Message de Mgr Schockert, pour la Journée mondiale du Migrant et du Réfugié en 2010

Schockert Claude - Belfort Monbéliard

On ne t’appellera plus : « La délaissée », on n’appellera plus ta contrée: « Terre déserte » (Isaïe 62,4).

Chers frères et sœurs,
Les mots du prophète Isaïe résonnent d’une manière particulière en cette Journée Mondiale du Migrant et du Réfugié du 17 janvier 2010.
Le visage des migrants et des réfugiés en France prend de plus en plus souvent les traits de mineurs. Avec ou sans leurs parents ils fuient leur pays en guerre ou trop pauvre pour les nourrir. Ils sont des milliers de mineurs à emprunter les routes de la migration. Ces routes, semées d’embûches pour un adulte, sont encore plus éprouvantes pour un plus jeune.

Déjà, dans son message pour la journée du migrant et du réfugié de 2007, Benoît XVI nous invitait à regarder de plus près les nombreux enfants et adolescents concernés par la migration. Il écrivait : « il est impossible de se taire face aux images bouleversantes des grands camps de réfugiés présents dans les diverses parties du monde. Comment ne pas penser que ces petits êtres sont venus au monde avec les mêmes attentes légitimes de bonheur que les autres ? Et en même temps, comment ne pas rappeler l’importance fondamentale que revêtent les phases de l’enfance et de l’adolescence pour le développement de l’homme et de la femme, et qu’elles requièrent stabilité, sérénité et sécurité … Comment peuvent-ils considérer leur avenir avec confiance ? »

Cette journée mondiale doit nous aider à porter un regard de foi, à ouvrir notre cœur et notre raison à la situation trop souvent dramatique des mineurs migrants et réfugiés, celles et ceux qui sont trop souvent délaissés, considérés comme quantité négligeable. Nous sommes invités à prier et à réfléchir sur les situations dramatiques des mineurs migrants et réfugiés dans notre société et à voir comment nous répondons à l’appel du Seigneur qui retentit au cœur de l’Evangile : « celui qui accueillera un enfant comme celui-ci en mon nom, c’est moi qu’il accueille ». (Mt 18,5)

Les mineurs migrants et réfugiés sont fragilisés par les conditions du voyage vers une terre susceptible de les accueillir ; ils le sont par leurs conditions de vie et celles de leurs familles, quand ils ne sont pas seuls, livrés à eux-mêmes, sans repères culturels et familiaux solides.

Les enfants s’adaptant plus rapidement à la société qui les accueille se retrouvent bien souvent « parentifiés », devant agir en quasi- tuteurs de leurs parents ; ce qui entraîne un bouleversement de l’équilibre familial.

Bien souvent, ils ne connaissent pas les raisons qui ont amené leurs parents à émigrer. Un nécessaire dialogue à ce sujet s’impose. Comment aider les parents à s’exprimer devant leurs enfants ?

Ces jeunes vivent des tensions d’ordre culturel. Ce qu’ils ont reçu de leurs parents et ne peuvent renier sous peine d’une rupture de la filiation, entre en conflit avec ce qu’ils découvrent à l’école et dans les relations avec d’autres enfants de leur âge… Comment être « comme les autres » tout en étant différents ?

Bien souvent la différence est telle qu’ils développent un fort sentiment de honte, à cause d’une perception dévalorisante de leur origine. De nombreux enfants vivent très difficilement le fait que leurs parents soient sans-papiers, en situation irrégulière ou clandestine ; ils vivent les peurs de leurs parents sans en avoir le système de défense psychique ; leur foi, souvent naissante ou encore trop fragile, n’est pas assez forte pour maîtriser ce handicap.

Les relations entre enfants de toutes origines tiennent une place importante. Les enfants ont la capacité de vivre une solidarité naturelle; ils sont attentifs aux besoins et états émotifs de leurs petits camarades venus d’ailleurs. Le Réseau Education Sans Frontières témoigne que des enfants ont mis au courant leurs parents sur le sort de leurs camarades de classes interpellés ou dont les parents étaient placés en rétention. Des équipes de JOC ou d’ACE ont soutenu leurs copains et copines vivant ces situations difficiles ou dramatiques.

Aujourd’hui à tous ces enfants et ces jeunes, n’ayons pas peur de dire: « Chers, enfants, chers jeunes, gardez vivant ce sens de l’accueil de vos camarades quand vous les accueillez, quand vous êtes leurs amis, vous êtes vraiment les disciples de Jésus ».

A ces jeunes enfants et mineurs migrants et réfugiés, osons dire: « L’Eglise est votre maison, l’Eglise est votre famille. Votre vie est précieuse à nos yeux, parce qu’elle l’est aux yeux de Dieu. Nous ne vous abandonnons pas. »

Aux communautés chrétiennes de nos diocèses, rappelons, à temps et à contre temps, que le message de l’Evangile n’est pas un formulaire à choix optionnels multiples. « Celui qui accueillera un enfant comme celui-ci en mon nom, c’est moi qu’il accueille » : donnons toute sa force à cette affirmation du Christ.

L’occasion nous est donnée en cette Journée Mondiale du Migrant et du Réfugié de vivre des temps de rencontre et de réflexion. Saisissons-la afin que nos engagements, petits ou grands, contribuent à construire une société plus fraternelle pour nos enfants: leur avenir nous concerne, aidons-les à le construire.

Mgr Claude Schockert
Evêque de Belfort-Montbéliard
En responsabilité de la Pastorale des Migrants
 

Sur le même thème

à consulter sur le sujet

Documents épiscopat migrants

Pour les acteurs pastoraux ?