“Le contenu de notre partenariat, c’est la fraternité entre deux Églises sœurs et ce n’est pas un vain mot. Nous avons bien réfléchi (…). Il s’agit de deux Églises qui se rencontrent comme partenaires, non pas dans un système vertical, mais à l’horizontal. Voilà ce que nous souhaitons”, rappelait Mgr Luc Ravel, archevêque de Strasbourg, début septembre lors du conseil épiscopal où il recevait trois prêtres ivoiriens du diocèse de Grand-Bassam, accueillis pour une mission de trois ans dans le Bas-Rhin. L’idée était en germe depuis quelques années déjà. Avant la pandémie du covid, Mgr Ravel réfléchissait à nouer un lien privilégié avec un diocèse d’Afrique, voyant dans les relations avec ce continent un signe des temps, comme il l’indique dans sa lettre pastorale Par-delà les mers (déc. 2022) : “L’Afrique est là toute proche, elle est chez elle et elle est chez nous. L’exclusion ou la réexpédition ne peut pas être la « solution » chrétienne. (…) Il [s’agit] de sentir par le cœur ce qui se dessine au présent et nous indique une route pour l’avenir. Elle ne sera plus d’aller chez eux pour les évangéliser, ni qu’ils viennent chez nous pour nous remplacer, il s’agit de s’associer pour évangéliser ici et là-bas. Un pied sur une rive de la mer et un pied sur l’autre”.

Né d’une rencontre

Au printemps dernier, l’archevêque de Strasbourg fait un premier voyage à Grand-Bassam, au Sud de la Côte-d’Ivoire et à l’Est d’Abidjan, avec un de ses vicaires généraux et un vicaire épiscopal originaire du Sénégal. “Avant de partir, il n’était pas certain que l’essai se transforme. Mais l’accueil très chaleureux qu’il a reçu et l’expérience du voyage l’ont complètement convaincu. Le fait de se sentir chez soi, si loin de l’Alsace, et c’est ce qu’il a ressenti, l’a fortement marqué”, partage Marie Weber, membre du service de la Mission Universelle pour le diocèse de Strasbourg. Depuis trente ans des relations existaient entre l’Église d’Alsace et celle de Grand-Bassam, des prêtres ivoiriens venant régulièrement à Strasbourg notamment pour leurs études. Désormais la démarche se renouvelle et s’inscrit dans un partenariat officialisé le 16 octobre 2022, à l’occasion de la messe d’installation des prêtres de Grand-Bassam, présidée par Mgr Luc Ravel en l’église Sainte-Croix à Lingolsheim. “Le désir de ce partenariat n’est pas d’ordre clérical, même si l’échange de prêtres est le plus simple à mettre en place. Dès le départ, l’idée est de s’ouvrir à d’autres initiatives, à des échanges d’expérience et à la rencontre pour la mission”, précise Klaus-Martin Simon, délégué diocésain à la Mission universelle. Premier jalon pour coordonner la démarche : la constitution d’une équipe de pilotage.

Se rencontrer ici et là-bas

Depuis que le partenariat est engagé, Marie Weber et Klaus-Martin Simon découvrent des personnes du diocèse originaires de Grand-Bassam, et font connaissance avec d’autres ayant un lien privilégié avec l’Afrique : anciens coopérants, bénévoles très actifs d’associations, etc. Aux côtés de ces personnes, d’autres sont encore appelées par les vicaires épiscopaux pour étoffer l’équipe de pilotage et être ambassadrices des cinq vicariats du diocèse de Strasbourg. Du côté de Grand-Bassam une équipe issue des six régions du diocèse se forme également. “C’est embryonnaire, mais nous avons des passionnés et des personnes motivées par la rencontre !”, lance Klaus-Martin Simon.

Deuxième jalon : deux voyages sont organisés en 2023. Tout le conseil épiscopal ainsi que le supérieur du séminaire se déplacent ces jours-ci à Grand-Bassam avec le délégué diocésain de la Mission universelle. L’idée ? Que chacun rencontre son homologue ou un responsable de service lors d’activités partagées et de rendez-vous individualisés. “C’est en tissant des liens de proximité, que nous pourrons poursuivre nos échanges, construire ce partenariat et en devenir véritablement acteur. Le diocèse de Grand-Bassam voit la démarche de la même manière que nous”, souligne Klaus-Martin, qui se réjouit à l’avance de l’accueil à l’africaine et des célébrations avec plus de 3000 personnes déjà prévues. Un second voyage est également programmé en octobre prochain pour les laïcs de l’équipe de pilotage.

“Nous pouvons nous soutenir et nous apporter mutuellement dans nos missions. Il y a déjà une équipe ACE du Haut-Rhin en lien avec une autre à Grand-Bassam, de petites initiatives voient le jour. Nous attendons beaucoup des voyages à venir pour faire des pas de plus”, relève Marie Weber. Dans sa lettre pastorale, Mgr Ravel donne des axes très concrets de relations à développer pour s’ouvrir à la fraternité et vivre cette expérience. Une charte, en cours d’écriture, viendra également rappeler le cadre et les objectifs de la démarche. Nombre de propositions sont à imaginer, en particulier avec les jeunes. L’esprit du partenariat reste à essaimer, même s’il ne reçoit pas toujours un accueil favorable, certaines paroisses ayant du mal à en comprendre la dynamique. “Certes, cela demande un effort, mais l’on sait qu’en retour nous recevrons au centuple ! Nous invitons l’Esprit saint dans notre bateau et c’est le même esprit qui souffle là-bas aussi”, sourit Klaus-Martin Simon. Il confie : “J’engage mon énergie dans cette aventure car je crois qu’elle vient du Seigneur. Il y a là un enjeu pour la mission. Je suis heureux de vivre l’expérience de la rencontre avec des personnes qui portent le Christ et de faire route avec elles”.