Mieux consommer
« Mieux consommer », thème de la deuxième méditation pour le Carême, à partir de « Nouveaux modes de vie ? L’appel de Laudato Si’ ».
Il est important d’assimiler un vieil enseignement présent dans diverses traditions religieuses et aussi dans la Bible. Il s’agit de la conviction que « moins est plus ». En effet l’accumulation constante de possibilités de consommer distrait le coeur et empêche d’évaluer chaque chose et chaque moment. En revanche, le fait d’être sereinement présent à chaque réalité, aussi petite soit-elle, nous ouvre beaucoup plus de possibilités de compréhension et d’épanouissement personnel. La spiritualité chrétienne propose une croissance par la sobriété et une capacité de jouir avec peu. La sobriété qui est vécue avec liberté et de manière consciente, est libératrice. (Laudato Si’, § 222 et 223)
Acheter, consommer, jeter. Quoi de plus banal dans une société dite « de consommation » sensée répondre à tous nos besoins et nous les souffler à l’oreille si nous manquons d’idées ! Quand nous semblons faillir à notre mission de consommateur, la sphère politique et économique redouble d’inventivité pour nous stimuler à nouveau.
La montagne sur laquelle nous sommes tentés de planter nos tentes n’est pas celle de la Transfiguration où se révèle un Dieu de lumière comme nous le rappelle l’évangile de ce dimanche [Mt 17, 1-9, ndlr]. Nous nous contentons trop souvent d’être fascinés par ce qui brille sans éclairer, nos nouveaux veaux d’or.
Toujours plus, quand je veux : quelle liberté ! Et pourtant, qui n’a jamais eu l’impression, même de façon fugace, d’être prisonnier de ses biens, esclaves des injonctions à consommer, saturé jusqu’à n’avoir plus envie de rien ? Qui n’a jamais éprouvé le désir de s’alléger, de se désencombrer pour poursuivre la route ?
La conversion à laquelle nous appelle le pape François n’est pas un retour à l’âge de pierre ! Elle est une invitation à redonner du sens à nos actes de consommation, à redécouvrir la dimension de l’échange au cœur de notre consommation. Consommer, ce n’est pas qu’une affaire individuelle. Consommer me met en lien, en lien avec la nature dans laquelle nous puisons, en lien avec les autres qui ont produit ce que je consomme.
Redonner du sens à notre consommation, ce pourrait être alors, au-delà du bien ou du service que j’achète, prendre soin de ces liens pour renoncer à la culture du déchet qui blesse autant la nature que l’homme. Avoir le souci de favoriser les énergies renouvelables, de recycler pour transmettre une terre habitable à nos enfants, mutualiser, porter attention à ceux qui interviennent dans la chaîne de production et de distribution en privilégiant le commerce équitable et les circuits courts, participer aux systèmes d’échanges non monétaires, voilà quelques-unes des pistes qui nous sont proposées.
Soigner ces liens, c’est réintroduire la terre et autrui dans mes choix personnels pour sortir de mes enfermements. Faire le choix de la sobriété, non par esprit de sacrifice, mais pour ouvrir des espaces de rencontre, laisser place à l’autre et au Tout Autre…
Soeur Marie-Laure Denès, op