L’Église catholique en France travaille sur l’écriture d’une nouvelle règle pour la formation des prêtres

Réunis en assemblée plénière à Lourdes, les évêques de France se penchent sur l’écriture d’une nouvelle ratio nationalis, la transcription pour la France du texte publié en 2017 par l’Eglise universelle, fixant le cadre de la formation des futurs prêtres. Entretien avec Monseigneur Jérôme Beau, évêque du diocèse de Bourges, président de la CEMOLEME en charge du dossier.

Mgr Jérome Beau à l'Assemblée plénière des évêques de novembre 2019

Mgr Jérome Beau à l’Assemblée plénière des évêques de novembre 2019

Monseigneur, le dernier texte fixant le cadre de formation des prêtres datait de 1970, pourquoi le refondre maintenant ?

En vérité, les normes précédentes dataient véritablement de l’époque du Concile Vatican II. Personne ne peut dire que le monde n’a pas changé en cinquante ans ! La formation des séminaristes se doit d’être révisée pour répondre à ces évolutions.

Quel a été le processus ?

Depuis 2 ans, la Commission épiscopale pour les ministres ordonnés et les laïcs en mission ecclésiale (CEMOLEME), travaille à l’écriture d’une ratio nationalis (complément pour l’Église de France de la ratio fundamentalis parue en 2017). Elle est composée de cinq évêques dont moi-même qui la préside, d’un prêtre, et d’une équipe de rédacteurs dirigée par le père Jean-Luc Garin, ancien supérieur du séminaire de Lille. Nous avons aussi fait le choix d’avoir des temps de travail avec tous les formateurs actuels et d’autres évêques, sous la forme de deux sessions de trois jours, en forme synodale. Ceci permet au texte de s’enraciner dans une expérience actuelle de la formation, ce qui en facilitera certainement l’adoption. Enfin, tous mes frères évêques en recevront d’ici décembre une version sur laquelle ils sont invités à se prononcer.

Que se passera-t-il ensuite pour la vie du texte ?

Si les changements demandés ne remettent pas fondamentalement en cause son contenu, il pourrait être voté lors de notre assemblée d’avril ou novembre 2020. Après quoi il sera soumis pour approbation à la congrégation pour les prêtres, au cardinal Stella et à Mgr Patron Wong,  particulièrement en charge du dossier. Une fois approuvé, il entrera en vigueur. Ensuite, chacun de la trentaine de séminaires présents sur notre territoire devra traduire les nouvelles directives dans son règlement intérieur, pour se l’approprier localement.

Vous parliez de changements dus aux évolutions de la société, quels sont les points d’attention du texte actuel ?

Ils sont au nombre de cinq.

La culture chrétienne : les jeunes qui entrent au séminaire aujourd’hui sont parfois nés de familles chrétiennes, mais dans un monde qui ne l’est manifestement plus. À nous de leur redonner cet enracinement, dans le Christ, sa Parole, le service du prochain, par le biais de l’année de propédeutique (année préparatoire) qui devient obligatoire.

Le flou des repères : notre monde a des repères flous par rapport aux valeurs de l’évangile, et ce flou traverse aussi les personnes. Il n’est pas extérieur aux séminaristes. Nous faisons appel de façon plus systématique aux sciences humaines pour adresser cette réalité, aider chacun à mieux se connaître.

La mission : en communion avec le peuple de Dieu, et grâce aussi à des profils de formateurs plus variés (dont des femmes), il s’agit de comprendre la mission aujourd’hui.

L’apprentissage par la pratique : le ministère de prêtre est un ministère qui s’apprend dans une relation de communion. Après le diaconat, chacun sera invité à une synthèse vocationnelle et de sa formation, au cours d’une insertion en paroisse au cours de laquelle il sera aidé et guidé dans sa collaboration avec les autres.

Dernière évolution, et non des moindres : la formation permanente. Comme dans le reste de la société, le temps est fini d’une formation unique pour toute la vie. La formation d’aujourd’hui ne peut pas répondre aux besoins de la personne pour les 50 ans à venir. On peut dire que l’ordination sacerdotale viendra clore un premier temps de formation, pour en ouvrir un second, celui de la formation permanente qui durera tout le temps du ministère.

Propos recueillis par Florent Masson du diocèse de Chalons.

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