La DCC sur les routes de la fraternité universelle
C’est à Rome, au cœur de l’Eglise universelle, du 24 au 26 février, qu’a été donné le coup d’envoi officiel des 50 ans de la Délégation Catholique pour la Coopération (DCC). L’année s’achèvera à Paris le 5 décembre, Journée internationale du volontariat, avec le soutien du ministère français des Affaires étrangères. Romilda Ferrauto a rencontré la délégation à l’issue de sa visite au Vatican.
Menée par son Président, François Fayol, et par le Délégué général, Guillaume Nicolas, une délégation forte d’une trentaine de personnes a été reçue en audience par le pape François puis par Mgr Paul Richard Gallagher, Secrétaire du Saint-Siège pour les relations avec les Etats. La veille une réception avait été donnée par l’Ambassade de France près le Saint-Siège. Des étapes qui reflètent la spécificité de ce service d’Eglise, reconnu par l’Etat français.
Guillaume Nicolas est un homme réservé et s’efforce avec pudeur de cacher son émotion : à la fin de l’audience le Saint-Père l’a tutoyé. Le Délégué général avait eu le privilège d’offrir au pape François un livre recueillant des témoignages de volontaires de la DCC, une manière de répondre à la lettre du Souverain Pontife aux jeunes en vue de la prochaine Assemblée générale du Synode des Évêques. « Le Pape nous a écoutés attentivement », raconte Guillaume Nicolas. « Après un début un peu protocolaire…..nous sommes entrés dans un dialogue de regards….et la rencontre s’est achevée dans une ambiance chaleureuse ».
Pour la DCC, cette visite au Vatican avait une forte valeur symbolique. « Elle était nécessaire pour comprendre le sens profond de la démarche jubilaire, le besoin de revenir aux sources historiques et aux fondamentaux », explique le Père Luc Lalire, aumônier général de la DCC depuis avril 2016, et chargé de mission pour le Paraguay et l’Uruguay. Les membres de la délégation étaient heureux de recevoir la bénédiction du pontife, de sentir leur enracinement dans la mission universelle de l’Eglise. « Le discours du pape François – centré sur la solidarité, sur la culture de la miséricorde, sur la redécouverte de la rencontre avec les autres – ils l’ont perçu comme une sorte de feuille de route », confie encore le Père Lalire qui revient avec enthousiasme sur certains passages de ce discours : la nécessité de « créer une nouvelle mentalité qui pense en termes de communauté »….. le courage de « parcourir les routes de la fraternité et de construire des ponts …..dans un monde où s’élèvent encore tant de murs par peur des autres ».
Un proche collaborateur du Pape salue le dynamisme profond de l’Eglise en France
Autre source de joie et de fierté pour les membres de la délégation : Mgr Gallagher, qui avait tenu à les rencontrer, a estimé que la DCC était un signe parmi d’autres du dynamisme profond de l’Eglise en France. « A Rome, relève-t-on, on croyait que la France était un pays entièrement sécularisé, et l’Eglise fragilisée par ses difficultés. Mais l’assassinat du Père Jacques Hamel a révélé des trésors de générosité et de vitalité spirituelle ». Guillaume Nicolas raconte que Mgr Gallagher (dont la fonction est souvent comparée à celle d’un ministre des Affaires étrangères) était avide d’échanges sur l’état du monde et sur l’action de la DCC dans plusieurs pays : Centrafrique, Philippines, Syrie, Jordanie…autant de situations que le Vatican suit de près et dont la DCC a une connaissance directe grâce à la présence de ses volontaires sur le terrain.
Les membres de la délégation disent avoir senti une proximité sur des points clés ; ils repartent encouragés à aller de l’avant avec un élan renouvelé dans leur projet pastoral. L’accueil qu’ils ont reçu à Rome prouve la pertinence de ce projet associatif singulier. Ils comptent le dire aux évêques de France lors de la prochaine assemblée de printemps à Lourdes où une séance de travail sera consacrée au volontariat de solidarité internationale. « Les mentalités ont bien changé », se félicite le Président François Fayol. Fini le temps où le modèle atypique de coopération réussie entre l’Eglise et les pouvoirs publics suscitait la surprise, voire la méfiance ; où l’envoi de volontaires en recherche spirituelle ou avouant n’avoir aucun ancrage ecclésial était mal vu.
A leur retour, certains réorientent leur vie ou entament un chemin spirituel
Vendredi soir, l’Ambassadeur de France près le Saint-Siège, Philippe Zeller, avait salué la qualité de la formation réservée aux volontaires avant leur départ, le sérieux de leur accompagnement pendant la mission, et le suivi proposé à leur retour en France. Beaucoup de personnes, jeunes ou adultes, qui ont vécu une expérience de volontariat international, osent, à leur retour, prendre un engagement ou découvrir une vocation. Le Père Luc Lalire insiste d’ailleurs sur le rôle pédagogique de la DCC. « Cette pédagogie, dit-il, elle est de l’ordre de l’évangélisation… Convertir un cœur ça ne se fait pas du jour au lendemain et ça ne se fait pas qu’au coup de cœur ».
Parmi les nombreuses personnalités présentes vendredi soir dans les salons de la Villa Bonaparte se trouvaient aussi d’anciens volontaires de la DCC, dont le Père Jean Landousies, chef de la section francophone à la Secrétairerie d’Etat du Saint-Siège. Il avoue que son service, dans le quartier algérois de Bab-el-Oued en 1968, a orienté de façon décisive son itinéraire de vie. Enfin, pendant son séjour à Rome, la délégation de la DCC a tenu à rencontrer la communauté romaine de Sant’Egidio avec laquelle elle a des valeurs communes : l’option préférentielle pour les pauvres, le souci de la rencontre interculturelle, le désir d’associer action et prière, l’accueil de la diversité, l’engagement dans le social…..mais aussi l’évangélisation car, comme l’a rappelé Mgr Jean-Louis Papin, évêque accompagnateur et vice président de la DCC « L’engagement solidaire des chrétiens pour le développement doit toujours s’ancrer dans une perspective clairement théologique ».
Romilda Ferrauto est journaliste accréditée auprès du Saint-Siège
De nouveaux profils de volontaires recherchés
Créée par l’Eglise catholique en France en 1967, dans la foulée de l’encyclique de Paul VI Populorum Progressio, et dans le cadre du service national en coopération, la DCC s’inscrit dans la mission de l’Eglise et s’appuie sur les textes du Magistère. Sa spécificité : le volontariat de compétence. S’inspirant de la pensée sociale de l’Eglise, cette plateforme contribue à la promotion humaine mais aussi à l’œuvre d’évangélisation.
Partiellement financée par l’Etat français, la DCC a envoyé plus de 20 000 volontaires dans le monde. Elle en compte aujourd’hui près de 500 dans une cinquantaine de pays. Chaque volontaire part pour une durée d’un an à deux ans et met ses compétences au service d’un projet de développement. En un demi-siècle, le modèle de volontariat a beaucoup changé, notamment depuis la suppression en France du Service national. Aujourd’hui un pourcentage élevé de volontaires est composé de femmes et beaucoup partent en couple. Les compétences requises ont également évolué. On demande moins d’enseignants et plus de formateurs pédagogiques, moins d’infirmières et plus de médecins.