« Un moine est dans la gratuité absolue », interview de Mgr Le Saux

 

Pour les moines, la fidélité dans un lieu précis à la vie de prière est un témoignage de fidélité à Dieu et aux personnes. Ils sont la manifestation de leur désir de suivre le Christ. Solesmes a connu seulement quarante ans d’interruption (entre la Révolution et l’installation par Dom Guéranger en 1833). Pour le diocèse, c’est un témoignage de durée dans le temps. Faire mémoire de ces hommes qui ont tout quitté pour le Christ est une grande joie pour le diocèse. Si quelqu’un n’a pas de mémoire, il n’a pas d’avenir. Si nous perdons la mémoire, on ne peut plus penser le futur. Nous avons reçu de ceux qui ont travaillé avant nous.

Que nous dit cette communauté pour le monde d’aujourd’hui ?

Le témoignage de la vie monastique est celui d’une gratuité absolue. Un moine ne sert à rien dans une société qui ne fonctionne que par l’efficacité, dans un monde où on mesure la réussite par un succès quantifiable, même au sein de l’Eglise. Un moine représente la gratuité des relations à Dieu, un espace sans rapport avec le succès, ni avec le temps. Le rapport au temps du moine n’est pas le même que celui de la société contemporaine, mais un témoignage de la durée et de l’intériorité. Le rôle des moines est de nous rappeler que Dieu seul suffit à combler la vie d’un homme. La figure du monde passe, seule la Parole de Dieu demeure. Les moines ont pour vocation de suivre le Christ, le louer, l’aimer, le chercher. Ils sont un témoignage vital pour nos contemporains.

Une culture de l’immédiateté, de l’apparence, avec une communication ouverte à tous mais très superficielle n’est pas suffisante. Nous sommes dans l’artifice, nous pensons être efficaces mais nous ne sommes plus féconds. Les moines sont un des remèdes au monde. Une présence est essentielle si elle peut nous aider à tirer les leçons pour notre existence. Si elle n’a pas d’incidence dans notre vie personnelle, si elle ne nous aide pas à créer des espaces gratuits pour prier et écouter, nous ne pouvons pas nous en réjouir. Si cela n’entraîne pas notre conversion, ce n’est pas satisfaisant. J’espère que nous tirerons les fruits de ce témoignage des moines de Solesmes pour nos vies et pour nous-mêmes.

Comment vos diocésains sont-ils associés à cet évènement ?

D’une part, ils sont invités aux manifestations prévues par le monastère. D’autre part, les moines célèbreront l’Eucharistie le 29 mai 2010 à la cathédrale du Mans. C’est un évènement unique car les pères abbés seront présents. Les moines célébreront les vêpres à Notre-Dame de la Couture, église paroissiale du Mans qui est l’ancien lieu à l’origine de la fondation de Solesmes il y a mille ans.
Le millénaire s’inscrit également dans l’année sacerdotale, qui s’achèvera par une rencontre des prêtres du diocèse à l’abbaye. Il y a une conjonction entre l’année sacerdotale telle qu’elle est vécue dans le diocèse du Mans et le millénaire de l’abbaye de Solesmes. Beaucoup de diocésains et prêtres sont attachés à Solesmes qui figure comme un haut lieu spirituel du diocèse.