Le pape François : un médiateur diplomatique dans un monde en mutation

Le pape François a poursuivi et renforcé la diplomatie active du Saint-Siège depuis son élection en 2013, s’inscrivant dans la continuité de ses prédécesseurs tout en apportant sa touche personnelle.
Le pontificat du pape François se caractérise par une diplomatie active et une volonté de jouer un rôle de médiateur dans un monde de plus en plus divisé. Depuis son élection en 2013, le Saint-Père a cherché à naviguer entre son rôle de guide spirituel et celui d’acteur diplomatique, tout en évitant d’être perçu comme un opposant politique trop direct.
Le pape François, premier pontife originaire de l’hémisphère sud, a marqué un tournant significatif dans la diplomatie du Vatican en mettant l’accent sur les préoccupations et les perspectives des pays du Sud global.
Les défis diplomatiques du pape François
La promotion de la paix et du dialogue
Avec le pape François, le Saint-Siège promeut activement la paix, le dialogue international, interculturel et religieux, tout en préservant sa neutralité sur les questions politiques. Il a notamment pris position en faveur du désarmement nucléaire, votant pour la première fois en 2017 le Traité d’interdiction des armes nucléaires (TIAN).
En 2025, le Pape appelle à une « diplomatie de l’espérance ». Cette approche vise à promouvoir la paix et la justice dans le monde. Elle repose sur quatre piliers fondamentaux : la vérité, le pardon, la liberté et la justice. Le Pape appelle à une diplomatie qui dépasse la logique de l’affrontement pour embrasser celle de la rencontre, en mettant l’accent sur la protection de la vie humaine et la dignité de chaque personne.
L’engagement sur les enjeux globaux
Le Pape a établi des priorités sur des questions comme le climat, la santé, l’égalité hommes-femmes, les migrations et l’aide au développement. Il s’implique particulièrement en faveur du développement humain intégral.
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- Migrations : Le pape François a placé le soutien aux migrants au cœur de son action dès le début de son pontificat. En 2013, il a effectué sa première visite à Lampedusa pour attirer l’attention sur la nécessité d’accueillir les migrants traversant la Méditerranée. Il a dénoncé la « mondialisation de l’indifférence » et soutenu le pacte de Marrakech sur les migrations en 2018.
>> Si vous le souhaitez, consultez notre dossier sur le Pape et les migrations << - L’écologie et le climat. Le Pape a publié deux exhortations majeures sur les questions environnementales, faisant de l’écologie un axe central de son enseignement. Il promeut une approche globale liant protection de l’environnement et justice sociale.
>> Si vous le souhaitez, consultez notre dossier sur le Pape et l’écologie intégrale << - Exclusion. Le pape François s’implique en faveur du « développement humain intégral », abordant les thèmes de l’exclusion, des périphéries et de la pauvreté. Il plaide pour une aide au développement plus équitable.
>> Si vous le souhaitez, consultez notre dossier sur le Pape et les périphéries <<
- Migrations : Le pape François a placé le soutien aux migrants au cœur de son action dès le début de son pontificat. En 2013, il a effectué sa première visite à Lampedusa pour attirer l’attention sur la nécessité d’accueillir les migrants traversant la Méditerranée. Il a dénoncé la « mondialisation de l’indifférence » et soutenu le pacte de Marrakech sur les migrations en 2018.
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Ces initiatives montrent son engagement à porter le message de l’Église aux marges de la société et à promouvoir la justice sociale à l’échelle mondiale.
Une attention particulière aux zones de conflits et aux crises humanitaires
La diplomatie pontificale est très active sur les dossiers liés au Moyen-Orient, à l’Afrique, à l’Asie et l’Europe, notamment dans les régions de crise. Elle s’efforce de répondre aux crises humanitaires mondiales, telles que les conflits en Syrie, au Soudan du Sud, et au Congo.
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- Pour la question des chrétiens d’Orient face aux persécutions, le Pape mobilise une aide humanitaire importante tout en prônant une politique d’accueil des réfugiés. D’ailleurs, il a été un fervent défenseur des couloirs humanitaires, les considérant comme une solution cruciale pour sauver des vies et offrir une voie sûre et légale aux réfugiés. Il a aussi soutenu les initiatives de la Communauté de Sant’Egidio, qui a ouvert le premier couloir humanitaire en décembre 2015.
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Les méthodes diplomatiques
Un réseau diplomatique très étendu
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- Malgré sa petite taille (44 hectares), le Saint-Siège en tant que micro état-état entretient des relations diplomatiques avec 184 États, y compris ceux où les catholiques sont peu nombreux, comme l’Iran ou la Mongolie. Le Pape François a dernièrement établi des relations avec le Sultanat d’Oman (2023) et un rapprochement avec le Vietnam. Seuls 13 pays n’entretiennent pas de relations diplomatiques avec le Vatican comme l’Afghanistan, la Chine, l’Arabie Saoudite ou la Corée du Nord.
- Le Vatican possède un vaste réseau d’information et d’action à travers les évêques, les églises locales et les ONG catholiques. Le Saint-Siège dispose de 120 ambassadeurs et nonces apostoliques dans le monde, ce qui témoigne de son influence et de son réseau d’informations unique à travers le monde. 91 ambassades accréditées près le Saint-Siège sont installées à Rome.
>> Si vous le souhaitez, consultez notre dossier sur les nonces apostoliques << - Depuis 1964, le Saint-Siège dispose d’un statut d’observateur permanent à l’ONU et participe à près de 30 institutions internationales comme l’Unesco ou l’OMS. Le pape François est un fervent défenseur du multilatéralisme et considère l’ONU comme un forum international essentiel pour la convergence d’intérêts divers. Il a souligné l’importance de l’ONU pour unir les nations et rapprocher les peuples, la qualifiant de « pont entre les peuples ».
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Les tensions géopolitiques mondiales
Le pape François joue un rôle actif dans les tensions géopolitiques mondiales, adoptant une approche diplomatique complexe qui reflète les changements dans l’équilibre mondial du pouvoir. Il a fait des gestes de rapprochement sans précédent envers la Russie et la Chine, deux puissances majeures défiant l’ordre atlantique.
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- Le dossier chinois revêt une importance capitale dans les relations diplomatiques du Vatican. L’accord entre le Saint-Siège et la République populaire de Chine concernant la nomination des évêques a été initialement signé le 22 septembre 2018. François poursuit les efforts d’amélioration des relations avec Pékin en renouvelant l’accord avec la Chine sur la nomination des évêques en octobre 2024. Ce dernier renouvellement, qui étend la validité de l’accord jusqu’en 2028, témoigne d’un « consensus atteint pour une application fructueuse de l’accord provisoire ». Il s’agit d’une évolution significative dans le dialogue entre le Saint-Siège et la Chine, montrant une progression vers une relation plus stable et durable.
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- Depuis le début de l’invasion en Ukraine, le 24 février 2022, le Saint-Siège a dû maintenir un délicat équilibre entre ses relations avec le patriarcat de Moscou et son soutien à la souveraineté ukrainienne. Le Saint-Siège adopte une approche nuancée en reconnaissant l’Ukraine comme victime d’agression, appelle à une solution diplomatique et à des négociations et se concentre sur des objectifs humanitaires plutôt que sur une médiation directe entre la Russie et l’Ukraine. Les efforts du Vatican ont contribué à des résultats concrets comme la libération de 388 mineurs ukrainiens et la libération de dix prisonniers dont deux prêtres rédemptoristes.
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L’approche avec les pays du Sud global
Depuis son élection en 2013, le pape François a adopté une approche active face aux tensions géopolitiques mondiales, prônant le dialogue, la paix et la justice sociale. Sa vision géopolitique se distingue par une attention particulière aux « périphéries » du monde, rompant avec l’eurocentrisme traditionnel du Vatican pour s’intéresser davantage aux pays du Sud.
Originaire d’Argentine, Jorge Mario Bergoglio a été profondément marqué par son expérience en Amérique latine, notamment par la théologie du peuple et la proximité avec les plus démunis. Son pontificat reflète cette sensibilité, mettant en avant une Église humble, engagée et solidaire des périphéries du monde. Il a fait de la diplomatie vaticane un levier d’action en faveur des pays du Sud.
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- Parmi ses 47 déplacements, le pape François a entrepris des voyages significatifs, notamment aux Emirats arabes unis en 2019, en Irak en 2021, en Indonésie, au Timor oriental et à Singapour en 2024. Ces visites visaient à renforcer le dialogue interreligieux et à promouvoir la paix dans des régions marquées par la diversité ethnique et religieuse ; ou dans des zones négligées par ses prédécesseurs comme en Centrafrique, au Mozambique ou à Madagascar. Cf. l’article sur l’ouverture de la Porte Sainte à Bangui en Centrafrique (2015).
- L’inculturation. Le Vatican cherche à dissocier le catholicisme de l’image d’une religion occidentale, en favorisant l’émergence d’Églises catholiques locales et en nommant des cardinaux issus de pays du Sud.
>> Si vous le souhaitez, consultez notre dossier sur le rôle des cardinaux <<
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Médiation et dialogue
La diplomatie vaticane sous le pontificat du Pape François se caractérise par une volonté de dialogue, de médiation et d’engagement en faveur de la paix. Le Pape a joué un rôle de médiateur dans les conflits, organisant des rencontres entre dirigeants ennemis et proposant ses bons offices.
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- Cette approche s’est notamment illustrée avec le rapprochement entre Cuba et les États-Unis (2014).
- Bien que n’ayant pas participé directement aux négociations, le pape François a aussi utilisé son influence morale et diplomatique pour favoriser le dialogue et la réconciliation en Colombie, jouant un rôle de médiateur indirect, mais significatif dans le processus de paix avec les FARCS (2016).
- La rencontre historique entre le pape François et le patriarche Kirill à Cuba en 2016 a favorisé un rapprochement significatif entre le Vatican et le Patriarcat de Moscou.
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Soft power moral
Le « soft power » repose sur la capacité du Vatican à influencer le comportement d’autres États et acteurs internationaux sans recourir à la force, mais plutôt par la persuasion, le dialogue et l’autorité morale. Cette influence s’exerce malgré l’absence de puissance économique ou militaire significative, illustrant parfaitement le concept de « soft power ».
Les limites de l’action diplomatique du pape François
La diplomatie vaticane sous le pape François est caractérisée par une volonté de promouvoir la paix, le dialogue, et les droits de l’homme, tout en étant confrontée à des limites significatives liées à l’absence de pouvoir militaire, la complexité des relations internationales, et les résultats mitigés de ses initiatives diplomatiques.
L’absence de pouvoir militaire
La diplomatie vaticane est confrontée au défi de promouvoir la paix sans disposer de pouvoir militaire. Cette situation limite son influence sur les questions de guerre et de paix, bien que le Vatican utilise son influence morale et spirituelle pour promouvoir le dialogue et la résolution pacifique des conflits.
La complexité des relations internationales
La diplomatie vaticane doit naviguer dans un environnement international complexe, marqué par des conflits multiples et des intérêts divergents. Les efforts du Vatican pour promouvoir la paix et la justice sont souvent entravés par les réalités géopolitiques et les résistances des États.
Résultats mitigés de certaines initiatives diplomatiques
Malgré les efforts du pape François pour intervenir dans divers conflits, les résultats sont souvent limités. Par exemple, les initiatives en Afrique et au Moyen-Orient n’ont pas toujours abouti à des solutions durables, illustrant les limites de l’influence vaticane dans ces régions.
Une neutralité difficile à maintenir
Si le Vatican cherche à être un médiateur neutre, certaines prises de position (ex. sur la guerre en Ukraine ou au Haut-Karabakh) sont perçues comme insuffisantes ou partiales.
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