Le sens de Noël, par Mgr Dubost le 1er novembre 2009

Michel Dubost

La crise.
« On » en parle. « On » trouve cela terrible, mais, après les informations,
« on » passe au film.
« On » va à la messe le dimanche… Et « on » est content parce que le Secours Catholique et tant de personnes « admirables » « s’occupent » des pauvres.
La crise.
Elle touche aussi notre diocèse, notre paroisse, nos voisins. Quelquefois nous-mêmes !
Et il nous faut la regarder en face.
Agir en chrétien est un appel qui traverse l’Évangile…
« Ce ne sont pas ceux qui disent : « Seigneur, Seigneur », qui seront sauvés, mais ceux qui écoutent la Parole et la mettent en pratique. »
L’agir chrétien repose sur un trépied : la Parole reçue et exprimée, la liturgie, le sacrement du frère. En dehors de cela, il n’est pas possible de se dire chrétien. La rencontre du Christ ne peut pas se faire par personnes interposées. Il ne suffit pas d’être généreux et de donner de l’argent pour être chrétien. Il faut rencontrer l’autre. Personnellement. Être chrétien, c’est recevoir l’appel du Christ -et l’Esprit du Christ- pour rencontrer et aimer.
« Une des pauvretés les plus profondes que l’homme puisse expérimenter est la solitude. Tout bien considéré, les autres formes de pauvreté, y compris les pauvretés matérielles, naissent de l’isolement, du fait de ne pas être aimé ou de la difficulté d’aimer. Les pauvretés sont souvent la conséquence du refus de l’amour de Dieu, d’une fermeture originelle tragique de l’homme en lui-même, qui pense se suffire à lui-même ou bien considère qu’il n’est qu’un simple fait insignifiant et éphémère, un « étranger » dans un univers qui s’est constitué par hasard. L’homme est aliéné quand il est seul ou quand il se détache de la réalité, quand il renonce à penser et à croire en un Fondement. »
Caritas in veritate, 53

Voici Noël. Nous pouvons être pauvres nous-mêmes. Nous pouvons être chargés – surchargés- et Dieu ne nous demande pas l’impossible. Il nous demande de rencontrer, de ne pas laisser seul, de montrer de l’intérêt, d’avoir besoin de l’autre.
J’ai demandé, au début de ce trimestre, à chaque groupe, chaque aumônerie, chaque mouvement, chaque paroisse, chaque service, chaque famille de regarder autour de lui et de faire un geste d’amitié envers quelqu’un -ou quelques uns- que la crise ou les circonstances laissent seul. Peut-être que cette ouverture à l’autre conduira certains à des partages financiers. Mais mon premier appel n’est pas là : mon appel consiste à inviter à rencontrer des personnes isolées, malades (ou seules avec de grands malades), dans le deuil, dans le chômage, la rupture, la peur, dans la pauvreté, et de leur donner une place dans notre souci.
Il s’agit de rencontrer… pas forcément pour donner, mais pour respecter.
Un pauvre, c’est quelqu’un dont personne n’attend rien… qu’il serait extraordinaire d’avoir besoin les uns des autres pour vivre ensemble, animer, rencontrer d’autres : les tables ouvertes, les lieux de convivialité, les groupes de paroles, les visites sont des éléments essentiels de la vie chrétienne. Les idées ne manquent pas : ici, une rencontre peut déboucher sur un co-voiturage pour se rendre à la messe ; là, sur la constitution d’une chorale… là, simplement sur une invitation le soir de Noël (je pense ici aux étudiants étrangers résidant dans le diocèse), que sais-je ?
Voici un Noël pendant la crise…

Il nous faut entendre cette Parole de Dieu qui se fait chair pour dire son amour pour tous… Il nous faut entendre les exclus de la vie sociale : c’est à eux, les bergers d’aujourd’hui, que les anges apprennent à chanter « Gloire à Dieu au plus haut des Cieux et paix sur la terre aux hommes qu’il aime ». Et c’est eux qu’il faut entendre. Bon Noël.

Mgr Michel Dubost
Évêque d’Évry – Corbeil-Essonnes
le 1 er Novembre 2009

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