Neuvième congrégation de la seconde Assemblée spéciale pour l’Afrique

Le Vendredi 9 octobre, s’est déroulée en présence du Pape la neuvième Congrégation générale du Synode africain, sous la présidence du Cardinal Théodore-Adrien Sarr (215 Pères présents).
 

Voici des passages de quelques unes des interventions:

Mgr.Henryk Hoser, SAC, Archevêque de Warszawa-Praga (Pologne):
« L’éducation aux valeurs familiales est d’une urgente nécessité dans le monde et particulièrement en Afrique, à l’heure où des pressions extérieures croissantes renvoient l’exercice de la paternité et de la maternité responsables au domaine purement sanitaire et hospitalier, niant en cela la double nature, spirituelle et sensible, de l’amour conjugal. La pastorale familiale et plus particulièrement la transmission de la vie ont été quasi abandonnées au monde médical et technicien. Or des programmes existent déjà: 26 pays africains bénéficient des programmes d’éducation à la vie familiale et de planification naturelle (EVF et PFN) au stade embryonnaire ou structuré. Mais on est trop faible pour se permettre d’avancer en ordre dispersé. La Fédération africaine d’action familiale créée à Cotonou en 2001 offre, à la demande des évêques, des sessions de formation pour les éducateurs et pour les couples ».
 

Le Cardinal Bernard Agre, Archevêque émérite d’Abidjan (Côte d’Ivoire):
« Comme tout pays organisé, les jeunes nations d’Afrique ou d’Amérique du sud ont du faire appel à des banques internationales et autres organismes financiers pour réaliser les nombreux projets en vue de leur développement. Très souvent on ne se méfie pas assez des dirigeants mal habiles. Ils sont tombés dans les pièges de ceux et celles que les initiés appellent les assassins financiers, les chacals commandités par des organismes rompus dans les marchés de dupes destinés à enrichir les organisations financières internationales soutenues habilement par leurs états, ou d’autres instances noyées dans le complot du silence et du mensonge… La dette devient même un paravent politique pour ne pas satisfaire les revendications légitimes, avec leur cortège de frustrations, de troubles sociaux… Ainsi le Synode actuel devrait-il pouvoir prendre en compte ce problème de l’annulation des dettes qui pèsent trop lourdement sur certains peuples… Ma proposition serait qu’une commission internationale composée de spécialistes de la haute finance, de pasteurs avisés, hommes et femmes du nord et du sud, se saisissent du dossier. On confierait à cette commission la triple mission d’étudier la faisabilité de l’opération car il est évident que tout n’est pas uniforme partout, de prendre toutes sortes de dispositions pour éviter de retomber dans les mêmes situations, de veiller concrètement à l’utilisation transparente des sommes ainsi économisées pour qu’elles servent effectivement les éléments de toute la pyramide sociale ».

Mgr.Peter J.Kairo, Archevêque de Nyeri (Kenya):

« Les nomades vivent et sont actifs depuis des siècles dans 52 diocèses des pays de l’AMECEA; ils sont aussi présents à l’ouest et au nord de l’Afrique. Parfois, ils provoquent et déclenchent un conflit armé du fait du manque d’eau et de pâturages en particulier durant la sécheresse… Pour sa part, l’Eglise doit promouvoir le dialogue entre ces différentes tribus dans lesquelles le rôle des anciens est très important parce que les guerriers ne peuvent combattre sans la bénédiction des anciens. Le gouvernement devrait également s’impliquer dans la construction de puits et de barrages dans les zones arides. Des institutions sanitaires et éducatives devraient également être créées et promues parmi les pasteurs. La Commission Justice et Paix devrait enseigner les droits de l’homme aux populations nomades. Les parents devraient être encouragés à éduquer leurs filles. Au sein de ces paroisses, il devient extrêmement difficile pour un prêtre de fournir aux personnes une attention pastorale adaptée. Dès lors, les nomades qui se déplacent relativement souvent demeurent exclus de l’activité ordinaire et traditionnelle de la paroisse. Il faut que l’Eglise mette en place de nouvelles formes d’évangélisation et montre une attention pastorale à la population nomade. Cela devrait comprendre la nomination de prêtres nomades, de coordinateurs pastoraux nomades, de catéchistes nomades, d’écoles mobiles, de cliniques vétérinaires et de centres ecclésiaux mobiles ».

Mgr.Boniface Lele, Archevêque de Mombasa (Kenya):
« La marque infamante associée au Sida est trop lourde à porter seuls pour personnes ou communautés. J’ai vu la peur et le désespoir dans les yeux de nos gens. Ils doivent trouver le courage et l’espérance en nous. Ils entendent les responsables religieux et leurs familles dire que, d’une manière ou d’une autre, ils sont responsables de leur maladie. Nous devons aider nos peuples à prendre conscience que le Sida est une maladie et qu’il est faux de penser qu’ils en sont responsables… J’ai vu des familles qui avaient renvoyé leur belle-fille ou leur enfant parce qu’ils les soupçonnaient de la maladie. Le rejet des enfants par leur famille est une abomination. Il s’agit d’un grave péché aux yeux de Dieu. C’est une distorsion du message de Jésus qui est amour, pardon, réconciliation, retour à la famille de Dieu… Le Sida est un révélateur qui nous défie à révéler combien profonds sont nos péchés. J’ai connu un homme qui mourait du Sida et j’ai été honoré d’être à ses côtés durant ses derniers jours. Je l’ai vu se battre avec des décisions vitales et contre la honte de sa maladie, avec les stigmates qu’il a reçus de la société. J’ai commencé à comprendre ma propre humanité et mes propres péchés quand il tendit les mains pour toucher la Croix que je portais. J’ai senti qu’il s’acceptait lui-même alors qu’il recevait le pardon et la guérison de Dieu. C’est à ce moment qu’il m’a demandé de prendre soin de ses enfants, ce qu’il ne pouvait plus faire. J’ai senti sa confiance en moi, comme frère et comme pasteur. Dieu me défiais à m’accepter moi-même pour être réconcilié avec moi-même ».

M.Laurien Ntzimana, Auditeur du Rwanda:

« Je raconterai ici brièvement mon aventure de théologien laïc en quête d’une spiritualité qui fasse justice à l’Indoles Saecularis, qui fait du laïc un enfant de l’Eglise… Entre 1990 et 1994, j’ai utilisé le principe de bonne puissance au sein du Service d’animation théologique confié à ma responsabilité par l’évêque de Butare, pour former les responsables des communautés chrétiennes à la dimension publique de la foi… Le principe de bonne puissance m’a permis de résister au génocide et d’aider au maximum de mes forces mes frères et sœurs tutsi ». Ensuite « j’ai usé du principe bonne puissance pour former des animatrices et des animateurs qui ont su porter la bonne nouvelle sur les collines de Butare dans le terrible contexte de l’immédiat après-génocide; le prix de la paix de Pax Christi international de 1998 est venu reconnaître la valeur de ce travail…et m’a permis de fonder l’association Modeste et Innocent qui, depuis février 2000, malgré la prison et d’autres tribulations, travaille avec succès à la réconciliation des Rwandais ».

Mme Elena Giacchi, Présidente de la Coordination italienne de la Méthode Billings, invitée spéciale du Saint-Père:

« La diffusion et l’enseignement de cette méthode de l’Ovulation de par le monde, ont toujours été joints à la proposition d’un mode de vie qui favorise l’amour conjugal, l’unité de la famille, le respect de la femme, et une ouverture généreuse à l’acceptation d’une vie nouvelle. Parce qu’elle est simple et efficace la MOB peut être utilisée par tous les couples dans des contextes différents, sans distinction de culture, de religion ou de statut social, la méthode est bien acceptée non seulement par les catholiques, mais aussi par les musulmans, les hindous, et des personnes d’autres croyances. Le couple peut maîtriser sa fécondité de manière naturelle, que son désir soit de favoriser ou de différer une grossesse, dans toutes les situations de la vie fertile de la femme y compris si les cycles sont irrégu1iers, pendant l’allaitement au sein, à l’approche de la ménopause. Partout où la MOB est enseignée, elle contribue à promouvoir la famille et la procréation responsable au regard de la vie, de l’amour conjugal et de la fidélité, à promouvoir la dignité de la femme, à éviter l’avortement, à éviter d’avoir recours aux technologies de procréation assistée, donnant la possibilité aux couples sub-fertiles de réaliser une grossesse de manière naturelle, en accord avec leurs valeurs éthiques, à éviter la diffusion des maladies sexuellement transmissibles par une éducation à une sexualité responsable auprès des jeunes et des adolescents qui intègre les dimensions spirituelles, physiques et psychologiques. L’enseignement de la MOB contribue à promouvoir et à diffuser les valeurs humaines et chrétiennes en vue de l’évangélisation et du développement pastoral ».

M.Rudolf Adala, ex Représentant spécial du Secrétaire général de l’ONU, Président de la Commission UA sur le Darfour, invité du Saint-Père:
« Le Soudan est le plus grand pays d’Afrique. Il est à la charnière de deux mondes, l’Afrique et le Monde arabe et a des frontières avec 9 autres pays africains. Depuis son indépendance en 1956 i1 n’a connu qu’une paix sporadique. L’Accord global de paix, qui a mis fin à plus de 20 ans de guerre civile entre le nord et le sud a suscité tous les espoirs. Pour la première fois, un Soudan démocratique était entrevu. Au moment où la violence semble diminuer au Darfour, il est inquiétant de noter que c’est maintenant dans le Sud que les tueries reprennent, la Paix serait-elle le rocher de Sisyphe qui, pour le plus grand malheur des Soudanais, retombe dès qu’on croit atteindre le sommet de la montagne? Le Soudan est un. Il faut que la communauté internationale pense Soudan et non plus Darfour et sud . Dans cette vision holistique, l’Eglise a un rôle majeur à jouer dans un Soudan pluriel, entre le sud chrétien et animiste et le nord musulman, dont le Darfour. C’était le rêve d’un grand soudanais, John Garang, le rêve d’un nouveau Soudan, en paix, dans une Afrique en paix ».

Extrait du VIS de 12 octobre 2009