Jeanne d’Arc, une sainte pour notre temps
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Jehanne, brûlée vive à 19 ans après un procès cruel et injuste, tu es toujours vivante aux yeux de beaucoup. Tu as beaucoup de choses à nous dire !
Nous te connaissons bien, parce qu’au terme de l’aventure que tu as vécue, il y eut un fameux procès à Rouen dont on a gardé toutes les paroles échangées, les nombreuses réponses que tu fis à tes juges. Réponses pleines de bon sens, d’audace et de foi, réponses qui pouvaient même étonner les savants théologiens qui voulaient à tout prix te condamner.
Nous savons ainsi que tu étais une fille ordinaire, née dans une famille simple, chrétienne. Tu connaissais l’essentiel de la foi, ce que ta mère t’avait appris : le Symbole des Apôtres, le Notre-Père et le Je-vous-salue-Marie.
Tu étais vraiment une jeune de ton temps, comme beaucoup d’autres jeunes. Pas de SMS ou de réseaux sociaux. Tu aimais aller aux champs, mais aussi rencontrer les jeunes du village pour jouer avec eux.
De l’écoute à l’engagement total
Un jour, tu as compris que tu aurais une mission particulière à accomplir. À travers la « voix » de l’archange St Michel, tu t’es sentie appelée à intensifier ta vie chrétienne et à t’engager pour la libération de ton peuple. Au début, cette parole du Seigneur t’a plutôt fait peur. Mais peu à peu, tu avais appris à écouter Dieu et ainsi cela te mettait dans la paix, et tu voyais mieux ce que tu avais à faire. Tu écoutais une « voix » de Dieu qui t’aidait à te gouverner, comme tu le disais.
Appelée par Dieu dès l’âge de 13 ans, tu as donc mûri ta vocation pendant 4 ans, secrètement, sans pouvoir en parler à tes parents ou à tes amis : tu menais donc la vie de tout le monde.
Et puis un beau jour, le moment est venu de partir. Tu t’es décidée à vivre l’engagement qui t’était demandé : partir pour redonner courage au Dauphin appelé à devenir roi de France. Car ce dernier avait peur des Anglais qui occupaient la France et tenaient sous leur influence nombre de princes et de gens d’Église. Toi qui ne connaissais pas grand chose à la politique, tu avais compris l’injustice de cette occupation étrangère dont les pauvres gens étaient les premières victimes, dans l’insécurité d’un conflit qui n’en finissait pas.
Tu exprimais une liberté étonnante, y compris envers tes parents : tu aurais voulu leur éviter la peine de te voir partir, mais tu devais suivre ta voie « même si tu avais eu 100 pères et 100 mères ». Tu devais redonner fierté à des gens battus d’avance, soumis, et qui ne croyaient plus à leur dignité.
L’amour, envers et contre tout
À 17 ans, tu te lançais sur des chemins improbables, et tu donnais de quoi espérer à des gens qui n’y croyaient plus. Tu te montrais forte, à 17 ans, capable de convaincre des hommes incertains et découragés. À 17 ans, tu prenais le commandement parmi les militaires chevronnés, et tu vivais ton engagement dans la droiture parmi des soldats qui ne respectaient pas toujours les jeunes filles ! Tu les évangélisais par ta bonté, ton courage et ton extraordinaire pureté. À vrai dire, tu continuais d’écouter ce que Dieu pouvait de dire. Car tu continuais de prier régulièrement, de communier et de te confesser aussi : et tout cela t’apportait une force étonnante même au milieu des doutes et des difficultés, quand tu auras été prise par tes ennemis.
Ainsi tu conduisis les troupes jusqu’à délivrer Orléans assiégée (8 mai 1429) et au sacre du Dauphin à Reims (17 juillet 1429). Puis les choses ont plutôt mal tourné, même le nouveau roi semblait avoir autre chose à faire et voulait encore transiger avec l’ennemi : tu as été un peu une monnaie d’échange ! Capturée (23 mai 1430), tu es emmenée de ville en ville, emprisonnée, « jugée » si l’on peut dire par des gens qui cherchaient des prétextes pour te faire mourir. Mais tu savais aussi que quoi qu’il advienne, Dieu ne t’oublierait pas. Tu t’en remettais à Lui, car « tu L’aimais de tout ton coeur », disais-tu. Tu continuais de lui faire confiance.
Malgré l’acharnement de ceux qui voulaient ta condamnation, tu as pu communier avant le sacrifice et, sur le bûcher, tenir entre tes mains la croix du Christ Jésus, dont le nom fut ton dernier cri (30 mai 1431). Jésus allait t’accueillir en sa paix.
Tu nous laisses ainsi le témoignage d’un amour total pour Jésus et pour ton prochain en Jésus. Tu contribuais à une oeuvre de justice humaine en libérant ton peuple et tu accomplissais cette oeuvre dans la charité, par amour de Jésus.
Et maintenant ?
Enfin, l’Église a souhaité faire de toi une « sainte », non pas d’abord en vertu de ton attitude héroïque, mais à cause de ta fidélité au Christ et même à l’Église, cette Église dont quelques prélats allaient te condamner : on imagine ton déchirement quand tu disais aux hommes d’Église qui te jugeaient: « Le Christ et l’Église, c’est tout un » ! Merci, Jehanne, pour ton témoignage.
Jehanne, tu es toujours vivante pour nous. Inspire aux jeunes d’aujourd’hui la foi en eux-mêmes, la conscience qu’ils vivent sous le regard de Dieu. Aide-les à prêter l’oreille à ce que Dieu peut leur dire, qu’ils sont uniques à ses yeux. Aide chacun d’eux à percevoir la mission qui est la sienne, l’engagement qu’il est appelé à entreprendre, avec la certitude qu’ils ne seront pas seuls pour l’accomplir. Fais-leur comprendre que l’Église elle-même, si elle a ses faiblesses, ses infidélités, est finalement à leurs côtés, et qu’ils peuvent et doivent y faire entendre leur voix, avec l’assurance que l’Esprit est présent auprès de chacun de ses fidèles.
+ Jean-Paul Mathieu,Evêque de Saint-Dié
Epinal, le 06 décembre 2011.