Homélie du dimanche 26 juillet

Au moment où il est question des suites de la multiplication des pains, la liturgie interrompt la lecture continue de l’Evangile selon saint Marc pour nous donner la totalité du chapitre 6ème de saint Jean, soulignant ainsi que le discours du Pain de Vie forme un tout avec ce miracle.

DIEU NOUS ACCOMPAGNE

En multipliant les pains, Jésus nous révèle que Dieu est attentif à la réalité de notre vie humaine ordinaire et quotidienne. Déjà, dans l’Evangile de dimanche dernier, seizième dimanche, saint Marc notait cette attention à notre sentiments et à nos réactions : »En voyant les foules comme des brebis qui n’ont pas de bergers, il en fut saisi de pitié et il se mit à les instruire longuement. » (Marc 6. 34)

L’essentiel pour tout homme, c’est de trouver un jour ou l’autre, la réponse à son besoin profond de savoir, de connaître, pour donner un sens à sa vie, à toute vie. Et par là, de s’assumer lui-même : « Il les instruisit longuement. » Il ne les mène pas sans savoir… il les instruit. Toute une journée au point qu’ils ne virent pas le temps passer et, quand vint le soir, il était trop tard pour aller dans les fermes et les villages.

L’Evangile devient alors réaliste, si l’on peut parler ainsi. Jésus avait donné priorité au ministère de la Parole, à la nourriture spirituelle. Il reconnaît aussi la situation concrète dans laquelle cette foule se trouve. Il prend lui-même l’initiative et non pas les apôtres : « Où pourrions-nous acheter du pain pour qu’ils aient à manger ? »

Leur réponse est tout aussi réaliste et concrète : « Le salaire de deux cents journées ne suffiraient pas. » Le fils du patron pêcheur du lac, le comptable des impôts savent de quoi ils parlent : acheter, manger, salaires, deux cents journées de travail. Au salaire minimum français d’aujourd’hui, cela dépasse 50.000 francs. Cela ne veut pas dire que Jésus soit impuissant à résoudre ce problème. Cela veut dire que la petite communauté apostolique n’en a pas les moyens.

L’HOMME ACCOMPAGNE DIEU

Jésus va nous révéler le vrai visage de Dieu à travers son Fils nourrissant la foule. Mais il ne peut le faire sans la participation de l’homme. Il attend de nous une participation responsables. Il a besoin des hommes, si minime soit l’apport. Il ne fait pas un miracle à partir de rien. « Un jeune garçon, cinq pains d’orge, deux poissons. » Pas même la foi des apôtres.

Dieu ne nous remplace pas, ne se substitue pas à nous. Il nous a confié la tâche de faire croître et multiplier ses propres dons qui deviennent ainsi les dons des hommes. L’homme reconnaît ainsi ses limites humaines en même temps que la grandeur de cette « collaboration » de son travail uni à l’œuvre de Dieu.

Il faut un saint Vincent de Paul ou un Frédéric Ozanam, l’abbé Pierre et Mère Teresa, les « restos du cœur » le « Secours catholique », le « Secours Populaire » et « Médecins sans frontières. Au lieu d’accuser Dieu, louons-le de mettre au cœur des hommes cette générosité qui les fait participer au grand commandement de Dieu, même s’ils n’ont pas la foi. Pain rompu pour un monde nouveau… Ils ont beaucoup aimé, il leur sera beaucoup pardonné.

DIEU NOUS APPELLE

Quand tout fut accompli, que les pains restant furent rassemblés, la foule, détendue, étonnée, réfléchit à ce qui vient de se passer et elle se mit à en discuter. Ce ne sont pas des réflexions mystiques sur le sens des douze corbeilles, du nombre des pains et de poissons. Elle voit dans l’immédiat, au niveau humain, les prolongements possibles.

C’est alors que Jésus se retire. Il sait qu’il veulent le prendre pour le retenir. Il se retire pour ne pas donner à cette multiplication des pains une signification matérielle et même spirituelle autre que la celle qui doit être la découverte du cœur de Dieu, de son amour pour les hommes.

« L’homme ne vit pas seulement de pain. » Ce fut la tentation du désert aux premiers jours de sa vie publique. Les laisser s’enfermer dans leur dialectique, c’était risquer de fausser l’authenticité de son message, celui pour lequel il les avait « longuement instruit. »

Il se retire seul. Il les attire ainsi à lui. Les autres évangélistes sont plus concrets puisqu’ils mentionnent les péripéties du départ des apôtres, quand Jésus les remet dans la barque.

Il n’est pas venu résoudre un manque de nourriture. C’est aux hommes de le faire. Il est venu nous rappeler l’essentiel : « Venez et voyez. »

Ce n’est pas pour les pains multipliés gratuitement et les poissons distribués que nous devons le suivre. C’est pour la Parole qu’il donne. Celle qu’il leur a donnée, celle qu’il veut encore nous donner, celle à laquelle le long entretien de Capharnaüm donnera tout son sens. C’est lui le Pain de vie. »

année liturgique B