Qu’est-ce qu’un Docteur de l’Église ?
Les docteurs de l’Église peuvent être assimilés à des intellectuels de référence pour la foi catholique avant que ce terme n’existe vraiment. À ne pas confondre avec les Pères de l’Église qui pour leur part rassemblent les penseurs fondamentaux datant d’avant le schisme entre catholiques et orthodoxes dont les préceptes ne sont pas toujours officiellement admis comme juste théologiquement.
Au contraire, le terme de docteur de l’église définit, théologiens, philosophes ou écrivains ayant enrichi significativement le magistère (= la doctrine de l’Église) tant au niveau philosophique que spirituel. Les conditions requises pour devenir docteur, d’ailleurs toujours à titre posthume, sont d’être un saint canonisé, d’avoir élaboré une pensée de la foi en accord avec les principes de base de l’Église tout en découvrant un pan inexploré de l’écriture se vérifiant comme fondamental par son influence auprès des fidèles et par une renommée internationale. Le Vatican concède, à la suite d’une étude poussée des candidatures proposées, ce titre exceptionnel.
En près de 2000 ans d’existence, l’Église ne retient pas plus d’une trentaine de docteurs. Si certains de ces titres furent accordés pour des raisons politiques et par soucis d’égalité durant le Moyen-âge afin d’unifier Orient et Occident, d’autres détenteurs de cette distinction sont sans conteste de grandes personnalités de l’Église catholique.
Quelques grands docteurs de l’Église
Saint Thomas d’Aquin (1225-1274) demeure sans nul doute l’un des plus importants d’entre eux, surnommé parfois le « docteur des docteurs ». Tour à tour philosophe et théologien Thomas d’Aquin veut concilier raison et foi, notamment avec l’appui des écrits d’Aristote. Il s’illustre par ses cinq propositions sur l’existence de Dieu prouvant la possibilité de la déduire aussi par la raison. Il reste encore aujourd’hui une référence philosophique importante pour son influence sur la pensée en générale et l’Église catholique a fait du thomisme sa philosophie officielle.
Saint Anselme de Cantorbéry (1033-1109) est à l’origine de la célèbre preuve ontologique de l’existence de dieu (on ne pourrait penser le concept de dieu s’il n’existait pas). Son héritage concerne principalement la christologie, à savoir les raisons de la venue de Dieu sur Terre, mais aussi le domaine de la vie morale comme voie nécessaire pour connaitre le bonheur. Plus tard, c’est le philosophe allemand Emmanuel Kant qui le contredira pour ce qui est de la preuve ontologique.
Saint Bernard de Clairvaux (1090-1153) moine cistercien influent se voulut un veilleur vis-à-vis des excès que son époque occasionnait (la renaissance du 12e siècle). Il combattit le schisme d’Anaclet en prenant position face à celui-ci et fit combattre durement le catharisme en Dordogne. Alors strict au niveau de la doctrine de l’Église catholique romaine, Bernard de Clairvaux protège les Juifs contre les discours enflammés des prédicateurs populaires germains Raoul et Rodolphe.
Saint Jean de la Croix (1542-1591) représente sans doute l’opposé des trois docteurs précédents dans son approche de Dieu. Considéré comme le plus grand mystique espagnol, sa spiritualité fit débat et fut accusée de conduire à l’illuminisme peu après sa mort. Pourtant, nombreux sont les théologiens et Homme de foi qui furent profondément influencés par sa pensée mystique concernant principalement la prière comme voie d’union totale à Dieu. Sa postérité dans la littérature espagnole est immense.
Hildegarde Von Bingen (1098-1179) reste encore probablement l’une des docteurs de l’Église les plus appréciés pour son actualité aussi bien chez les chrétiens qu’ailleurs. À la fois apothicaire miraculeuse, compositrice de grand talent et écologiste avant l’heure. Elle reste célèbre pour ses visions de récits bibliques allant de la création à l’Apocalypse et qui par la suite feront d’elle une sainte. Elle marque dès sa mort la conscience populaire ce qui aidera à une rapide béatification. Benoit XVI la fera sainte et Docteur de l’Église en 2012, elle est ainsi la quatrième et dernière femme dans ce panthéon ecclésiale.
Saint Bonaventure (1221-1274) dont la fête est célébrée le 11 juillet est un des piliers de la théologie de l’Église catholique. Prenant le contrepied de Saint-Thomas d’Aquin, il soutient que l’approche totale de Dieu ne peut être que rationnel du fait de son infinité inspirant ainsi l’extase des ténèbres. Elle signifie une contemplation mystique de Dieu dont la portée illimitée fait se perdre la vue de l’Homme dans l’ombre. Sa postérité dans l’Église porte sur la compréhension de la trinité, la pauvreté, le libre-arbitre de l’Homme et enfin la théologie du corps et de la sensation.