Noël, anniversaire ou naissance ?

Nativité

Au milieu des retrouvailles, des repas de fête et de l’échange de cadeaux, les chrétiens se rassemblent au cœur de la nuit… Est-ce simplement pour fêter un anniversaire ? Est-ce que nous venons en regardant en arrière, sur les années qui inéluctablement s’écoulent, sur les Noëls de notre enfance qui ne reviendront plus ? Au contraire, est-ce que c’est une naissance qui nous rassemble ? Et sommes-nous alors tournés vers l’avenir que Dieu prépare pour nous ?

Car le Dieu que nous fêtons à Noël n’est pas seulement le Dieu de quelques-uns, Dieu rejoint toute l’humanité à travers ce qui est partagé par chacun, c’est-à-dire la naissance. Car il s’agit bien d’une naissance en cette nuit de Noel : c’est bien la représentation d’un tout petit enfant que nous déposons dans la crèche. Dieu ne se manifeste pas dans le fracas d’une parole qui tombe du ciel, dans les ouragans qui traversent notre monde et nos propres vies, mais dans cette modeste naissance.

Là, Dieu rejoint l’expérience de toute l’humanité, celle de la naissance. Nous ne sommes pas à l’origine de notre vie, nous l’avons reçue. Et Noël est vraiment ce rappel radical que nous ne sommes pas à l’origine de nous-mêmes, et que la vie nous est confiée.

C’est parce que Dieu rejoint l’humanité dans ce qu’il y a de plus commun que les chrétiens, en ce temps de Noel, cherchent à signifier que Dieu aime toute l’humanité et veut la constituer en un peuple nouveau. Les chrétiens  cherchent à inscrire leurs vies comme un service de l’humanité encore en chemin vers cette réconciliation universelle qui nous est promise, et que nous essayons d’anticiper dans notre posture, plus encore que dans nos paroles.

Comprendre Noël comme une naissance de Dieu à l’improviste, et pas comme un anniversaire qui nous retourne vers le passé, manifeste qu’en Jésus-Christ Dieu prend chair humaine, il se fait histoire. Dieu ne surplombe pas l’humanité, en Jésus-Christ, il se fait proche de nous, il renverse la frontière qui sépare l’humanité de la divinité. Non Dieu n’est pas au-dessus de nous, mais il entre au plus intime de nous-mêmes, il pénètre de sa présence tous les aspects de la vie humaine, même les plus banals.

Ceci change alors complètement la prière, souvent conçue comme une activité séparée, où il faudrait oublier le concret de notre existence, se concentrer pour s’abstraire de notre humanité. La prière n’est pas une évasion, une pure répétition de formules toute faites, mais c’est la prise de conscience de notre existence, de cette vie que nous avons reçue, que nous goûtons et que nous cherchons à transmettre, comme parents, comme éducateurs, comme acteurs de la vie sociale. Si c’est bien Dieu qui naît au cœur de notre humanité, alors ce sont toutes les dimensions de notre existence qui deviennent les lieux mêmes de la prière, du rapport intime avec ce Dieu proche de chacun de nous, à tout moment de notre vie.

À Noël, non seulement nous prenons conscience de nouveau que la vie nous est confiée, mais que cette vie ne peut être que service et prière. En contemplant ce petit enfant qui vient de naître, c’est Dieu lui-même qui se donne à nous, mais c’est aussi l’humanité qui apparaît dans la fragilité de la vie qui nous est un moment confiée afin que nous la transmettions plus belle, comme hommes et femmes de service et de prière !

 

Hugues de Woillemont

Par
le Père Hugues de Woillemont,
Secrétaire général de la Conférence des évêques de France