Quand l’Eglise soutient femmes et mères en difficulté
« Quand j’ai été abandonnée, Gare du Nord, à Paris, par mon passeur, je me croyais en Allemagne, destination pour laquelle je l’avais payé, » rapporte Ruth, érythréenne qui a fui un pays alors en guerre contre l’Ethiopie. Arrêtée par la police, elle a alors été placée trois semaines en centre de rétention. Ce fut sa chance car la CIMADE a alors appuyé sa demande d’asile qui a été acceptée au bout d’une semaine. Par l’intermédiaire de l’association les Champs de Booz (photo), un hébergement lui a été proposé chez les Sœurs Franciscaines Missionnaires de Marie.
L’afflux progressif de femmes seules sollicitant un asile en France pose un problème d’hébergement et d’insertion en région parisienne, durant le délai d’attente de la décision de l’OFPRA (l’Office français de protection des réfugiés et apatrides).
Certaines ont dû fuir rapidement leur pays laissant famille et enfants dont elles sont sans nouvelles. D’autres ont quitté leur pays pour fuir des violences raciales ou sexuelles ou un mariage forcé… Deux congrégations, Notre-Dame de Charité et les Soeurs du Bon Pasteur, rejointes ensuite par des religieuses d’autres congrégations, se sont unies en 2002 pour apporter une réponse à ces femmes. Elles ont fondé les Champs de Booz – en référence au livre de Ruth – association aujourd’hui composée d’une vingtaine de bénévoles, religieuses et laïcs, et travaillant en collaboration avec différents organismes partenaires.
Le choix de la vie
D’autres jeunes femmes en grande difficulté se présentent au 121 bd. Bineau, à Neuilly (92), au Foyer El Paso, car elles sont enceintes. Décidées à garder leur bébé, elles recherchent une aide. Pour les soutenir dès le début de leur grossesse, les soeurs espagnoles, de la congrégation des Filles de la Charité, présentes à Neuilly depuis plus de cent ans, ont décidé de leur consacrer un étage de leur foyer d’étudiantes et ont créé El Paso (« Le Passage »). Elles ont été soutenues dans ce projet par Mgr Gérard Daucourt, évêque de Nanterre et par Mgr Nicolas Brouwet, aujourd’hui évêque de Tarbes et Lourdes, qui était alors son auxiliaire. En effet, les centres maternels qui relèvent des conseils généraux ne sont tenus d’accueillir les femmes enceintes en difficulté qu’à partir du septième mois de grossesse.
Depuis le 31 mai 2010, 34 jeunes femmes ont ainsi été accueillies dans le foyer par une équipe de 22 professionnelles bénévoles dont une équipe médico-sociale et 5 religieuses. La plupart de ces femmes arrivent très déstructurées. Le discernement de leurs difficultés et l’élaboration d’un projet éducatif autour de la parentalité, leur permettent de se reconstruire. La majorité d’entre elles restent au foyer 4 à 5 mois. « Rares sont celles qui exercent un métier, mais l’enfant qu’elles attendent les aide à renaître » constate Delphine Dary, assistante sociale bénévole. Différents ateliers leur sont proposés : aide à la gestion d’un budget, soutien de projet professionnel, cours de français, groupe de paroles… « L’assiduité et la persévérance demandées les aident à se reconstruire, car la plupart d’entre elles n’ont jamais été au bout de leur projet » souligne Chantal de Boutray, coordinatrice de l’équipe et sage-femme à l’hôpital de Nanterre.
Après El Paso, plus de la moitié des femmes accueillies partent vivre en centre maternel après la naissance de leur enfant. D’autres repartent dans leur famille ou avec le père de l’enfant.
Comme beaucoup d’autres créations accueillant des femmes et des mères qui ont besoin de reprendre souffle, El Paso, comme les Champs de Booz, ne vit que grâce aux dons privés et au mécénat.