de chrétienté et à sa vocation de liberté. »
Chez Edmond Michelet, l’entrée en résistance est un sursaut moral contre la lâcheté, et surtout contre ce qui apparaissait clairement comme radicalement contraire à la foi chrétienne. Le nazisme ruinait la foi, cela suffisait pour le combattre jusqu’au péril de sa vie.
Dans les années d’avant guerre comme dans les vingt-cinq années d’engagement politique après la guerre et jusqu’à sa mort, le jour anniversaire de son baptême, le 9 octobre 1970, Edmond Michelet se montrera l’homme de l’initiative et l’homme de la réconciliation. Arrêté par la Gestapo le 25 février 1943 et envoyé à Fresnes, il fait passer quelques semaines plus tard à son épouse ce billet : « Que je te demande d’abord de ne parler à personne des gens de Brive qui m’ont envoyé ici. Je leur pardonne de tout mon cœur et je te supplie d’en faire autant. « Et moi, je vous dis aimez vos ennemis, priez pour ceux qui vous maltraitent ». N’oublions pas que c’est à un travail de réconciliation que nous sommes appelés. N’élargissons pas les fossés. Je compte bien sur toi pour cela. Calme, discrétion, charité chrétienne. »
Où chercher le secret d’une telle existence toujours ouverte à la réconciliation, et persévérante dans la fraternité envers tous ? Dans l’Eucharistie, indéniablement, dont Edmond Michelet s’est nourrie et pour laquelle il a dit qu’il avait connu l’honneur plus grand que tous les autres honneurs en la portant aux prisonniers et aux mourants à Dachau. Le secret de sa vie ne se comprend pas non plus sans l’intercession quotidienne de la Vierge Marie, priée chaque jour, ni sans le très bel amour conjugal avec Marie Vialle, son épouse, « l’incomparable Mamé » comme il disait.