P. Henri Bissonnier (1911-2004)
Serviteur et apôtre des personnes handicapées
Animé par le souci d’éduquer et évangéliser les plus faibles, ce prêtre et professeur à la santé fragile multiplie les initiatives en faveur des enfants et des jeunes handicapés.
À l’École d’éducatrices spécialisées de Neuilly, en 1950, je découvre le père Henri Bissonnier, professeur de psychopédagogie spécialisée. Ce maître nous marque par son respect et sa délicatesse pour les personnes handicapées. « Au petit enfant le plus handicapé, Dieu dit comme à ses plus grands prophètes : « Je t’ai appelé dès le sein de ta mère. » »
En fin d’études, il m’appelle à une collaboration. Une chance d’être près de ce prêtre, pionnier au service de « nos Seigneurs les pauvres » : « Ma raison de vivre après Dieu lui-même aura été la valeur unique de l’homme, de toute femme et de tout homme quel que soit son état physique, social ou moral. » Il y est préparé. Dernier de trois garçons (dont Raymond, prêtre comme lui à Paris), Henri est très fragile. Atteint de tuberculose, il séjourne en sanatorium et en stations climatiques, familier de ceux qui souffrent, isolés de la société et de l’Église.
À son ordination, « on ne donne pas cher de sa peau », selon son expression. Sept ans, il vivra, en montagne, aumônier et catéchiste dans des centres de cure. Dès les années cinquante, « obsédé » par l’éducation et l’évangélisation des plus faibles, il enseigne dans les écoles d’éducateurs spécialisés, à la Catho de Paris et à l’Université de Louvain. Il écrit des centaines d’articles, une vingtaine d’ouvrages, nourris de son expérience, en particulier à l’hospice de Bicêtre où il élabore une pédagogie catéchétique spécialisée pour des enfants et adolescentes touchées par un handicap mental, et souvent psychique et social. Au BICE, il lance la Commission médico-pédagogique et psychosociale qui va le propulser dans de hautes instances internationales et l’amener à voyager dans une soixantaine de pays. « Pendant de longues années, j’ai changé de lit en moyenne deux nuits sur trois. »
Il suscite par ailleurs des initiatives, telles que des établissements-pilotes spécialisés ou le Secrétariat catholique pour l’enfance et la jeunesse inadaptées (Sceji). Il m’encourage à fonder l’Office chrétien des personnes handicapées (OCH) et la revue Ombres et lumière à laquelle il collabore jusqu’à la veille de sa mort.
En 1974, il se retire peu à peu dans les Hautes-Alpes. Mais là aussi, « la charité du Christ » le presse. Plus que jamais nécessaire aujourd’hui, car si des progrès considérables ont été réalisés pour les personnes handicapées, jamais elles n’ont été aussi menacées dans leur dignité et dans leur vie. Le père Bissonnier continue de nous y appeler : « Que les pauvres soient évangélisés afin qu’à leur tour ils nous évangélisent. »
Marie-Hélène Mathieu
Fondatrice de l’Office chrétien des personnes handicapées et de l’association internationale Foi et lumière