James MacMillan Stabat Mater, The Sixteen Britten Sinfonia

Fiche de l’Observatoire Foi et culture du mercredi 9 mai 2018  sur « Stabat Mater » de James Mac Miller.

COR16150_Cover_with_Genesis_logo_1024x1024Cette fiche de l’Observatoire Foi et Culture (OFC) présente une œuvre remarquable créée par un compositeur contemporain. Il s’agit d’un Stabat Mater de James MacMillan.Le Stabat Mater est un poème (ou séquence) dont l’origine remonte au 13e siècle. Un certain Jacopone da Todi (1230-1306), franciscain italien, en est l’auteur. Ce poème se compose de 20 strophes sur la douleur de Marie au pied de la croix. Il a pour objectif d’inviter les fidèles à participer à cette terrible souffrance d’une mère qui voit souffrir et mourir son enfant.

À l’origine ce poème était chanté à la messe entre l’épître et l’évangile. Peu à peu il devient une pièce autonome. En 1727, il prendra place le 15 septembre à la messe de Notre-Dame des Sept douleurs. Il sera chanté aussi le Vendredi saint pour accompagner les chemins de croix.

Beaucoup de compositeurs ont créé des Stabat Mater. Citons Pergolèse, Antonin Dvorak et les deux derniers : Francis Poulenc en 1950 et Arvo Pärt en 1985. Au cours des siècles, on dénombre environ 500 musiciens ayant composé un Stabat Mater.

Un événement culturel et spirituel d’une grande importance vient d’avoir lieu au Vatican. À la Chapelle Sixtine, chef-d’œuvre de la Renaissance, 300 personnes ont assisté, le dimanche 22 avril dernier à un concert exceptionnel : le Stabat Mater du compositeur écossais contemporain James MacMillan, retransmis en direct sur internet.

James McMillan, né le 16 juillet 1959, est connu pour ses recherches en musique contemporaines. La foi catholique lui a inspiré plusieurs œuvres, dont un Magnificat (1999) et plusieurs messes. La musique traditionnelle écossaise l’a aussi influencé. MacMillan a créé ce Stabat Mater dans la ligne des très grands Stabat Mater de l’histoire de la musique.

Cette pièce tourmentée a été présentée pour la première fois en 2016 à Londres et a marqué les esprits, en particulier celui du cardinal Vincent Nichols, archevêque de Westminster, qui a insisté pour que le compositeur vienne présenter son œuvre au Vatican. On trouve dans cette œuvre des mélodies proches du chant grégorien. Une première pièce est un plainchant.

Dans la musique occidentale médiévale, le plain-chant est un chant, donc une musique vocale a cappella c’est-à-dire sans accompagnement instrumental. Elle est aussi monodique, c’est-à-dire à une seule voix, non polyphonique. Soprano, alto alternent. La beauté des voix ne peut qu’émouvoir. On entre ainsi dans le drame vécu par Marie au pied de la croix.

Ensuite se succèdent mélodies vocales et rythmes hachés. Après sa grande oeuvre précédente qui évoquait le Christ ressuscité dans une lumineuse douceur, James MacMillan nous offre une composition tragique. Le texte est pris au mot et MacMillan lui fait exprimer tout son poids de douleur, tout son cri de souffrance. Le Quis non posset contristari et le Sancta Mater, istud agas donnent à entendre à la fois de nombreuses dissonances déchirantes suivies de dissonances mystérieuses, de doux glissandi et des accords parfaits qui reposent. « Qui pourrait dans l’indifférence contempler en cette souffrance la mère auprès de son fils » ; « Mère Sainte, daigne imprimer les plaies de Jésus crucifié en mon coeur fortement. »« On touche ici au cœur d’une mère dans l’angoisse, comme toutes les mères le sont, à travers les âges et à travers les pays, quand leurs enfants souffrent », a expliqué le cardinal Nichols. Sous les fresques de Michel-Ange, en écoutant cette « Pietà musicale », les auditeurs ont probablement fait le lien avec la Pietà représentant la Vierge avec le corps du Christ sur ses genoux en bas dans la basilique Saint-Pierre.

Comme lors de la première à Londres, l’œuvre était interprétée, à la Chapelle Sixtine, par le chœur The Sixteen et l’orchestre de cordes Britten Sinfonia, sous la direction de Harry Christophers. Cette œuvre est écrite pour chœur et orchestre à cordes. Des solistes émergent en permanence tant du chœur que de l’orchestre. Les voix et les cordes se divisent et s’unissent. Le Stabat Mater de MacMillan, a pour sa part été commandé par la Fondation Genesis, qui soutient depuis 2001 de jeunes talents artistiques et développe le lien entre art et foi.

Peu de compositeurs vivants savent transmettre avec autant d’intensité émotionnelle une des poésies les plus puissantes de la liturgie. L’écossais James MacMillan croit en la beauté qui est profondément enracinée au cœur de sa foi chrétienne. Celle-ci est ici très présente dans le nouvel enregistrement de 2017, du Stabat Mater. MacMillan fait partie du petit nombre de compositeurs qui, dans les trente dernières années, ont su aborder un tel poème.

Avec la version de MacMillan, nous constatons un travail nouveau et profondément personnel qui montre le pouvoir de la poésie dans une manière jamais abordée par aucun autre compositeur jusqu’à présent. On peut se procurer ce CD du Stabat Mater, chez tous les disquaires.

 Hubert Herbreteau