Homélie du dimanche 25 novembre

LE CHRIST, ROI DE L’UNIVERS

Références bibliques :
Livre de Daniel : 7. 13 et 14 : « Une royauté qui ne sera pas détruite. »
Psaume 92 : « Tes volontés sont vraiment immuables. »
Apocalypse de saint Jean 1. 5 à 8 : « Je suis celui qui est, qui était et qui vient. »
Evangile selon saint Jean 18. 33 à 37 : « Tout homme qui appartient à la vérité, écoute ma voix. »

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Le symbole royal occupe une place centrale dans l’histoire de la Révélation. Mais il nous faut le libérer de la charge que le passé fait peser sur ces mots : royauté, monarchie, absolutisme, pouvoir arbitraire aux mains d’un seul, etc …

Il est indispensable de le situer dans son sens premier : « regere », assurer une direction, une rectitude, une règle de vie, d’être et d’agir.

LE SEIGNEUR EST ROI

Dans le contexte biblique, il y a toute l’évolution de la royauté en Israël et la comparaison avec ce que furent les rois de ce petit royaume depuis le moment où le prophète Samuel est invité par Dieu à répondre à l’attente du Peuple, au milieu des nations qui sont gouvernées solidement par des rois puissants, alors qu’avant Samuel, la période des Juges connaît de longues périodes avec une réelle absence de pouvoir.

Les prophètes rappellent que le véritable roi n’est pas celui qui réside dans le palais de Samarie ou dans le palais de Jérusalem. Le roi, c’est le Seigneur lui-même. Ainsi se révèle-t-il au prophète Isaïe dans la scène de sa vocation au chapitre 6 : « Mes yeux ont vu le roi, Yahvé Sabaoth. »

Le palais de Dieu n’est autre que le temple, présence en ce monde de l’au-delà de ce monde. Et c’est là que la création toute entière, dans sa puissance souvent terrible, mais aussi dans sa solidité rassurante, est elle-même associée à la gloire du Seigneur. « Yahvé siège en roi éternel. »

La royauté de Dieu s’exerce sur la terre, mais la dépasse : « Dès l’origine ton trône tient bon, depuis toujours tu es. » Souverain de l’univers, le Seigneur règne sur toutes les nations : « Rapportez au Seigneur, famille des peuples, rapportez au Seigneur gloire et puissance. Dites chez les païens : c’est le Seigneur qui règle. Il prononcera sur les peuples avec droiture. »(psaume 95. 7 à 10)

La royauté de Dieu s’exerce tout particulièrement sur Israël. Le symbole royal se transforme en symbole pastoral, comme cela est constant dans l’ancien Orient : le roi est le pasteur de son peuple. Il le mène vers la prospérité, il le protège de ses ennemis extérieurs, il empêche les brebis de combattre les unes les autres.

UN ROI COMME LES AUTRES

Dieu étant le seul véritable roi d’Israël, comment le peuple doit-il être gouverné ? Après le temps de l’exode dans le désert sous la conduite de Moïse, deux siècles de conquête et d’infiltration progressive en Palestine se passent sous la direction des « Juges » qui, quelques années durant, rallient autour d’eux l’une ou l’autre tribu.

A la fin du premier millénaire, Israël refuse ce régime précaire et, surtout, ne veut en rien être inférieur aux peuples qui l’environnent. Ils ont des rois, pourquoi pas nous ?

Le prophète Samuel tâche de les en dissuader. En parlant des excès de certains rois, le premier livre de Samuel (chapitre 8) comporte une critique du pouvoir absolu, empreinte de réalisme, donne du roi un portrait qui est à l’inverse de ce que Jésus demandera aux apôtres, se faire le serviteur de tous. D’autre part, la demande d’un roi n’est-elle pas le rejet de Dieu comme roi sur Israël : « Ils ne veulent plus que je règne sur eux. » (1 Samuel 8. 7)

L’ANNONCE FAITE A DAVID

Dieu pourtant a consenti au désir de son Peuple et choisit Saül, puis David, fils de Jessé, de la tribu de Juda, originaire de Bethléem. Dieu se lie à David par serment, comme le lui annonce le prophète Nathan : « Je serai pour lui un père et il sera pour moi un fils. » (2 Samuel 7. 15)

Israël continua de croire à cette promesse divine malgré tous les déboires de l’institution royale : division du royaume en roi d’Israël et en royaume de Juda, idolâtrie de certains rois, scandales moraux, invasion, exil. Malgré les apparents désaveux de l’histoire, l’attente du Messie, roi d’Israël selon la volonté de Dieu, fidèle à l’Alliance, garant de la sainteté du Peuple, ne disparaîtra pas.

LA ROYAUTE DU FILS DE L’HOMME

Au moment des grandes persécutions, sous Antiochus Epiphane, l’espérance s’exprime dans l’avènement du Royaume. C’est la révolte des Maccabées qui voudrait le rétablir. C’est la vision du prophète Daniel que nous lisons ce dimanche dans la première lecture : « En ce temps-là viendra le salut de ton Peuple. »

Voici que vient en effet le jour du Fils de l’Homme. Il représente le Peuple enfin libéré de l’asservissement et recevant de Dieu « domination, gloire et royauté. » Initialement, cette figure est collective. Avec le temps elle devient de plus en plus personnelle en la personne du Messie, attendu comme roi d’Israël par un don de Dieu. A l’époque du Christ, bien des révoltes contre les Romains s’inspirent de cette attente.

Le Christ revendique cette royauté, mais une royauté qui n’est pas de ce monde. Il ne veut pas la tenir du Tentateur et rejette les propositions terrestres que Satan lui fait miroiter. « A l’heure de passer de ce monde à son Père », il revendique pour lui-même la prophétie de Daniel.

Relire les textes du procès de Jésus à la lumière de ces textes de la tentation ou de la vision de Daniel, donne une grande dimension aux paroles du Christ. Dans le même temps, s’il est qualifié de « roi des Juifs », c’est que le pouvoir romain ne reconnaissait pas l’autonomie politique d’un Etat souverain. Il est le roi d’un peuple auquel ce même pouvoir reconnaissait des droits et des usages religieux particuliers.

Dieu, par son Fils, redevient le Seigneur de son Peuple. Cette royauté dépasse ce Peuple et s’exerce sur toutes les nations : « C’est le Seigneur qui règne. » (Psaume 95. 10)

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Après avoir soumis à son pouvoir toutes les créatures, il remet aux mains de ta souveraine puissance un règne sans limite et sans fin, règne de vie et de vérité, règne de grâce et de sainteté, règne de justice, d’amour et de paix. » (Préface de la fête du Christ-Roi)

année liturgique B