Intervention de Mgr Javier Lozano Barragan, lors de la XXVIe Session extraordinaire de l’Assemblée générale de l’ONU sur le Sida, 27 juin 2001
En reconnaissance de l’importance de cette session extraordinaire, S. S. le pape Jean-Paul II se joint aux dirigeants du monde qui s’efforcent de faire face à la pandémie de VIH/sida. En réponse à la lettre que lui a adressée le Secrétaire général, M. Kofi Annan, Sa Sainteté m’a demandé de porter son message personnel au Secrétaire général et à l’Assemblée. Le texte de ce message, dont je vais lire quelques paragraphes, est disponible à l’extérieur de la salle de l’Assemblée générale.
Dans son message au Secrétaire général, Sa Sainteté écrit :
L’épidémie de VIH/sida représente indubitablement une des catastrophes majeures de notre époque, en particulier pour l’Afrique. Il ne s’agit pas seulement d’un problème de santé, car l’infection a des conséquences dramatiques sur la vie sociale, économique et politique des populations.
Je salue les efforts actuellement en cours sur le plan national, régional et international pour relever ce défi, grâce à la mise sur pied d’un programme d’action visant à la prévention et au traitement de la maladie. L’annonce que vous avez faite de la création prochaine d’un fonds mondial pour la lutte contre le VIH/sida et pour la santé est un motif d’espoir pour tous. Je souhaite de tout coeur que les premières prises de position favorables se concrétisent rapidement par un soutien effectif.
…
Je ne peux terminer ce message sans remercier les savants et les chercheurs du monde entier de leurs efforts pour trouver des thérapies contre ce terrible mal. Ma gratitude s’adresse aussi aux professionnels de la santé et aux bénévoles pour l’amour et la compétence dont ils font preuve dans l’assistance humaine, religieuse et médicale de leurs frères et soeurs.
Sur tous ceux qui sont engagés dans la lutte contre le VIH/sida, en premier lieu les malades et leurs familles, ainsi que sur les participants à la session extraordinaire, j’invoque les bénédictions de Dieu Tout-Puissant. »
Deux types d’action sont nécessaires face à ce mal : la prévention et le traitement. Les deux sont d’une importance cruciale, bien qu’il vaille mieux, bien sûr, prévenir que guérir. Pour prévenir la maladie, il faut d’abord en faire le bilan honnête, comme d’une affection qui touche réellement l’individu dans sa totalité. Dans bien des cas, en effet, le VIH/sida a des répercussions sur les valeurs existentielles : c’est une véritable pathologie de l’esprit qui ne nuit pas qu’au corps, mais à l’ensemble de la personne, à ses relations avec autrui et à sa vie sociale, et s’accompagne souvent d’une crise de valeurs morales.
Comme beaucoup d’orateurs l’ont souligné, la misère dans laquelle vit une grande partie de l’humanité est un facteur très important de la propagation rapide du sida. Vingt pour cent de l’humanité dispose de 86 % des ressources, quand les 14 % restants doivent être partagés par 80 % de l’humanité. Il ne fait aucun doute que, pour combattre le sida, il est essentiel d’accroître la justice sociale au niveau international, pour replacer l’économie dans une perspective différente de celle d’une mondialisation débridée. Le pape exhorte les gouvernements et la communauté scientifique à poursuivre la recherche sur la maladie. Malheureusement, il est impossible dans de nombreux pays de soigner les malades du sida à cause du coût élevé des médicaments brevetés. Le pape nous rappelle l’enseignement constant de l’Église, : ‘il existe une hypothèque sociale sur toute propriété privée et cela vaut aussi pour la propriété intellectuelle. Les lois du profit ne peuvent seules s’appliquer à ce qui est essentiel dans la lutte contre la faim, la maladie et la pauvreté.
Pour que la lutte contre le sida soit plus efficace, le Saint-Siège propose d’appliquer les plans mondiaux visant à coordonner la lutte contre la maladie; il invite tous les gouvernements à tirer pleinement parti de l’autorité de l’État face à l’épidémie et il suggère notamment d’y consacrer des budgets suffisants. Il faut également intensifier l’éducation aux valeurs de la vie, de l’amour et de la sexualité dans le cadre de l’école comme en dehors. Il faut insister sur l’égalité des hommes et des femmes et éliminer toute forme de discrimination envers les malades du sida et leur apporter un soutien spirituel.
Le Saint-Siège recommande de multiplier les centres de traitement des malades, d’informer et d’éduquer le public sur le sida et de favoriser une plus grande participation de la société civile à la lutte contre le sida ainsi que l’engagement de toutes les personnes de bonne volonté dans cette lutte.
Le Saint-Siège recommande également d’inviter les pays industrialisés à assister les pays qui ont besoin d’aide dans cette campagne tout en évitant toute apparence de colonialisme; d’éliminer l’exploitation sexuelle, en particulier liée au tourisme ou aux migrations; de réduire le plus possible les coûts des médicaments antirétroviraux pour traiter le VIH/sida; d’intensifier les campagnes pour prévenir la transmission de la maladie de la mère à l’enfant; d’accorder une attention particulière au traitement des malades du VIH/sida et à la protection des orphelins du sida ainsi qu’aux groupes les plus vulnérables.
Mgr Javier Lozano Barragan,
Président du conseil pontifical pour la pastorale de la Santé, lors de la XXVIe Session extraordinaire de l’Assemblée générale de l’ONU sur le Sida, le 27 juin 2001
Source :Site de l’ONU