« Paradoxes et Mystère de Noël », par Mgr Wattebled
L’événement familial et discret, à la mesure de la simplicité de Marie, de Joseph, des bergers, est commémoré depuis des siècles à une date conventionnelle. Pourquoi a-t-il pris une telle dimension, inspirant les crèches naïves des enfants comme les tableaux somptueux des artistes, les cantiques paroissiaux comme les chefs-d’œuvre musicaux ?
Pourquoi l’événement a-t-il pris place dans notre calendrier et offre-t-il l’occasion de tant de manifestations festives, culturelles, religieuses ?
D’où vient l’atmosphère si particulière de la nuit et du jour de Noël ?
D’où vient l’importance de nous retrouver en famille, du moins quand c’est possible ?
De la joie d’être là, d’être ensemble, de la joie de donner et de recevoir, de manifester la proximité avec les uns et les autres ?
Oui, sans doute. Mais qu’adviendra-t-il quand la fête sera terminée ? Les préparatifs sont longs et la fête s’achève si rapidement…
S’il ne s’agissait que d’un anniversaire, d’émotion ou de nostalgie, nous mériterions le reproche d’entretenir des illusions. Qu’en est-il d’ailleurs pour les personnes isolées, malades, emprisonnées ou exilées, déprimées, exposées au danger ou tout simplement de service ce jour-là ?
Dans la réalité de son Mystère, si Noël évoque le passé, c’est pour nous tourner vers l’avenir. Notre regard, notre prière, nos célébrations s’arrêtent sur la crèche pour en recevoir une espérance renouvelée. Car Jésus viendra de nouveau, « revêtu de sa gloire, afin que nous recevions dans la pleine lumière ce que nous attendons en veillant dans la foi » (Première préface de l’Avent).
C’est dans cette espérance que nos frères chrétiens brimés ou persécutés vont eux aussi célébrer Noël, ainsi que tous ceux qui sont éprouvés et dont nous voulons être proches. Le Verbe s’est fait chair, le Verbe de vie s’est laissé voir et toucher pour nous entraîner dans sa communion avec le Père. Jésus nous révèle l’humilité de Dieu. Il interroge notre liberté. Vulnérable nouveau-né, il nous demande déjà : « M’aimes-tu et me reconnais-tu dans les plus petits comme dans les plus grands de tes frères ? ».
Qui donc est Dieu si démuni, si grand, si vulnérable ?
Qui donc est Dieu pour nous ouvrir sa joie et son royaume ?
Qui donc est Dieu pour nous aimer ainsi ? (Cantique L 82)
Le 16 décembre 2010
+ Robert WATTEBLED
Evêque de Nîmes