Frères de Saint Gabriel, « aimer du cœur et de la main »

« C’est le paradis ici », annonce un des frères de la communauté. Un paradis champêtre niché dans un lieu-dit de la commune de Saint Félix-de-Villadeix, La Peyrouse, au cœur du Périgord pourpre.Un paradis malheureusement en sursis pour les douze religieux restants, compte-tenu de leur âge.

DSCN2290Il est probable en effet que cette maison de retraite pour frères âgés ferme d’ici quelques années. D’autant plus que la grande bâtisse qu’ils occupent n’est pas équipée pour être un EPHAD et ne dispose pas d’infirmière à demeure. Avec à son fronton l’inscription « Orphelinat St Georges », cette propriété fut d’abord celle de Mme Tocque, qui l’avait acquise en 1862 en héritage. Son mari mort des suites de la guerre de 1870, elle envoya son fils Georges suivre ses études au collège Stanislas, à Paris, alors tenu par les Marianistes. Au décès de Georges à l’âge de 15 ans, Mme Tocque décida de faire ériger une chapelle pour ses défunts, dans un style architectural qui rappelle la cathédrale Saint-Front de Périgueux. Une chapelle désormais à la garde des Frères de Saint Gabriel installés depuis 1931 dans cette immense demeure qui servit de 1907 à 1914 de grand séminaire, puis de colonie de vacances gérée par les Sœurs de Saint-Vincent-de-Paul et enfin de juvénat [1], puis de noviciat et enfin de maison de retraite, à partir de 1949, pour les Frères de Saint Gabriel. Ils s’occupaient alors de l’entretien des 150 hectares (dont la moitié en bois) de la propriété, aujourd’hui cédés.

En 1972, cinq sourds-aveugles qui avaient bénéficié d’une scolarité adaptée à Poitiers arrivent, accompagnés de deux frères de Saint Gabriel, retraités. Dès lors, toute une vie familiale va s’instaurer entre les frères et ces adultes. Jusqu’à ce que les frères passent le relais à du personnel laïc (une trentaine aujourd’hui pour 19 résidents), abandonnent la direction et se retirent même progressivement de l’association de tutelle institutionnelle.

Ancien enseignant dans une institution d’aveugles et de malvoyants, frère Philippe Bertrand est arrivé à La Peyrouse en 1988. Il a exercé dans le foyer installé dans un pavillon voisin en tant qu’éducateur jusqu’en 2001. « Ce fut une expérience formidable. Je pourrais raconter des faits de vie pendant des heures », commente-t-il. À 77 ans, responsable de sa communauté, il évoque avec sérénité le dépouillement volontaire consenti par ses frères. À défaut d’assurer des activités professionnelles, ceux-ci rendent aujourd’hui des services. L’un fait partie du groupe œcuménique de la paroisse de Lalinde ; un autre, bon organiste, accompagne volontiers pour la liturgie ; certains sont présents lors de l’eucharistie dans une maison de retraite et frère Philippe, pour l’instant, anime le Conseil diocésain de la vie religieuse.

Il y a surtout tous les liens créés avec les habitants du secteur. « Depuis le début, les relations ont été très fortes », témoigne frère Philippe.  Il explique : « Les frères étant à la pointe de l’agriculture aidaient les paysans à se moderniser et ceux-ci leur donnaient des coups de main. Cette réciprocité existe toujours.  Pour moi c’est le plus de notre vocation qui correspond parfaitement à la direction prise par notre chapitre général de 2018 : « Aimer du cœur et de la main ».

Chantal Joly

Une congrégation dédiée à l’éducation

Historiquement les Frères de Saint-Gabriel sont nés dans l’ouest de la France, au début du 18e siècle, pour l’éducation des enfants du peuple dans les « écoles charitables » Le tombeau du fondateur, Louis-Marie Grignion de Montfort, se trouve à Saint-Laurent-sur-Sèvre, en Vendée. Au milieu du 19e siècle, l’institut a été relancé et dynamisé par le P. Gabriel Deshayes. Il a élargi le champ de l’éducation vers les sourds et les aveugles. Les Frères de Saint-Gabriel sont aujourd’hui 1200 répartis en 33 pays et en 15 provinces religieuses : une en Amérique, trois en Afrique, deux en Europe et neuf en Asie.

[1] Du latin juvenis, homme jeune. École recevant des jeunes, équivalent à nos CEG actuels

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